Il a été tellement partout il y a 20 ans qu’on s’étonne encore de constater à quel point Daniel Boucher vit désormais en marge du show-business. Il fait sa petite affaire, à sa manière et à son rythme : un disque de nouvelles chansons tous les cinq ans, en moyenne.

Il était dû. Six ans après Toutte est temporaire, le revoilà avec À grands coups de tounes, vol. 1. Où en est-il, en 2020 ? Là où il a toujours été : musicalement ancré au tournant des années 1970 et engagé dans une quête perpétuelle — d’amour, d’apaisement, de liberté.

Sur le plan artistique, c’est clair, il n’en fait qu’à sa tête. Son disque s’ouvre avec une chanson qui fait plus de neuf minutes. Une autre, plus loin, en fait plus de huit. Sauf que Daniel Boucher sait faire tenir un groove, même juste à la guitare acoustique. Et il a le bagout pour tenir le cap.

Extrait de Grand beau grand gars

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À grands coups de tounes n’est pas un disque inventif. Sonorités, arrangement, groove, on entend Daniel Boucher jouer avec les codes qu’il maîtrise. Son amour pour les Beatles transparaît encore et — jolie surprise — il flirte habilement avec le country sur Les gâteaux de fête.

Mais ce n’est pas ça qui fait lever ce disque. C’est l’interprète. Convaincu, convaincant, comme quand il lance de sa voix puissante à son amoureuse : « On aura des soleils/On aura des tempêtes/Et tellement de fous rires… » Et si son chant vise si juste, c’est parce que sa langue sonne. Comme celle d’aucun autre.

IMAGE FOURNIE PAR BOUCANE BLEUE

Pochette de l’album À grands coups de tounes, vol. 1

Il n’y a pas de grandes chansons sur ce disque-là, c’est-à-dire pas un morceau à la portée aussi large que Tel quel à vie ou Sans ma mie. Mais il y a de grands moments. Des tournures si justes qu’elles relèvent de l’évidence, des passages hautement poétiques gossés dans cette langue à la fois riche, inventive et pleine d’échardes qu’on ne peut qu’appeler la langue de Boucher.

Et ça, c’est une chose dont peu d’auteurs peuvent se vanter.

★★★½

Rock/Folk. À grands coups de tounes, vol. 1. Daniel Boucher. Boucane Bleue.