En route vers Coachella, où il se produira les 12 et 19 avril, le collectif français C2C a fait escale à Montréal, hier. Un Métropolis bien plein attendait 20Syl, Atom, DJ Greem et Pfel. Ces quatre DJ aux doigts agités avaient il est vrai une bonne carte de visite: Tetr4, un épatant album de pop syncopée, et un prix Victoires de la musique pour ses performances scéniques.

Qu'un groupe formé de quatre DJ soit récompensé pour ses concerts, ce n'est pas banal. Ce n'est pas le seul élément qui sort de l'ordinaire dans le parcours du quatuor de Nantes. C2C a mis 14 ans à sortir un premier vrai disque, qui remporte aujourd'hui un succès considérable: 200 000 exemplaires vendus en France et un clip, F-U-Y-A, vu plus de 4,3 millions de fois sur YouTube.

D'où ce Métropolis bien rempli et l'obligation d'aller prendre la température du phénomène. Le mercure a vite monté dans l'enceinte. Dès The Cell, morceau qui a ouvert le concert (et qui ouvre aussi Tetr4), l'accueil a été plus que chaleureux. Par la suite, personne ne s'est fait prier pour faire du bruit ou lever les bras en l'air chaque fois que le groupe le commandait.

Postés sur scène sur des promontoires d'où ils dominaient la salle, les DJ jouaient les meneurs de jeu. Chacun son tour, ou en presque parfaite synchronicité, ils poussaient les rythmes et scratchaient à relais dans un esprit ludique, dansant et volontairement théâtral.

Quelques heures avant de fouler la scène du Métropolis, Atom et 20Syl insistaient sur l'importance de sortir du cadre des performances de DJ faites par des «hommes troncs». «Il est très important pour nous de ne pas simplement exploiter le côté musical de ce qu'on peut faire avec une machine. Il est très facile aujourd'hui d'avoir un ordinateur, un logiciel et d'appuyer sur des boutons», faisait remarquer Atom.

C2C met la gomme: gestuelle chorégraphiée, projections colorées aux lignes recherchées et... un brin de compétition amicale. Le quatuor, qui a été couronné quatre fois champion du monde par équipe au Disco Mix Club (DMC), s'inspire notamment de ses racines hip-hop pour dynamiser sa performance.

«On a mis en scène l'idée de battle de DJ. On se retrouve face à face par groupe de deux, explique 20Syl. C'est un truc qui permet de jouer avec le public, de chauffer l'ambiance et de casser le côté DJ.»

Évoquer des émotions

L'envie de transcender les outils et l'esthétique DJ se sent aussi beaucoup dans la musique. C2C propose en effet des morceaux fondés sur l'idée du copier-coller, des rythmes syncopés et du scratching, mais qui prennent soin d'évoquer des émotions.

«On est peut-être plus fan de chanson que de musique de club, songe 20Syl. Quand je dis chanson, je pense surtout à l'émotion que peuvent apporter les harmonies, les mélodies, etc.» Même un morceau à la rythmique puissante comme Arcades, joué en début de concert hier, est empreint de nostalgie, en effet.

Ce souci tient du bagage musical commun des quatre membres du collectif, c'est-à-dire le hip-hop des années 90, qui piochait allégrement dans des musiques sentimentalement chargées: jazz, soul, funk, etc. «Toutes ces musiques noires américaines qui ont une âme et une profondeur dans le message nous parlent beaucoup, poursuit 20Syl. Ce sont des choses qu'on a eu envie d'intégrer dans notre musique.»

Tout ça sans perdre de vue l'envie de faire danser les gens. Hier, le plancher de danse du Métropolis était bondé et grouillant. Ravi, aussi, de la dextérité et du sens du spectacle des quatre épatants bidouilleurs.