Avec sa pop libre empreinte d’une « douceur étrange », Laurence-Anne est l’une des artistes les plus intéressantes de sa génération. Elle lance ce printemps Musivision, un deuxième album doux et libre.

Laurence-Anne a fait partie de la très solide cohorte de finalistes des Francouvertes en 2016, avec Les Louanges et Lydia Képinski. Et elle s’est acquis depuis Première apparition, son premier album lancé début 2019, un public fidèle qui aime voyager à l’intérieur de la musique.

« La partie du cerveau que je vise, c’est ce non-lieu où tu vas quand tu es dans la lune », explique Laurence-Anne, qu’on a rencontrée dans un parc de Montréal il y a une dizaine de jours. « Tu écoutes ma musique et tu peux imaginer un peu où cette ambiance t’emmène. C’est une écoute vraiment plus imaginative que passive. »

L’artiste de 26 ans est d’ailleurs une fan de Twin Peaks, et la pochette de l’album, à l’inspiration surréaliste, est une référence à la série culte de David Lynch.

« C’est la pièce où ils se retrouvent, avec le plancher en damier et les rideaux en velours rouge. Tu ne sais pas s’ils sont dans l’espace ou sur terre. C’est un lieu imaginaire qui s’ouvre à toi… si tu es prêt. »

C’est exactement là que sa musique se situe, et l’autrice-compositrice-interprète assume sa part de mystère. « Je suis mystérieuse dans ma tête, je le sais ! », dit en rigolant Laurence-Anne, pour qui le travail de Klô Pelgag est une grande inspiration.

« Je la suis depuis son premier album. On ne fait pas la même chose, mais son univers est inspirant, très créatif. Elle a ouvert la porte pour une pop un peu plus de gauche au Québec, et pour les femmes aussi. »

Signature

Musivision est un album un peu romantique, un peu sombre, parfois pop et complètement indépendant, mais aussi moins exploratoire que Première apparition, plus groovy aussi.

Douceur étrange, c’est comme ça que je décrirais mon univers en deux mots.

Laurence-Anne, autrice-compositrice-interprète

Elle chante ici dans un registre tellement aigu que l’entendre parler d’une voix normale est presque surprenant.

« C’est arrivé comme ça, je ne sais pas pourquoi ! J’ai composé des lignes dans d’autres tonalités et qui m’ont fait développer des sonorités différentes. »

Le résultat lui donne une signature très claire, en tout cas, admet la chanteuse autodidacte qui joue de la guitare et du clavier, mais aussi un peu de basse et des percussions.

La manière de Laurence-Anne peut paraître légèrement nonchalante. C’est même pour cette raison qu’elle s’est bien entendue avec le coréalisateur de l’album, Félix Petit (Les Louanges), dit-elle.

« Il est laid-back comme moi, assez relax, on se comprenait bien. » Mais si elle s’est adjoint un coréalisateur, c’est qu’elle voulait un regard extérieur, mais aussi parce qu’elle aime avoir « un peu le contrôle ».

C’est que Laurence-Anne sait ce qu’elle cherche. Par exemple, les arrangements se font en collégialité en studio, mais à partir des maquettes qu’elle a montées après avoir passé une semaine de création seule en Gaspésie. « L’univers et les ambiances sont là, et c’est facile de créer à partir de ça. Ça fait cinq ans qu’on joue ensemble, ils [les musiciens] savent où je veux aller. »

Exploration

Laurence-Anne sait ce qu’elle veut, mais surtout, elle a une tonne d’idées. Avec deux albums et un mini en cinq ans, elle a déjà beaucoup exploré, et ce n’est pas fini.

C’est ce qui est le fun dans la création, aller à l’extérieur de ce que tu connais déjà. C’est ce qui me garde captivée : la liberté de créer sans limites.

Laurence-Anne, autrice-compositrice-interprète

Ce qui donne aussi des écarts de sons et de styles entre ses différents projets… et même à l’intérieur du même album. Dans Musivision, il y a une chanson en anglais, une en espagnol, des pièces instrumentales angoissantes, du disco, de la new-wave.

« C’est vrai qu’on peut avoir l’impression que je saute du coq à l’âne. Et je l’assume à 100 %. Mais je pense que les gens aiment que ce ne soit pas une longue chanson de 45 minutes. C’est le fun quand il y a différentes teintes. »

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Elle aime d’ailleurs les contrastes entre le propos et la musique, et ses textes, souvent issus de rêves ou de « bulles qui passent », ressemblent plus à des poèmes. Chaque morceau est comme un tableau pour Laurence-Anne.

« Je mets des couleurs sur une toile. Après, je pars sur une autre toile et je lance du rouge. Puis sur une autre, à base de bleu. C’est aléatoire, les choses s’empilent d’une manière instinctive : tu commences avec une ligne qui en inspire une autre, puis une autre… »

Laurence-Anne espère « aller plus loin » avec Musivision, se voit dans cinq ans lancer son quatrième ou cinquième album, aimerait faire des plateaux doubles avec des artistes qui l’inspirent.

« Oui, j’ai de l’ambition, mais sans trop de prétention. » L’idée est peut-être de toujours avancer ? « Oui. Créer selon mon mood. Tout le temps. » Et là, le mood est-il bon ? « Oui. »

IMAGE FOURNIE PAR BONSOUND

Pochette de l’album Musivision, de Laurence-Anne

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