Le plus que centenaire LMMC ouvrait sa 119e saison hier après-midi devant une salle comble à Pollack: 600 personnes, ce qui est énorme pour la musique de chambre, où que ce soit dans le monde.

Ce succès d'assistance est d'autant plus étonnant que le Quatuor Takács, affiché hier pour la septième fois au Club, avait préparé un programme très sévère.

Formé à Budapest en 1975 par quatre musiciens hongrois, le Takács est maintenant «quatuor en résidence» à l'Université du Colorado. Deux musiciens de la formation originale sont encore au poste (le second-violon Schranz et le violoncelle Fejer); l'actuel premier-violon Dusinberre a remplacé le fondateur en 1993 et l'alto est passé à une dame, Geraldine Walther, il y a cinq ans.

Le quasi inévitable Haydn d'entrée était puisé parmi les quatuors les moins connus et les moins originaux du compositeur : l'op. 71 no 3. L'oeuvre a cependant le mérite de mettre en lumière toutes les qualités du Takács comme tel et des musiciens qui le composent. On admire ainsi, en plus de la précision absolue des archets, ce sens du renouvellement qui transforme en petite découverte ce qui, en d'autres mains, serait simple routine.

Des 15 Quatuors de Chostakovitch, le groupe avait choisi le deuxième. C'est l'un des moins joués des 15, l'un des moins captivants aussi. Le choix était quand même valable, surtout que le premier-violon donna une forte dimension dramatique au long et étrange récitatif qui lui est confié. On s'étonne simplement que le Takács omette l'importante reprise au premier mouvement.

L'après-entracte découvrit un ensemble un peu moins en forme que précédemment: intonation douteuse du premier-violon au premier mouvement, concentration à la baisse dans le très long Adagio à variations, qui exige au contraire une attention de tous les instants. Un raté, finalement, ce Beethoven.

Dès après le dernier accord, 35 minutes plus tard, on vit une bonne partie du public se hâter vers les sorties. Il était clair que ces gens ne voulaient pas entendre de rappel, comme il était clair que les musiciens ne voulaient pas en donner. Et ils n'en donnèrent justement pas.

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QUATUOR À CORDES TAKÁCS- Edward Dusinberre et Karoly Schranz (violons), Geraldine Walther (alto) et Andras Fejer (violoncelle). Hier après-midi, Pollack Hall de l'Université McGill. Présentation: Ladies' Morning Musical Club. Programme : Quatuor no 71, en mi bémol majeur, op. 71 no 3 (Hob. III : 71) (1792) - Haydn Quatuor no 2, en la majeur, op. 68 (1944) - Chostakovitch Quatuor no 12, en mi bémol majeur, op. 127 (1823-25) - Beethoven.