Le Black Album a marqué son époque et n’a laissé personne indifférent, son écho se faisant bien sûr ressentir jusque dans le milieu métal québécois. Morceaux choisis.

Shantal Arroyo

Chanteuse, Overbass et Collectivo, collabore aussi à l’occasion avec Grimskunk ; directrice de la programmation des Foufounes électriques de 1994 à 2004

« Pour moi, Metallica est un bon album pop-métal, ça représente une belle incursion dans le métal. Mais à cette époque-là, j’avais 19 ans, on était au début d’Overbass, on était dans l’extrême et pour nous, le Black Album était une trahison ! Ils vendaient déjà beaucoup d’albums, on baignait dans la contre-culture et on s’est dit : “Oh my God, qu’est-ce qui se passe ?” »

« J’étais fâchée, mais je comprends aujourd’hui que ça représentait une porte d’entrée plus massive au genre, ça a amené une acceptation par le grand public d’un style de musique qu’Ozzy avait scrappé en mangeant des chauves-souris ! C’est aussi après cet album que l’on a vu apparaître de gros concerts métal, des rassemblements énormes. Metallica a ouvert cette porte-là et tout le monde est entré, même si on a chialé au départ ! Metallica a mis la table, ils sont devenus des ambassadeurs du métal. »

Éric Jarrin

Guitariste, Despised Icon

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Éric Jarrin

« Le succès commercial de cet album a amené une visibilité à l’ensemble du métal, des gens se sont tournés vers ce genre-là. Moi, en 1991, j’avais 13 ans, je commençais à écouter du métal, j’avais découvert Metallica avec la chanson One et j’ai étoffé ma culture Metallica après coup. C’est d’ailleurs ça qui m’a donné envie de jouer de la guitare dans la vie ! Quand le Black Album est sorti, je l’attendais donc avec impatience ; je n’ai pas débuzzé, bien au contraire, je l’ai bien accueilli. Et quel son ! Ça m’a jeté à terre ! »

« Trente ans plus tard, c’est toujours une référence pour nous : la preuve, on écoute encore les tonalités des caisses claires quand on entre en studio, et on fait toujours jouer Of Wolf and Man quand on est en tournée ; le floor tom dans l’intro est tellement puissant ! »

« Selon moi, cet album a affranchi les groupes de métal extrême et leur a permis de sortir de l’ombre, au-delà du niveau local. De même, des compagnies de disques comme Roadrunner Records sont nées au début des années 90, en réaction au Black Album. Le métal ayant été socialement accepté, elles ont pu développer leurs lignes d’affaires. »

Paul Sarrasin

Ancien VJ et animateur de SolidRok, de 1987 à 1991

PHOTO KARYNE PLOUFFE, FOURNIE PAR PAUL SARRASIN

Paul Sarrasin

« C’est un album extrêmement important parce qu’il a fait le pont entre le métal et le rock, ce que très peu d’albums du genre ont réussi à faire avant ça. Voir un band qui plaisait essentiellement à un auditoire de headbangers se rendre dans toutes les chaumières, c’était remarquable. »

« Ça a toutefois entraîné une polarisation du genre, un peu comme l’ado qui se rebelle contre ses parents, on a vu toute une frange du métal qui est devenue encore plus dure, peut-être en réaction à des chansons comme Nothing Else Matters. Toutefois, pour un autre pan du métal, le Black Album a ouvert la voie. »

« À l’époque, la force du disque était telle que Metallica est devenu un style musical à lui seul. Il y avait d’un côté le grunge, représenté par plusieurs groupes, et il y avait Metallica. Il reste maintenant du Black Album des chansons qui vont jouer à jamais ; un jeune qui découvre ce disque aujourd’hui est en face d’une force culturelle intemporelle, un classique de la trempe de Back in Black, d’AC/DC. »

Christine Fortier

Chroniqueuse spécialisée et collaboratrice de QUB Radio et Stingray Musique

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Christine Fortier

« [Cet album] est un tournant majeur. Il n’y avait plus de retour en arrière possible. Ils sont toujours restés au niveau du Black Album en ce sens que la popularité du groupe n’a jamais diminué, mais ils n’ont jamais surpassé ce qu’ils ont fait sur ce disque non plus. »

« Ça a permis à plein de monde de découvrir le trash métal. Les gens qui ont découvert Metallica à la radio sont retournés écouter les anciens albums. Je pense que ça a fait que des gens qui pensaient que le métal n’était pas pour eux se sont mis à écouter du trash comme Slayer et Anthrax. »

« Aucun groupe n’a réussi à surpasser la popularité de Metallica et c’est un problème pour une organisation comme Heavy MTL. […] Il n’y a aucun groupe aussi fédérateur, alors il est difficile de trouver des têtes d’affiche pour ce genre de festival. Des groupes métal, il en pleut, mais c’est comme s’ils n’arrivaient pas à faire une impression aussi forte. »

Mitch Lafon

Hôte de la balado Rock Talk with Mitch Lafon

PHOTO PHILIPPE BOIVIN, LA PRESSE

Mitch Lafon

« Pour les fans purs et durs, le Black Album a été une rupture. Pour les gens comme moi qui écoutaient Bon Jovi et Def Leppard, c’était un point de départ. […] C’était plus radio friendly, plus rock friendly, et c’est là que je me suis dit que je pouvais aimer ça. Je ne suis pas le seul : il y a plein de gens qui se sont dits qu’ils pouvaient maintenant aimer Metallica. Le changement de son et les chansons moins longues ont fait une grande différence dans son pouvoir d’attraction. »

« Sans le Black Album, je suis pas mal sûr qu’il n’y aurait pas le HellFest en France, le festival Wacken en Allemagne. Je ne suis pas sûr que Heavy MTL aurait existé. Ce disque a montré aux promoteurs que ça se pouvait. »

Yanick Tremblay

Collaborateur du site spécialisé arsmediaqc.com

PHOTO KARENE-ISABELLE JEAN-BAPTISTE, COLLABORATION SPÉCIALE

Yanick Tremblay

« Le Black Album est un game changer, comme on dit. Il a démocratisé le métal. À partir de là, tu as le droit de dire que tu aimes le métal et tu n’as plus l’air d’un pouilleux. Le métal était accepté. Tu pouvais même en entendre à CHOM et des radios plus populaires. »

« Metallica est, avec Pantera et Slayer, l’un des rares groupes métal à passer à travers le grunge. Le Black Album a mis fin au hair métal à la Poison et autres. Les fans de trash métal qui se sont sentis trahis se sont aussi tournés vers des formes plus extrêmes : Suffocation, Morbid Angel, Hypocrysi, et toute la scène scandinave. Ç’a été une opportunité pour découvrir autre chose. »