Lost a lancé son deuxième album, Héritage, à la fin avril. Il le présente à l’occasion de son premier spectacle solo aux Francos, ce vendredi. Loud, Souldia et des membres de 5sang14 sont parmi les invités qui rejoindront le rappeur montréalais sur scène. La Presse lui a parlé juste avant sa répétition.

Le début

Avant d’être Lost, Jayson Elombo était JBZ. Il a enregistré ses premiers morceaux à la fin des années 2000, puis a formé le collectif 5sang14 avec White-B, MB, Random et Capitaine Gaza, il y a un peu plus de 10 ans. À l’époque, le groupe met en ligne des mixtapes et des vidéos « qui font un très modeste bruit dans le quartier ». « C’est vraiment en 2015, avec le rebranding, que tout a changé, indique Lost. Je suis arrivé avec un nouveau nom et même un nouveau style vestimentaire, un peu mystérieux. Dans le clip du premier extrait, 3-0 (Passe la mallette), j’avais un genre de chapeau de pêche baissé aux yeux. Les gens n’ont pas directement fait de lien entre les deux [JBZ et Lost], mais ç’a beaucoup mieux marché. Le texte était mieux travaillé, l’instru et la vidéo aussi. On arrivait avec une nouvelle sauce. »

Le changement d’identité artistique de Jayson Elombo a coïncidé avec sa sortie de prison. « Quand j’étais incarcéré, j’étais dans une grande réflexion sur les choix que j’ai faits à cette époque. Je sentais que j’étais un peu perdu dans ma vie, dans mes décisions, se remémore Lost. Je me suis dit que si j’[avais] la chance de sortir, j’[allais] me concentrer beaucoup plus sur la musique et j’[allais] laisser toutes les autres distractions derrière. Je me suis renommé Lost pour ne pas oublier ce que j’ai traversé. »

L’ascension

Les conditions de libération du MC de Cartierville étaient cependant très strictes et l’empêchaient de donner des spectacles ou de collaborer avec 5sang14, qui était considéré comme un gang de rue. Malgré tout, Lost a « enchaîné, au rythme d’à peu près un track par mois ». « C’était le début de l’ascension, on pourrait dire. » Un second séjour à l’ombre, en 2017, a toutefois ralenti le rythme de Lost. Son équipe et son groupe avaient cependant prévu le coup et ont pallié l’absence de l’un des leurs en diffusant des pièces enregistrées précédemment. Le 23 juin 2018, dans un Club Soda plein à craquer, Lost est venu rejoindre ses amis de 5sang14 sur scène, ce qui a provoqué une explosion de joie dans la foule.

Avec sa liberté entièrement retrouvée, Lost a fait paraître le dernier chapitre de la trilogie de mixtapes Bonhomme pendu. L’une de ses chansons, Iceberg, lancée sans vidéo, « a explosé ». « Ce fut un grand tournant dans ma carrière, parce que c’était un autre son. J’ai gagné d’autres fans. Je suis allé toucher une autre tranche d’âge. Je commençais à voir des gens dans les concerts qui avaient l’âge de mes parents, souligne Lost. Au même moment, il y avait aussi la collaboration avec Souldia, MB, White-B et moi, Le bonheur des autres. Le combo des deux a provoqué un grand changement dans ma carrière solo. »

Lostalgik

Lost était donc prêt à proposer un véritable album. En dépit de la pandémie, il offre Lostalgik en décembre 2020. Des titres comme Ça va mal aller et Chicotter démontrent sa polyvalence en ce qui a trait aux thèmes et aux rythmes, mais son authenticité et sa poésie crue demeurent au cœur de l’œuvre. Environ six mois plus tard, Lost ajoute 10 pièces sur la version 2luxe.

« J’ai fait Lostalgik en deux parties. Pour la première, tous les tracks ont été enregistrés dans une période de trois à six mois. La 2luxe a été faite en un mois, précise le rappeur. C’est l’album qui, selon les statistiques, a le plus marché. Il y a des chansons qui sont sorties du lot, mais Lostalgik, c’est la majorité de l’album qui a été écoutée, streamée. » Lorsque nous lui demandons s’il y a tout de même une chanson qu’il affectionne particulièrement, il répond : « Dollars canadiens. » Nous sommes d’accord.

Héritage

« Pour moi, Héritage, en ce moment, c’est mon état d’esprit. J’ai trois enfants, alors c’est une chose à laquelle un parent pense, confie Lost. Le thème fonctionne aussi avec l’autre sens, celui du legs. Ce que je vais laisser en tant qu’artiste et en tant qu’être humain. C’est pour ça qu’il y a des chansons plus intimes dans lesquelles je parle de ma famille. C’est l’héritage culturel, spirituel et musical. »

Ce plus récent album est fouillé et abouti. Il est long aussi. Vingt-deux chansons pour plus d’une heure de musique. Lost le sait. On le lui rappelle souvent. « Je viens d’une époque des deux ou trois verses par track et le refrain entre chaque. Je voulais faire différemment de la tendance des dernières années. » Cela lui permet d’explorer encore plus de styles et de creuser plus profondément, de l’irrésistible Pont Champlain à la superbe F3mmes en passant par la mordante Parano et l’accrocheuse Bandook. « J’ai des morceaux, en termes de musicalité, qui sautent du coq à l’âne, mais ce sont les paroles qui connectent l’ensemble. Inconsciemment, j’écrivais sur un même thème. J’ai trouvé le titre à la fin en écoutant et en analysant chaque chanson. L’héritage, c’est ce que je défends présentement. »

Au MTelus, 21 h

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