Avec Chromatica, Lady Gaga se réapproprie la piste de danse et elle le fait de manière sublime. Son sixième album lui permet d’aborder ses peines et sa résilience, tout en marquant par les tonalités un retour à ses sources, la dance-pop, qu’elle maîtrise comme peu d’autres.

Après plusieurs fuites sur le web et trois extraits pour faire encore grimper les attentes, Chromatica est finalement sorti vendredi, un mois et demi après sa date de parution initiale. 

À la suite d’un détour par le pop-rock et le country sur Joanne (2016), suivi du superbe album accompagnant le film A Star Is Born, les signaux annonçant un retour de Gaga vers sa somptueuse exubérance et sa pop électronique ont généré une excitation manifeste. 

Chromatica, parmi les opus les plus attendus de l’année, est un plongeon direct dans les profondeurs de la dance-pop, genre avec lequel Lady Gaga s’est présentée au monde et a gagné ses lettres de noblesse. Et la « reine de la pop » n’a pas fait les choses à moitié. Les rythmes dansants, agressivement pop, parcourent tout le disque, exempt de ballades. Le résultat est complet, cohérent, captivant, une chanson après l’autre, sans jamais qu’on ne puisse cesser de danser ou au moins de hocher la tête sur le rythme. 

Chromatica est un album qui animera bien des clubs (lorsque clubs il y aura). En 43 minutes, on parcourt l’intégralité de l’album de 16 chansons, bourrées de références mélodiques aux années 80 et 90, et on est tentée de repartir pour un tour.

L’introduction de l’album, Chromatica I, est une entrée en matière texturée d’arrangements de cordes dramatiques (Chromatica II et III y font ensuite écho). On entre alors dans un univers parallèle, tandis que les premières notes de l’excellente Alice s’enchaînent avec fluidité. « Mon nom n’est pas Alice, mais je vais continuer à chercher le pays des merveilles », chante Gaga. 

IMAGE TIRÉE DU WEB

Chromatica, de Lady Gaga

Les textes de Chromatica sont souvent très intimes. Free Woman aborde l’agression sexuelle qu’elle a subie, 911, la médication qu’elle doit prendre pour soigner ses troubles dépressifs, 1000 Doves est un appel à l’aide, et Alice, un tableau de ses désespoirs. Ces mots créent avec la musique dansante un contraste fascinant. L’expression dance your pain away prend tout son sens.

Imprévisible, Lady Gaga sait aussi manipuler les genres pour créer de la cohésion là où on pourrait craindre le chaos. Sur l’ultime piste, Babylon, elle intègre du gospel et parvient à injecter une dernière dose de dance-pop sans que ça ne semble forcé ou saugrenu. 

Autre agencement improbable : la chanson dance club tapageuse Sine from Above, ode aux pouvoirs de la musique, sur laquelle chante… Sir Elton John. Une pièce qui, étonnamment, fonctionne à merveille. Sour Candy est une autre collaboration réussie, plus moderne, cette fois avec le groupe de K-pop BLACKPINK.

Aucun doute, Lady Gaga, déjà dotée d’une dextérité musicale prodigieuse, s’est entourée des bonnes personnes pour la création de cet album. Rain on Me, avec Ariana Grande, où les deux divas chantent la résilience, en est une autre preuve. Le producteur BloodPop, qui travaille avec de nombreuses vedettes pop (Britney Spears, Madonna, Justin Bieber), collabore sur la plupart des titres à titre d’auteur et de producteur. Un atout indéniable au disque. 

Chromatica est un album parfait pour danser dans son salon (à défaut de pouvoir danser ailleurs), mais permet aussi de s’émouvoir. La reine est de retour.

> Regardez le clip de Stupid Love

★★★★

Notre choix/ Dance-pop. Chromatica. Lady Gaga.