On m'a accusé d'avoir enterré les boîtes à chansons avec l'Osstidcho, on pourra maintenant me blâmer de les avoir ressuscitées en 2009, a dit le metteur en scène Robert Charlebois à la toute fin du très réussi spectacle Il était une fois... la boîte à chansons, jeudi au Studio du Musée Juste pour rire.

Depuis le 9 avril et jusqu'au 2 mai, quatre rescapés du début des années 60 font revivre cette glorieuse époque où la chanson à texte québécoise était célébrée dans des gymnases d'école et des sous-sol d'église décorés de filets de pêche, de cages à homard et de chandelles. Mais «rescapés» n'est sans doute pas le mot juste pour décrire Claude Gauthier, Pierre Calvé, Pierre Létourneau et le multiple Jean-Guy Moreau dont la performance, dans un décor d'époque emprunté à la Butte à Mathieu, est au moins autant une affaire de plaisir et d'énergie qu'un exercice nostalgique.

 

En toute simplicité, les chansonniers Gauthier, Calvé et Létourneau viennent tour à tour, ou tous ensemble, chanter les chansons les plus appréciées de leur répertoire respectif tandis que Moreau, dans des imitations souvent criantes de vérité, parfois approximatives mais toujours drôles, incarne des grands de la chanson d'expression française des deux côtés de l'Atlantique, de Claude Nougaro, Charles Trenet, Yves Montand et Jacques Brel à Gilles Vigneault et Raymond Lévesque aussi bien que des Jean-Pierre Ferland et Claude Dubois tout à fait hilarants. Pour situer les boîtes à chansons dans leur contexte, Moreau ouvre et ferme le spectacle en s'en remettant à deux de ses personnages préférés, René Lévesque et Jean Drapeau. Il personnifie aussi un René Angélil plus vrai que nature venu prodiguer ses conseils aux trois autres qui, s'ils l'écoutent, auront bientôt les moyens de se payer «un char, une maison ou le yacht d'Accurso».

Mais cette soirée n'est pas qu'un clin d'oeil sympathique. Si elle plaira surtout à un public aux tempes grises qui ne se fait pas prier pour chanter Maurice Richard avec Létourneau, Quand les bateaux s'en vont avec Calvé ou Le grand six pieds avec Gauthier, elle réunit tous les éléments qui font les spectacles solides: des voix dont le charme opère toujours, un humour bon enfant irrésistible et un répertoire de chansons qui donne le goût de ressortir nos vieux 33-tours pour les faire tourner en boucle.

D'autant plus que Charlebois et les quatre artistes ont eu la brillante idée de rendre hommage aux grandes chanteuses du Québec qui ont «porté sur leurs épaules et donné leurs lettres de noblesse» à la chanson d'ici. Jean-Guy Moreau nous avait avertis, ce coup de chapeau à Clémence DesRochers, Lucille Dumont, Germaine Dugas, Monique Leyrac, Louise Forestier, Isabelle Pierre, Pauline Julien et Renée Claude est l'un des moments les plus émouvants de la soirée, au même titre que Le plus beau voyage qu'un Gauthier aussi théâtral que passionné nous livre a cappella.

Musiciens efficaces

Jeudi, les quatre chanteurs et guitaristes étaient accompagnés de deux musiciens aussi discrets qu'efficaces, le guitariste-accordéoniste-violoniste Francis Covan et le contrebassiste Karl Surprenant, qui remplaçait Michel Donato. En lever de rideau, le jeune Jérôme Charlebois a très bien mis la table en interprétant avec un humour collégien quatre de ses chansons pour finir avec La boulée du paternel.

Le spectacle Il était une fois... la boîte à chansons affiche complet jusqu'au 2 mai au Studio Juste pour rire ainsi qu'au Théâtre du Petit Champlain de Québec. Au moment de mettre sous presse, il restait toutefois des billets pour le spectacle du 30 avril au Studio Juste pour rire, dont les recettes seront versées à Claude Léveillée. Deux supplémentaires sont annoncées, à La Tulipe, les 11 et 12 mai, et on nous dit que ce spectacle sera présenté dans une trentaine de villes du Québec par la suite. Pour plus d'info, consultez le site www.laboiteachansons.ca.