Le Festival international Nuits d’Afrique s’est amorcé dimanche dans une formule axée sur les concerts en salle, dont certains seront présentés en ligne plus tard. Sa programmation, construite avec des artistes d’ici venus d’ailleurs, met notamment en vedette Ilam, dont le plus récent album est une perle.

« Les gens ont tendance à penser que l’Afrique, c’est le djembé et la kora, mais l’Afrique, c’est contemporain et c’est urbain, fait valoir Ilam, musicien et compositeur sénégalais installé au Québec depuis 2014. C’est cette texture musicale que je veux [mettre de l’avant]. »

Le ton est donné. Sans renier ses racines, Ilam cherche à conjuguer la musique africaine au présent, avec le souci que les auditeurs, d’où qu’ils soient, puissent se retrouver dans ses chansons aux orchestrations raffinées souvent ancrées dans le blues, mais aussi teintées d’afropop, de reggae, de jazz et parfois même de… flamenco.

L’album s’intitule Néné, ce qui, en langue peule, signifie « maman ». Pour Ilam, c’est une manière de rendre hommage à toutes les mères, qui ont porté tous les habitants du monde, et aussi à la terre mère qui nous nourrit. Et c’est assurément un clin d’œil à sa maman à lui, qui a joué un rôle capital dans son éveil musical en lui offrant sa première guitare.

Le geste n’est pas anodin : Ilam n’est pas issu d’une lignée de griots et n’était pas destiné à la musique.

Mais quand la musique vient te chercher, elle ne te demande pas de quelle lignée tu viens. Pour moi, c’était quelque chose de naturel.

Ilam

Identité blues

Ilam a fait le Conservatoire de musique à Dakar, au Sénégal, où il a grandi. Il s’est par la suite lancé dans le hip-hop, avant de revenir à une forme plus proche de la pop. Surtout, il est revenu à un son ancré dans le blues. « Le blues, c’est mon identité musicale, c’est la base de mes créations. »

Jeune, il a beaucoup écouté Ali Farka Touré, géant du blues du désert, John Lee Hooker et Janis Joplin. Il a aussi été nourri des chansons de Baaba Maal, grande figure de la musique sénégalaise, que son père écoutait beaucoup. Néné est la somme de toutes ces influences, mais synthétisées avec un goût sûr, des mélodies accrocheuses et portées par un chant puissant.

Ilam possède en effet une voix assez haut perchée — on pense à Baaba Maal, avec qui il chante en duo sur sa chanson Laram, et à Youssou N’Dour — qui met l’émotion au premier plan. On sent le blues dans sa voix, bien sûr. Toutes sortes de couleurs de blues : dans Dodo, sa guitare et parfois sa voix évoquent en effet le flamenco dans un spleen absolument envoûtant.

Traverser les frontières

Ilam ne s’en cache pas : sur Néné, il voulait s’ouvrir musicalement, parce qu’il est conscient que l’essentiel de son public ne comprend pas le peul et le wolof, les langues dans lesquelles il chante. « J’ai voulu miser sur les instrumentations, dit-il. La musique, c’est une langue aussi. »

Cette barrière de la langue, il la voit d’abord comme un défi.

Dans mes compositions, j’essaie de trouver un hook, quelque chose qui va rester dans l’oreille. Comme les gens ne comprennent pas ce que je chante, je cherche des mélodies fortes. C’est un travail qui n’est pas facile.

Ilam

L’énergie de la scène est l’autre atout qui lui permet de conquérir le public, selon lui. Et il piaffe d’impatience à l’idée d’enfin donner un concert. « C’est rare que je stresse pour la scène, mais ce spectacle-là, c’est vraiment quelque chose : les mesures [sanitaires] sont différentes, ça ne sera pas comme avant. J’ai hâte de voir comment les gens vont être. »

En spectacle le 3 octobre, à 21 h, au National

Deux autres artistes à découvrir

Matéo

PHOTO FOURNIE PAR LE FESTIVAL INTERNATIONAL NUITS D’AFRIQUE

Matéo

Sacré « Révélation musique du monde 2020-2021 » par Radio-Canada, Matéo, qui a des racines colombiennes, mêle habilement des rythmes afro-colombiens à un rock’n’roll au sens quand même assez classique du terme. Son mini-album Vengo de Frente a été lancé en mars dernier et est accessible sur les plateformes d’écoute en continu.

Le 30 septembre, à 20 h 30, au Balattou.

Senaya

PHOTO FOURNIE PAR LE FESTIVAL INTERNATIONAL NUITS D’AFRIQUE

Senaya

Soûlkreôl. Volume 1, le prochain album de Senaya, ne sera pas lancé avant l’an prochain. Il serait étonnant qu’elle ne soit pas tentée d’en jouer quelques extraits lors de son concert au Balattou. Si l’album est à l’image de son prochain single, sur lequel on a pu mettre l’oreille, ce sera une affaire de groove puissant, mais réconfortant.

Le 4 octobre, à 20 h 30, au Balattou.

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