Le continuum de Jean-Louis Murat est rehaussé d'une nouvelle station: Morituri est un opus gonflé d'airs du temps, sombres et pluvieux comme la conjoncture française, néanmoins sensuels et délicats.

Fine lame de la parole chansonnière, JLM y cisèle des fables sur l'impuissance humaine généralisée, l'incapacité chronique des sociétés à passer à un prochain niveau d'élévation, les refuges provisoires dans ce qui nous reste de nature et de campagne.

Même là-bas, on finit par s'y «baigner nu dans l'eau noire des regrets», par attendre «le prochain Sarajevo pour chialer dans la cuisine».

Comme le titre latin de l'album le suggère, des faits divers exposent la mort d'un boucher pendu derrière la mairie ou d'un paysan noyé dans le purin qu'il devait épandre... Rien ne va plus dans ce monde dépeint par l'auteur, s'y confondent pessimisme et lucidité.

Allongées sur des tempos lents ou moyens, les musiques bluesy jazzy folky lounge aménagent ici un nouveau pan de cette facture europamericana dont seul JLM a le secret.

Non, ce n'est pas exactement un remontant, cette mixture n'en demeure pas moins un puissant shooter de conscience et de poésie signifiante.

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CHANSON. Morituri. Jean-Louis Murat. PIAS.