L’actuelle saison de l’Orchestre Métropolitain (OM) n’est pas comme les autres : l’ensemble souligne cette année ses 40 ans d’existence. Il raconte son histoire dans un webdocumentaire réalisé par Jean-Nicolas Orhon, offert gratuitement depuis samedi sur son site internet.

Ce n’est pas le projet le plus ambitieux de l’orchestre dirigé par Yannick Nézet-Séguin : le documentaire 40 ans de l’OM : une histoire d’amour avec la musique fait à peine 30 minutes, n’offre pas des tonnes d’images d’archives éloquentes et montre surtout des têtes parlantes. Il possède par contre la grande qualité de donner abondamment la parole aux artisans de la première heure : Jean Paquin, René Gosselin et Denise Lupien, entre autres.

« Le monde musical à Montréal s’était vraiment centré autour de l’OSM [Orchestre symphonique de Montréal], et penser à faire un autre orchestre, imaginez, c’était presque mission impossible », raconte la violoniste, qui a quitté l’OM en 2008 après 27 ans à titre de violon solo.

L’OM, qui jouit aujourd’hui d’une réputation enviable sur la scène internationale, a débuté très modestement sous le nom L’orchestre des concerts populaires de Lachine ou L’orchestre des concerts Lachine, tous ne l’appellent pas de la même façon. Quelques mois plus tard, à l’été 1982, l’ensemble s’appelait déjà l’Orchestre métropolitain.

Ce qui le distingue ? Sa volonté de mettre en valeur les musiciens québécois. « Le but, c’était de créer de l’emploi pour les jeunes musiciens qui sortaient des universités et des conservatoires », résume Jean Paquin.

Dans un écosystème où le seul débouché potentiel était l’OSM, qui recrutait aussi à l’international, ce deuxième ensemble était plus que nécessaire, estiment les musiciens.

L’ensemble, que le féroce critique de La Presse Claude Gingras a, semble-t-il, déjà appelé l’« OSM des pauvres », avait aussi une autre mission : celle de diffuser le répertoire classique auprès du plus grand nombre. D’où cette volonté de ne pas se cantonner à la Place des Arts, mais de jouer aussi dans différents quartiers ou municipalités de l’île de Montréal, de Pointe-Claire à Anjou.

Le court film relate les grandes difficultés financières qu’a connues l’OM et la solidarité des musiciens (ils ont même accepté de ne pas recevoir de salaire pendant un an pour consolider l’ensemble). Ces difficultés ont tissé des liens forts parmi les membres de l’orchestre, qui font partie intégrante de sa personnalité, jugent plusieurs d’entre eux.

Il est question du passage d’Agnès Grossmann à la tête de l’OM, mais surtout, bien sûr, de l’ère Yannick Nézet-Séguin, qui dure depuis l’an 2000 et durera toujours puisqu’il a été nommé chef « à vie ». « Ç’a été la révélation », dit Jean Paquin, évoquant une histoire d’amour « exceptionnelle » entre le chef et l’ensemble. « Quand Yannick est arrivé dans le décor, tout a changé », dit aussi Marc Denis.

L’empreinte du jeune chef sur l’OM occupe une bonne place dans le film. Or, ce n’est pas tant pour le magnifier lui que pour montrer combien son attitude collait avec les valeurs déjà en place dans cet ensemble.

Et ce qui ressort justement du webdocumentaire, c’est que l’OM, ce n’est justement pas l’affaire d’une seule personne, aussi talentueuse soit-elle.

Un long passage est consacré à l’incidence de la pandémie sur l’orchestre, mais moins pour s’attarder aux multiples coups durs qu’à l’occasion qu’elle a représentée aux yeux de Yannick Nézet-Séguin, qui s’est tout de suite mis en mode solution. Il était déterminé à ce que l’OM demeure présent, malgré la distance imposée. Il était convaincu que ceux qui allaient passer au travers étaient les organisations culturelles qui sauraient garder contact avec leur public.

« De chaque crise, on apprend des forces insoupçonnées », affirme le chef. L’OM a notamment multiplié les enregistrements de concerts, où le chef était parfois positionné au centre des musiciens. Yannick Nézet-Séguin est convaincu que l’ensemble en sortira grandi, encore plus proche des gens.

Regardez le documentaire