Brassens, mort il y a 40 ans, aurait eu 100 ans cette année. Ce double anniversaire est souligné par le spectacle Les polissons de la chanson, auquel participent Michel Rivard, Luc De Larochellière, Ingrid St-Pierre, Saratoga et la comédienne Valérie Blais, dont la dernière représentation aura lieu aux Francos. Coup d’œil sur ce géant avec trois des artisans du spectacle.

Ingrid St-Pierre

Dans le spectacle Les polissons de la chanson, Ingrid St-Pierre interprète La non-demande en mariage, de Georges Brassens. C’est un beau hasard : il y a quelques années, elle y avait fait écho dans sa chanson Les épousailles, sa « non-demande en mariage » à elle. Brassens, alors, elle connaissait. Ou plutôt avait le sentiment de le connaître. « Je me suis rendu compte en faisant le show que je ne connaissais pas tant l’homme et son répertoire », avoue-t-elle.

Photo Hugo-Sébastien Aubert, archives LA PRESSE

Ingrid St-Pierre

Sous ses dehors inoffensifs, Brassens pouvait tenir des propos non seulement très critiques, mais aussi misogynes. Ce n’est toutefois pas ce qu’Ingrid St-Pierre retient de cette plongée dans son œuvre. Elle trouve que c’est le « moins pire » des géants de la chanson française de l’époque et qu’il était même un peu en avance sur son époque sur certains plans. « Brassens aimait les femmes, dit-elle. Il posait un regard beaucoup moins réducteur sur les femmes que Brel, par exemple. Ça m’a saisie et confortée. »

« On a aussi donné à des femmes des chansons qui ne pourraient peut-être plus être chantées par des hommes, poursuit-elle. Qu’une femme s’approprie ces textes-là et leur donne un tout autre sens. C’est ce qui est beau. »

Michel-Olivier Gasse

Avec son amoureuse Chantal Archambault, Michel-Olivier Gasse forme le duo Saratoga. « On est ceux qui ont l’approche la plus ludique, je dirais, quoique Valérie Blais ajoute une couche de jeu assez renversante à ses chansons, nuance-t-il. On est allés dans la légèreté. »

Photo Robert Skinner, archives La Presse

Chantal Archambault et Michel-Olivier Gasse (Saratoga)

Michel-Olivier Gasse n’était jamais allé très loin dans son exploration de cette collection de chansons truffées de sous-entendus et d’une rébellion pas toujours tranquille. Il s’est contenté d’une compilation de la collection Master série, alors que pour Ferré, il s’était offert le coffret. « Même si je me targuais de tripper sur Ferré, je suis revenu pas mal plus souvent vers Brassens », admet-il avec la même honnêteté qu’on retrouve aussi dans Histoires analogues, récent recueil où il fait partager son amour de la musique.

Des années plus tard, avec son bagage de musicien, il est impressionné tant par les qualités de mélodiste de Brassens que par l’apparente simplicité de ses chansons. « Il a la finesse de faire accroire qu’il n’y a rien de compliqué là-dedans, alors que tout est taillé au couteau, dit-il. Je ne suis pas sûr que les gens se rendent compte à quel point il étire et joue avec le temps. Je trouve ça magnifique. C’est un grand maître, vraiment, et il fait passer ça sous un air bonasse. »

Yves Desrosiers

« Ce n’est pas facile de chanter Brassens », dit d’emblée Yves Desrosiers. Lui, d’ailleurs, ne chante pas dans Les polissons de la chanson : il en signe plutôt les arrangements et dirige le trio qu’il forme avec François Lalonde (batterie) et Mario Légaré. Un petit groupe soudé, qui joue ensemble depuis 25 ans, c’est-à-dire depuis le premier album de Lhasa.

Photo Marco Campanozzi, archives LA PRESSE

Yves Desrosiers

« J’aime bien, quand on rend hommage à quelqu’un, garder ses manières de faire », dit Yves Desrosiers, qui a joué pas mal de chansons de Brassens avec Mononc’ Serge au sein des Quarts de rouge et des Blaireaux dans les années 1990. Brassens ne se cassait pas la tête avec la finale de ses chansons ? Il ne les a pas soignées sur ce plan. Brassens aimait la guitare manouche ? Ça tombe bien, lui aussi. « J’en ai profité pour me faire plaisir », avoue le guitariste. Ce qui ne l’a pas empêché d’emmener certaines chansons vers des sonorités plus « Tom Waits » ou même ska…

Se replonger dans l’œuvre de Brassens lui a surtout permis de mieux connaître l’homme derrière les chansons, notamment à travers des interviews glanées sur YouTube. Yves Desrosiers note l’envie de « donner un coup de pied au cul » à la bonne morale, au prêt-à-penser et aux idéologues. On le devine tout sourire à l’autre bout du fil : « Je me suis rendu compte qu’on se ressemblait beaucoup. »

Les polissons de la chanson, le samedi 18 juin, au Théâtre Maisonneuve