On sait depuis le début que Dom La Nena est un esprit curieux. Son envie d’explorer s’est affirmée depuis, entre autres à travers le duo qu’elle forme avec Rosemary Standley, de Moriarty. Sur Tempo, la Brésilienne au violoncelle glisse pour la première fois des morceaux instrumentaux parmi ses chansons douces.

Il n’y a rien de surprenant au fait qu’une musicienne affirme écouter toutes sortes de musique. C’est le contraire qui serait étonnant. Dom La Nena n’a pas besoin de le dire, ça s’entend. Seule, elle a réinventé The National et Lhasa. Avec Rosemary Standley, elle a repris Cohen, Pink Floyd et Tom Waits, mais aussi du folklore breton et un très ancien chant catalan.

Sa curiosité s’entend aussi dans sa façon d’approcher son instrument de prédilection, le violoncelle, qu’elle caresse, pince et tapote à l’envi, sans l’impétuosité d’une Jorane, mais avec le même souci d’en tirer quelque chose de différent. En particulier sur Tempo, son plus récent disque, enregistré en huis clos avec un ingénieur du son au Portugal.

« J’avais besoin de redécouvrir mon instrument autrement et de voir comment je pouvais le pousser, de me laisser surprendre », explique la Parisienne d’adoption. Elle décrit les séances d’enregistrement de Tempo comme un « laboratoire de son » destiné à la faire sortir de sa zone de confort.

Ça ne donne pas lieu à une révolution de son univers musical même si, dans le détail, on sent l’attention portée aux textures, au grain du son, l’envie d’envisager son violoncelle comme un instrument de percussion et de le marier avec des éléments numériques. Et ça lui permet d’offrir, une fois de plus, une collection de chansons fines, aux atmosphères soignées, qui témoignent d’une âme sensible.

Une bulle d’instinct

Tempo, comme son titre le laisse entendre, est traversé par des réflexions sur le temps qui passe. La mélancolie flotte, mais c’est aussi un album empreint d’une certaine légèreté en ce sens qu’il n’est pas grave ou lourd. Il est question de courage, de faire face à l’inconnu, de la quête du bonheur, tout ça sur des musiques qui parfois tournoient et scintillent doucement.

Ce n’est pas la crise sanitaire actuelle qui a plongé la chanteuse et musicienne dans cet état d’esprit, mais un évènement heureux : l’arrivée de son premier enfant, une fille. « Ce n’était pas intentionnel », dit-elle, à propos des thèmes abordés sur l’album. Ce qui l’était, par contre, c’est de tout faire toute seule.

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« Mon projet solo, c’est plus instinctif. Je fais les choses de manière plus intuitive, ce qu’on ne peut pas vraiment faire quand on n’est pas seul. Même si la connexion est très forte, précise-t-elle, l’intuition [de l’un et de l’autre] ne sera pas forcément la même. »

Ceux qui l’ont vue sur scène le savent : Dom La Nena s’y produit aussi seule. « Par choix », assure-t-elle encore.

Ça me donne une très grande liberté dans tous les sens du terme : si j’ai envie de changer la structure d’un morceau, je la change, si je veux en zapper un ou les faire dans un ordre différent, je le fais, et la relation avec le public ne tient qu’à moi. Ce risque et cette responsabilité me plaisent.

Dom La Nena

Il se dégage de Tempo la même confiance, bien que la voix de Dom La Nena garde toujours quelque chose de fragile (No Tengas Miedo). De rêveur aussi sur des morceaux comme Todo Tiene Su Fin et, justement, Doux de rêver. Et pour la toute première fois, la musicienne née au Brésil ose des morceaux sans paroles, dont une Valsa tristounette.

« Le fait d’être toute seule m’a vraiment désinhibée », explique la musicienne. Elle prend plaisir à explorer ce nouvel espace qui s’ouvre à elle et assume à l’avance ses limites. « J’ai fait le choix de l’imperfection. Si j’ai une guitare à faire sur un morceau, je préfère la faire moi-même, même si je n’en joue pas extraordinairement bien, plutôt que de demander à un super guitariste. Je trouve que ça me ressemblera plus, expose-t-elle. Une propreté excessive, ce n’est pas vivant. Je préfère les accidents et les erreurs. »

PHOTO FOURNIE PAR LA COMPAGNIE DE DISQUE

Tempo

Dom La Nena
Tempo
Six Degrees Records
En vente le 26 février