Les planètes sont alignées pour Daniel Bélanger. Son disque Mercure en mai n’a pas seulement été accueilli avec enthousiasme, sa tournée attire les foules. Imaginez : son concert de mardi au MTelus était le premier d’une série de trois – il y sera encore ce mercredi et jeudi. Deux supplémentaires sont déjà prévues aux Francos en juin à la salle Wilfrid-Pelletier, l’une des plus grandes à Montréal. Ce n’est pas tout : au terme de sa tournée lancée en avril, il se sera aussi produit pas moins de quatre soirs au Grand Théâtre de Québec.

Ne tournons pas autour du pot : ses milliers d’admirateurs devront être bien grincheux pour ne pas sortir de ce spectacle-là enchantés et l’âme plus légère, sinon carrément éblouis. Daniel Bélanger, formidablement entouré de Philippe Brault (basse), José Major (batterie), Jérôme Beaulieu (claviers) et Guillaume Doiron (guitares), a en effet offert un concert traversé par un groove absolument irrésistible.

On pouvait sentir dès les premiers moments du spectacle que le courant allait passer et que ça allait même faire de belles flammèches. Entré en scène au son d’Apertura, morceau qui ouvrait aussi son disque instrumental Travelling, il a amorcé en chanson avec Soleil levant, deuxième pièce de Mercure en mai. Et voilà que Daniel Bélanger jouait déjà avec la foule, levant les bras en l’air pour l’inciter à se manifester.

Chante encore, venue tout de suite après, a donné une idée de ce à quoi allait ressembler le reste du concert : Philippe Brault portait le groove, alors que les autres instruments, batterie comprise, peignaient les motifs du tapis volant sur lequel le chanteur s’élevait. Ce fut encore plus puissant sur Sortez-moi de moi, dont la signature rythmique a été reconnue par les plus fins connaisseurs dès les premiers coups donnés par José Major.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Daniel Bélanger au MTelus, mardi soir

L’une des qualités de Daniel Bélanger est de très bien s’entourer sur scène et de donner à ses musiciens l’espace pour s’exprimer. Il a de nouveau visé juste avec le tandem José Major–Philippe Brault à la section rythmique et avec Guillaume Doiron (souvent économe, toujours juste) et Jérôme Beaulieu (du groupe Misc) qui, tout au long du concert, ont été de magnifiques coloristes. Le claviériste a été particulièrement épatant. Parfois discret, parfois au premier plan, il était partout : rêveur ici, presque psychédélique là, puis funky, planant ou jazzy. Toujours imaginatif et éloquent.

Ces quatre musiciens faisaient corps derrière Daniel Bélanger. Il suffisait parfois de s’arrêter un instant au langage corporel du chanteur et de son groupe pour voir à quel point ces musiques riches qui nous rentraient dans les oreilles étaient incarnées, là, devant nos yeux : ils dodelinaient tous gravement de la tête, se déhanchaient presque, en parfaite symbiose.

Et Daniel Bélanger ? Il a été aussi bon, aussi décalé et aussi fin que d’habitude. Avec sa voix qui vibre comme aucune autre et sur laquelle le temps ne semble avoir aucune prise.

On l’a vu rebrasser ses chansons de toutes sortes de manières au fil des ans. Même à la sauce rockabilly, au temps de Chic de ville. Il possède un goût sûr et ça le sert encore bien.

Cette tournée-ci, il avait clairement envie de décoller. Peut-être parce que la réalité est parfois trop lourde. Le répertoire qu’il a choisi allait dans ce sens : en plus de cinq chansons de Mercure en mai (dont Il faut s’accorder, Dormir dans l’auto et Au vent des idées), il a beaucoup puisé dans Rêver mieux (Chante encore, Te quitter, Intouchable et immortel, Dans un spoutnik, Fous n’importe où et Rêver mieux), et entre autres ressorti les magnifiques Respirer dans l’eau et Les temps fous de Quatre saisons dans le désordre.

Il y avait dans ce concert une superbe cohérence. La foule a abondamment participé, ne se faisant pas prier pour faire les chœurs, au grand bonheur de Daniel Bélanger, visiblement ravi de se retrouver devant une salle aussi enthousiaste. On s’en voudrait de ne pas souligner l’effort mis sur l’habillage visuel du spectacle, inventif et souvent hyper coloré, qui misait notamment sur de gros câbles lumineux assez surprenants. Ces effets de mise en scène ont rehaussé le côté gentiment « psychédélique » du concert qui a surtout fait l’effet d’une bonne dose de bonheur.

Daniel Bélanger se produira de nouveau ce mercredi et jeudi au MTelus, à guichets fermés. Puis les 16 et 17 juin à la salle Wilfrid-Pelletier.