La pochette est noire comme l'infini, le deuil est imminent. Nick Cave a perdu un fils l'an dernier, on ne peut imaginer pire tragédie pour un parent. Contre toute attente, l'artiste a rassemblé les miettes de son être pulvérisé, des forces insoupçonnées ont été réunies alors que le chantier de l'enregistrement était déjà très avancé: peine immense, immense catharsis, album immense.

Dès la première mesure, un grondement annonce le pire, des borborygmes résonnent des entrailles de l'univers. Au fond du malheur, on s'élève lentement, les yeux dans l'eau, on frémit sans prétendre accéder à quelque compréhension. Et, soudain, on s'envole dans la pénombre.

Mélodies, choeurs, orchestrations, sons du corps, sons de synthèse, sons classiques, incantations laïques nous mènent à accepter la malédiction.

Les thèmes sont pour la plupart en périphérie de la perte, de la mort, des croyances trahies, de l'au-dessous et de l'au-delà, l'agnosticisme y fréquente le sacré, la quête de sens s'avère inutile.

Nick Cave choisit de s'imprégner des ténèbres, en ressort une grande beauté qu'il n'aurait jamais osé lui-même imaginer.

* * * * 1/2

CHANSON CONTEMPORAINE. Skeleton Tree. Nick Cave & the Bad Seeds. Bad Seed Ltd.