François Bourassa a publié récemment un premier album solo intitulé L’impact du silence où le jazz marche main dans la main avec la musique contemporaine. Le pianiste en fera la matière d’un concert présenté en octobre à la Place des Arts, mais seulement après avoir joué avec son quartet, dont c’est le 25e anniversaire, dans le cadre du Festival international de jazz de Montréal.

Que François Bourassa enregistre un premier album solo après 35 ans de musique n’est pas une surprise : le pianiste en parle depuis quatre ou cinq ans. Il dit aujourd’hui que c’est « un peu par obligation » qu’il est passé à l’acte. Pas parce qu’il avait annoncé ses couleurs, mais parce que, selon lui, il s’agit d’un passage obligé.

« Tous les grands pianistes que j’admire ont fait un album solo, ou même plusieurs. Alors je me suis dit qu’il fallait que je le fasse, explique-t-il. C’est aussi un défi personnel. J’aime jouer en groupe, la complicité avec les autres musiciens, c’est ce que je préfère. L’album solo m’a par contre permis d’aller vers un univers plus personnel, plus introspectif. »

L’impact du silence a été enregistré au printemps 2020 au studio La Buissonne, près d’Avignon, en France. François Bourassa avait tendu une première perche dès le mois de janvier de cette année-là, avant que la pandémie frappe. « Après, les concerts étaient annulés et on ne pouvait plus répéter en groupe, rappelle-t-il. Alors, je me suis concentré sur mon approche personnelle du piano. »

0:00
 
0:00
 

L’album mêle improvisations libres et compositions « très écrites ». Surtout, il mélange les langages : jazz moderne et musique contemporaine, pour l’essentiel, dans des morceaux qui se déploient comme des respirations et qui, s’ils versent dans l’abstraction ou la dissonance, ne perdent jamais de vue ni l’émotion ni l’auditeur.

« Que je passe par une approche plus cérébrale ou plus spontanée, ce qui me guide, c’est l’émotion. L’envie de toucher, de raconter quelque chose avec la musique. Si on pense au compositeur Webern, c’est très cérébral, mais pour moi, il y a une émotion très forte qui passe. »

Album synthèse

François Bourassa le dit clairement : il ne veut pas perdre le jazz, la spontanéité et l’improvisation. Écrire des morceaux de A à Z lui permet de pousser sa musique plus loin. « Le fait d’organiser des structures, de prévoir, permet peut-être d’aller plus loin sur le plan de la recherche harmonique, expose-t-il. En improvisation, il y a des choses magiques qui se passent, mais pas toujours. En composition, je peux décider ce que je veux. »

Ce qu’il a voulu pour L’impact du silence, c’est faire une synthèse de sa vision du jazz moderne, de la musique classique et de l’improvisation. Tout en gardant le lyrisme profondément ancré en lui et qui s’exprime tant par les mélodies que par les structures, plus particulièrement par les rythmes et les silences dans ce projet solo. Ce qui en ressort, peu importe le langage ou l’approche, c’est une quête de beauté.

Des silences évocateurs

L’acoustique du studio La Buissonne – où Ahmad Jamal et Brad Mehldau ont aussi enregistré – a beaucoup influencé la respiration de ses musiques. « Ça m’a donné le goût de prendre mon temps », explique le pianiste, évoquant ces moments où il savourait les harmoniques de son instrument en compagnie de l’ingénieur du son Gérard de Haro. Son jeu en ressort ponctué de ces silences auxquels le titre de l’album renvoie.

« Le silence est extrêmement important, juge le musicien. Il permet d’apprécier ce qui vient après ou ce qui est venu avant. S’il n’y a pas ces pauses, je pense que l’émotion passe moins. » Et pour François Bourassa, ce qui compte, au-delà des prouesses techniques, c’est de toucher l’auditeur. Ce qu’il fait ici avec délicatesse en poussant des idées parfois plus abstraites sans jamais saturer l’oreille.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

François Bourassa (au centre) entouré du contrebassiste Guy Boisvert et du saxophoniste et flûtiste André Leroux, qui font partie de son quartet depuis 25 ans.

Le pianiste va interpréter les morceaux de L’impact du silence le 8 octobre, à la salle Claude-Léveillée de la Place des Arts dans le cadre de L’OFF festival de jazz. Il se produira aussi le 16 septembre au Festival international de jazz de Montréal avec le quartet qu’il a formé il y a 25 ans, avec ses compagnons de longue date Guy Boisvert (contrebasse) et André Leroux (saxophone, flûte), ainsi que Guillaume Pilote (batterie), qui s’est joint à eux il y a environ deux ans.

Il ne faut pas s’attendre à y entendre les pièces de son album solo. « Il y a peut-être trois ou quatre morceaux qu’on va faire avec le quartet. Je vais peut-être changer d’idée, mais je ne veux pas mélanger les choses. Mon album solo a quelque chose d’unique que je veux garder comme ça, dit-il. Mon instinct, c’est que la musique du quartet, c’est autre chose. »

En concert le 16 septembre, à 17 h 30, en quartet au Festival international de jazz de Montréal et le 8 octobre en solo à la salle Claude-Léveillée de la Place des Arts.

L’impact du silence

Piano

L’impact du silence

François Bourassa

Effendi
En vente maintenant