Grande soirée, mardi, pour l’avant-dernier programme de la saison de l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM). Le chef Hannu Lintu a poussé l’ensemble à un niveau d’excellence rarement atteint.

Le Finlandais, l’un des meilleurs représentants de la foisonnante école de direction d’orchestre de ce pays nordique, avait fait ses débuts avec l’OSM l’automne précédant la pandémie. Il nous revient encore une fois avec un programme de musique du XXsiècle. Après Lutosłaski et Janáček en 2019, il a cette fois emporté Stravinski, Bartók et Prokofiev dans ses valises.

Ce qui frappe d’abord, c’est la communication naturelle qui se fait entre le grand blond et l’orchestre montréalais, qui le lui rend magnifiquement (il fallait voir les sourires des musiciens fendus jusqu’aux oreilles à la fin du concert). Sans absolument rien enlever à Rafael Payare, on avait plus que jamais l’impression d’avoir un véritable orchestre d’élite devant nous, mardi soir.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE

Concert de l’OSM sous la direction de Hannu Lintu mardi soir

Lintu possède aussi des dons de coloriste. Dans la Symphonie pour instruments à vent de Stravinski, qui ouvrait la soirée, il nous déroule une succession de microclimats tous plus contrastés les uns que les autres.

Il s’est davantage effacé pour l’œuvre suivante, le Concerto pour deux pianos et percussions, transcription faite par Bartók de sa propre Sonate pour deux pianos et percussions. Aux pianos – pincez-moi, je rêve –, rien de moins que Sergei Babayan et son ancien élève Daniil Trifonov, qui a au moins égalé le maître. Pour la non moins exigeante partie de percussions : le timbalier solo de l’OSM Andrei Malashenko et son collègue percussionniste Serge Desgagnés.

On peut aimer ou non cette œuvre plutôt disparate où les pianos sont traités comme d’authentiques percussions, mais la précision d’horloger des quatre solistes et d’Hannu Lintu, qui fait le lien entre tout ce monde et l’orchestre, rend le tout pas mal satisfaisant.

Le placement des pianos, les deux musiciens assis côte à côte, l’un regardant côté jardin, l’autre côté cour (contrairement à la disposition que le compositeur suggère, soit les deux pianistes tournant le dos au public), favorise en outre grandement la synchronisation.

En rappel, les deux pianistes ont donné la Barcarolle de la Suite pour deux pianos n1, opus 5, de Rachmaninov.

Le grand moment pour l’OSM était résolument les extraits du Roméo et Juliette de Prokofiev, en seconde partie. Il existe trois suites figurant au catalogue du compositeur. Plusieurs chefs concoctent leur propre « mixture » d’extraits de ce ballet de plus de deux heures.

Tout n’est pas extraordinairement intéressant et au moins deux ou trois morceaux auraient pu être retirés de la cinquantaine de minutes dirigée par Lintu. Ce dernier en donne toutefois une lecture impressionnante, si on excepte quelques passages qui auraient être plus emportés, comme « Juliette enfant », pas assez vivace.

Le début des « Montaigu et Capulet », avec son accord dissonant par accumulation de notes, était une vraie claque à la figure. La « Mort de Tybalt » était d’une intensité (en émotions et en décibels) presque insoutenable.

Le concert est repris ce mercredi à 19 h 30 et sera offert sur mezzo.tv dès le 3 juin.

Consultez le site de l’OSM