(New York) Les principales maisons de disques vont suspendre leur activité mardi pour manifester leur soutien contre les violences policières visant les Afro-Américains aux États-Unis, une initiative à laquelle se sont associés plusieurs artistes.A

Toutes les maisons filiales de ces trois géants de l’industrie musicale, mais aussi de très nombreux labels indépendants ont fait savoir qu’ils y participeraient également.

Sony Music, Warner Music Group et Universal Music vont ainsi participer au Black Out Tuesday (le mardi débranché), « une journée pour observer, prendre contact et s’organiser », selon un message publié lundi par Universal Music.

Sony Music annonce « une journée d’action consacrée à des changements significatifs dans notre société, dès maintenant et dans l’avenir ».

L’initiative, qui utilise le mot-clé #theshowmustbepaused (le spectacle doit faire une pause, décalage avec l’expression The Show Must Go On) a été lancée par deux cadres noires de l’industrie musicale, dont Jamila Thomas, d’Atlantic Records, filiale de Warner Music Group.

Elle fait écho à la mort de George Floyd aux mains de la police et au mouvement de protestation qui a suivi.

Les deux femmes la présentent comme un appel à l’industrie musicale, « qui a tiré profit de façon prédominante de l’art noir », à protéger et mettre en valeur la communauté noire.

Plusieurs artistes, dont les Rolling Stones, David Guetta, Massive Attack et Quincy Jones ont annoncé qu’ils s’y associaient.

« C’est difficile de trouver les mots, parce que j’ai fait face au racisme toute ma vie », a tweeté le producteur et musicien Quincy Jones. « Cela dit, il refait surface et, bon sang, il est temps de s’y attaquer une bonne fois pour toutes. »

De nombreux producteurs de podcasts, musicaux ou non, ont également indiqué qu’ils suspendraient leurs programmes mardi.

« Ce n’est pas une initiative de 24 heures », ont annoncé les deux femmes à l’origine du mouvement sur leur site dédié. « Nous allons mener ce combat à long terme. Un plan d’action sera annoncé. »

Depuis le début des manifestations qui ont suivi la mort de George Floyd, plusieurs artistes ont publiquement pris position contre les violences policières visant les Noirs aux États-Unis, notamment Beyoncé ou Rihanna.

Au Québec aussi

L’industrie de la musique au Québec a aussi emboité le pas du Black Out Tuesday. La Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN) a relayé le mot-clic #PRENONSTOUSUNEPAUSE, tout comme par exemple les maisons de disque Audiogram, Dare to Care et Simone Records.

« Quand nous avons vu qu’il y avait un mouvement mondial, nous avons emboité le pas par solidarité », explique Steve Jolin, le patron de la boite spécialisée dans le hip-hop Disques 7ième Ciel. « Ça nous touche parce que le racisme est un problème universel. Ce n’est pas pour rien qu’il y a eu une manif à Toronto samedi et une à Montréal dimanche. De la discrimination, il y en a partout. »

PHOTO TIRÉE DU SITE DE DISQUES 7IÈME CIEL

Concrètement, cela signifie que les bureaux seront fermés et qu’aucun travail ne se fera mardi. « C’est une occasion pour s’arrêter, réfléchir, parler, explique Steve Jolin. C’est ça l’appel qui est lancé : prendre le temps de discuter ensemble comment on peut faire les choses différemment. »

Ce week-end, de nombreux artistes québécois ont réagi à la mort de George Floyd et à l’embrasement de la société américaine qui s’en est suivie.

« Cette crise met la lumière sur le racisme systémique que vivent nos frères et sœurs des communautés noires depuis trop longtemps, chez nous et à travers le monde », a écrit le jeune rappeur FouKi. « J’ai vécu avec un Haïtien toute mon adolescence, qui m’a partagé sa vie et sa culture avec ma chère mère adorée. Et juste imaginer qu’on peut faire du mal et manquer de respect gratuitement à mon beau-père, ou à qui que ce soit, pour sa couleur de peau, ça me met hors de moi. »

Loud aussi a tenu à prendre la parole, ce qu’il fait rarement, parce que « le meurtre de sang-froid de George Floyd par un policier » le « trouble profondément ». « En tant que rappeur, la valeur de ce que la culture noire a apporté à ma vie est inestimable: ma passion, mon lifestyle, mes héros de jeunesse et d’aujourd’hui, mes mentors et éventuellement ma carrière et mon gagne-pain. (…) Je crois que c’est nécessaire en ce moment de rappeler aux gens qui me suivent, et qui pour certains accordent une importance à ce que je dis, que ce mouvement qu’on célèbre et qui nous accueille est ancré dans quelque chose de beaucoup plus gros et important que nous. »

Louis-Jean Cormier a de son côté livré un message fort émotif. « Un moment pour offrir mon amour à tous ceux qui croisent l’injustice chaque jour. Un moment pour sortir le méchant, la déception, le dégoût et la honte. Un moment pour rêver à un monde meilleur… », a-t-il écrit dans un court texte partagé sur sa page Facebook.