Jonathan Personne — né Jonathan Robert, membre du groupe Corridor — lance un troisième album solo. Avec des chansons qui abordent les thèmes de la nostalgie, du burn-out et de notre indignation éphémère.

Sur son deuxième album, il disait à la blague être passé du lo-fi au mid-fi. Jonathan Personne n’est quand même pas en mode hi-fi avec ses huit nouvelles chansons, mais il s’est permis — entre autres — des arrangements pop orchestrale plus léchés, et même kitsch.

Le son brumeux, l’âme rock et le côté sombre de Jonathan Personne demeurent, mais l’artiste s’en est donné à cœur joie avec le réalisateur Emmanuel Éthier en studio. La voix est même au premier plan sur Un homme sans visage, souligne-t-il. « C’est carrément de la chanson, lance-t-il. Je me suis agréablement surpris. »

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Sur son album Disparitions, sorti il y a deux ans, celui qui est aussi membre du groupe Corridor tenait à avoir un fil narratif tout au long de l’album. Ce n’était pas le cas cette fois-ci. « Je voulais créer des chansons aux histoires isolées qui s’écoutent mieux hors contexte. »

Comme l’a dit son pote réalisateur Emmanuel Éthier, il s’agit de l’album greatest hits de Jonathan Personne.

Ses huit chansons ont été écrites dans un contexte plus heureux que celles de Disparitions, qui suivait un rythme de tournée effréné… « Je peux le dire maintenant, mais j’ai fait un burn-out », relate-t-il.

La pression était grande avec son groupe Corridor, qui a lancé en 2019 l’album Junior à l’international avec rien de moins que l’étiquette mythique de Sub Pop Records.

Deux chansons de son album homonyme font référence à sa période sombre, soit Golden Rush, qui met en scène un prospecteur qui finira par creuser sa tombe sans trouver ce qu’il recherche. « C’est l’idée de se tuer à l’ouvrage », expose Jonathan Personne.

Quant à Goudrons et plumes, elle illustre comment ce qu’on aime peut finir par nous faire du tort en citant l’exemple d’un joueur compulsif.

« À la fois pathétique et beau »

Son extrait sorti au printemps, Rock & roll sur ton chemin (qui rappelle Sultans of Swing, de Dire Straits !), témoigne de ce qu’il vient de nous confier. « C’est la chanson glam de l’album. Avec quelqu’un qui reste accroché à une période révolue. C’est à la fois pathétique et beau », explique l’artiste.

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Jonathan Personne entretient une relation amour-haine avec sa propension à être mélancolique et nostalgique. « Je combats ça… Je ne veux pas vivre dans le passé. »

Sa chanson Le fou dans l’arbre — hommage bien senti à Neil Young — fait référence à notre indignation à la fois rapide et éphémère. « Le désintérêt rapide de l’ère actuelle. Comme un village qui se regroupe autour d’un fou dans l’arbre. Une fois que le lynchage est fait, on passe rapidement à autre chose. »

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Chez Jonathan Personne, le glauque côtoie l’espérance de temps meilleurs. On reconnaît la touche de l’illustrateur (on lui doit notamment la pochette du plus récent album de Lisa LeBlanc) par l’usage d’images fortes.

Nouvelle source de lumière dans sa vie : sa fille d’un an et demi. Sa blonde était enceinte quand il a écrit les chansons de son nouvel album dans son chalet des Laurentides. La pochette, qu’il a illustrée, témoigne du contraste entre l’ambiance funeste de la pandémie et la candeur de l’enfance.

IMAGE FOURNIE

Pochette du troisième album de Jonathan Personne

Jonathan Personne était loin de se douter que ses compositions acoustiques « guitares et voix » allaient finir par avoir l’ampleur qu’elles ont prises en studio avec Emmanuel Éthier et ses musiciens Samuel Gougoux (batterie), Julian Perreault (guitare) et Mathieu Cloutier (basse).

La pièce d’ouverture, À présent, a son « Wall of Sound ». Ici, on entend le son d’un ampli en train de rendre l’âme. Là, on devine des sons de mellotron, de bongo et de lapsteel dans un heureux mélange improbable.

Chanteur malgré lui

« Je me sens extrêmement libre avec ce projet-là. Il prend de l’ampleur naturellement. C’est le meilleur des deux mondes », lance Jonathan Personne.

« C’est libérateur. En groupe, la dynamique peut être confrontante… Après trois albums, la pression créative est là. Il y a des prises de bec. C’est normal avec des têtes fortes qui travaillent ensemble. »

Celui qui est devenu « par défaut » cochanteur de Corridor avec Dominic Berthiaume — car aucun membre ne voulait assumer pleinement cette tâche — ne se considère pas aujourd’hui comme un lead singer extraverti, mais il assume son statut de parolier et de chanteur. Son chant haut perché et aérien nous rappelle par ailleurs celui de Jace Lasek des Besnard Lakes.

Jusqu’à présent, Jonathan Personne n’a donné que trois spectacles sous ce nom.

Six seront au programme sous peu, dont le lancement au Fairmount le 28 septembre dans le cadre de Pop Montréal. « Ça va faire un bon set ! », assure-t-il.

Un set de greatest hits.

Consultez la page Bandcamp de Jonathan Personne