Longtemps, Maude Audet a travaillé en coulisses, comme scénographe au théâtre. Ces 10 dernières années, elle s’est plutôt affairée à mettre en scène son univers intérieur dans des chansons folk bien enrobées. Son troisième album, Tu ne mourras pas, palpite de douces espérances.

Tu ne mourras pas, avec ses arrangements de violons et ses petites envolées de flûte traversière, est un album confortable pour l’oreille. Sa facture folk, avec un penchant country ici et là, a quelque chose de familier, même si la manière, l’écriture et le ton de Maude Audet lui confèrent une identité certaine. Joli paradoxe : en prenant cette direction, l’autrice-compositrice-interprète voulait pourtant éviter de rester dans ses pantoufles.

Maude Audet a désormais trois disques dans son CV de créatrice. Pour chacun d’eux, elle a changé de copilote : Navet Confit a réalisé Nous sommes le feu (2015), Ariane Moffatt a été aux commandes de Comme une odeur de déclin (2017) et Mathieu Charbonneau (Avec pas d’casque, entre autres) joue le même rôle sur Tu ne mourras pas, album tout frais précédé par le dévoilement de Demande-moi et Nos bras lâches, deux chansons qui en annonçaient assez bien les couleurs.

0:00
 
0:00
 

J’aime être à la direction artistique de mes affaires, mais j’aime entendre les autres, qu’ils emmènent leurs idées.

Maude Audet, autrice-compositrice-interprète

Ces deux premières expériences lui ont été bénéfiques, assure-t-elle. Ariane Moffatt lui a « beaucoup appris », précise-t-elle. Sauf qu’elle a besoin de bouger. « Il y a des collaborations qu’il est bien de garder sur de longues périodes, mais il y a des moments où j’ai eu besoin de me confronter à du changement pour me forcer à évoluer, dit-elle. Ça fait du bien de brouiller les cartes. »

Elle joue de la guitare

Maude Audet n’a jamais été loin des planches, mais restait dans l’ombre. Son premier métier est scénographe. Sa dernière participation en date à un projet théâtral a été Bonne retraite Jocelyne, pièce de son compagnon, l’auteur et comédien Fabien Cloutier. « Il avait envie qu’on travaille ensemble », raconte-t-elle. Sinon, elle se consacre désormais à la musique.

Jouer de la guitare n’est pas nouveau pour elle puisqu’elle la gratte depuis l’adolescence. Seulement, faire ses propres chansons et monter sur scène lui semblait inaccessible. « J’étais une fille extrêmement timide, alors j’avais un peu mis ça de côté », dit-elle. Après avoir eu ses deux enfants, dans une période où elle travaillait moins, elle s’est dit : pourquoi pas ?

L’envie de dire des choses était là, mais il y avait aussi quelque chose de spontané là-dedans. L’envie de se jeter dans le vide.

Maude Audet

Sa soif de vivre se sent bien au-delà du titre sur Tu ne mourras pas. Même si la plupart des chansons évoquent le temps, et parfois les rêves, qui passent, ce qu’il reste, c’est l’envie de ne pas se laisser éteindre par la course des jours. « On pourra vieillir sans que ça soit triste, être des gens qui résistent », chante-t-elle notamment dans Laura.

« J’ai commencé à faire de la musique sur le tard [elle avait 29 ans] et plus on vieillit, plus on est conscient du temps qui passe, juge-t-elle. Dans la vingtaine, on a l’impression d’être invincible. Mais ce n’est pas long 10 ans… On se sent jeune dans sa tête, mais ça ne fait que continuer à défiler. Alors il y a ce désir de profiter au maximum des gens qu’on aime, la nécessité d’accepter que d’autres vont partir, que d’autres — nos enfants — vont changer… »

Point d’équilibre

Ces préoccupations, Maude Audet ne les partage pas toujours dans des textes sereins. Bien des nuages planent sur Tu ne mourras pas, mais l’album est aussi traversé par une espèce de gratitude. D’espérance, du moins. « Il y a beaucoup de lumière sur ce disque-là, précise-t-elle, avec à-propos. Dans ma façon de créer, j’ai besoin de trouver l’équilibre dans ça. »

On a des côtés sombres, on vit des choses tristes, mais on ne pourrait survivre à tout ça s’il n’y avait pas une insouciance et du beau pour émerger de la noirceur.

Maude Audet

En musique, cette envie de beauté et de réconfort se traduit notamment par des violons (un trio de cordes), une flûte traversière et des rythmes très doux. « Je me suis inspirée des années 60 et 70. Ça teintait déjà ma musique, mais j’avais envie d’approfondir ça, dit-elle. J’avais envie de toucher aux orchestrations tout en restant en phase avec le présent. » Tu ne mourras pas donne l’impression d’entrer dans une bulle folk un brin vintage. Ce qui va plaire aux amateurs de chansons d’appartement.

IMAGE FOURNIE PAR GROSSE BOÎTE

Tu ne mourras pas, de Maude Audet

Tu ne mourras pas. Maude Audet. Grosse Boîte. En vente dès le 7 février.