En octobre dernier, le groupe montréalais a rempli le légendaire amphithéâtre de Red Rocks, au Colorado. Il se produira en février dans deux des plus importants festivals de musique électronique du monde : Ultra Music à Miami et Electric Daisy Carnival à Mexico. Même en temps de pandémie, Black Tiger Sex Machine continue de tirer admirablement bien son épingle du jeu en marge des circuits traditionnels de la scène québécoise. La Presse lui a parlé au moment où sort son troisième album, Once Upon a Time in Cyberworld.

Difficile de croire que le 17 octobre dernier, Black Tiger Sex Machine (BTSM) donnait un spectacle devant près de 10 000 personnes dans l’amphithéâtre naturel de Red Rocks, dans l’État du Colorado.

BTSM est l’un des rares groupes québécois qui se sont produits à guichets fermés en tête d’affiche sur la mythique scène extérieure où sont montés The Beatles et Bob Dylan. Arcade Fire y a donné un spectacle en 2007 avant LCD Soundsystem. Et avant eux, Céline Dion en 1996.

« C’est fou », lance Julien Maranda. « C’était surréel avec la pandémie de se retrouver au milieu de rochers devant notre public », renchérit Marc-André Chagnon.

Depuis une dizaine d’années, Black Tiger Sex Machine remplit des salles partout dans le monde tout en demeurant dans l’ombre au Québec.

BTSM porte bien son nom. C’est une machine qui alimente une communauté de fans fervents, fidèles et dévoués. Le trio compte 264 000 abonnés sur Facebook. Ses chansons accumulent des millions d’écoutes sur Spotify.

Lisez un texte de La Presse sur BTSM publié en 2018

Patrick Barry, Julien Maranda et Marc-André Chagnon – qui portent un casque de tigre sur scène – devaient avoir leur moment de gloire à Montréal en tête d’affiche d’Igloofest – avec leur pote Apashe – le 15 janvier dernier, mais le festival a été annulé et leur prestation, remise à l’an prochain. Heureusement, le marché américain est le plus important de BTSM et le groupe a pu y donner plusieurs spectacles au cours des derniers mois.

PHOTO FOURNIE PAR KANNIBALEN RECORDS

Patrick Barry, Julien Maranda et Marc-André Chagnon portent un casque de tigre futuriste sur scène.

Malgré la pandémie, BTSM continue de faire les choses en grand. Pour sa prochaine vidéo, le deuxième chapitre de ce que le groupe appelle son Movie Experience – qui a super bien fonctionné en spectacle –, il a loué rien de moins que le Village québécois d’Antan de Drummondville. Le tournage aura lieu dans quelques jours.

« Ce sera un mélange de spaghetti western et de [références] au monde cyberpunk », annonce Julien Maranda.

Regardez le Movie Experience de BTSM au spectacle de Red Rocks

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Marc-André Chagnon, Julien Maranda et Patrick Barry

Un troisième album

Tout cet univers va évidemment de pair avec le troisième album de BTSM, Once Upon a Time in Cyberworld, qui est en continuité thématique avec ses prédécesseurs, Welcome to Our Church et New Worlds.

La musique électro lourde de BTSM (drum and bass) est très certainement faite pour danser ou se gonfler à bloc avec des montées mélodiques vertigineuses.

Elle pourrait être qualifiée de niche par certains, mais il y a des pièces du nouvel album qui font un pont habile avec la pop, dont Wild Kids, déjà écoutée plus de 600 000 fois sur Spotify, sur laquelle figure le chanteur anglais Youngr.

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Alors que les deux premiers albums de BTSM avaient été pensés et créés pour la scène, les nouvelles chansons de ce troisième opus peuvent être savourées pleinement en dehors des spectacles. « Il y a plus d’accent sur le vocal avec plusieurs collaborateurs, explique Julien Maranda. Je pense que l’album va nous amener ailleurs. »

Black Tiger Sex Machine ne perd pas le fil narratif de son univers pour autant. Si on considère l’œuvre de BTSM comme « la bande sonore d’un film de science-fiction », explique Patrick Barry, Once Upon a Time in Cyberworld représente l’espoir dans un monde postapocalyptique.

Il y a toujours une ambiance obscure et chargée, mais sur certaines chansons, la cadence ralentit sur des rythmes rap et même reggae sur Leaders (collaboration avec le chanteur sicilien Alborosie). Il faut rappeler que les trois potes de BTSM ont d’abord organisé des soirées de house et de dancehall avant de fonder leur groupe. « Le reggae est une influence du dubstep », souligne Patrick Barry.

BTSM a par ailleurs eu la chance de pouvoir échantillonner un extrait de la pièce Take a Ride d’Al Campbell, enregistrée en 1968 dans le mythique Studio One de Kingston en Jamaïque.

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Parmi les autres collaborateurs, citons le rappeur texan Hyro the Hero, le rappeur anglais Dread MC, ainsi que les rappeurs montréalais Wasiu et YMIR.

C’est sur TikTok que Julien Maranda a trouvé le chanteur de Buffalo Ryan Perdz (qui reprend des chansons de Korn et de Kurt Cobain). Ce dernier a prêté sa voix granuleuse à la pièce Sleepwalker et le résultat donne envie de se défouler le poing en l’air.

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Kannibalen Records

Patrick Barry, Julien Maranda et Marc-André Chagnon sont des musiciens, mais aussi des entrepreneurs. Les trois amis qui se sont connus au collège Brébeuf ont fondé Kannibalen Records, une maison de disques indépendante qui a beaucoup de succès et qui évolue en marge du modèle traditionnel de l’industrie du disque au Québec. Outre BTSM, Kannibalen a fait connaître les Apashe, Kai Wachi et Dabin.

L’équipe de Kannibalen Records a une source importante de revenus liés à ce qu’on appelle l’édition ou « la musique à l’image ». Récemment, il y a eu les jeux vidéo Pistol Whip et Call of Duty. « Il y a aussi des équipes de sport qui prennent nos chansons pour entrer dans le stade », signale Patrick Barry.

Au début de la pandémie, BTSM a dû interrompre la tournée la plus ambitieuse de sa carrière. « Malgré tout, nous sommes chanceux, car nous sommes déjà établis aux États-Unis et le marché américain est ouvert », expose Julien Maranda.

« Mais c’est bizarre de penser que cela va faire trois ans que nous n’avons pas joué au Québec », lance Patrick Barry.

Ce n’est que partie remise. Et gageons que ce sera épique !