Et de quatre. Après Thom Yorke, Jonny Greenwood et Phil Selway, un autre Radiohead se lance en solo : Ed O’Brien. « Je voulais un disque qui vienne du cœur », dit le guitariste et bidouilleur à propos de son album Earth, qui vient de paraître sous l’acronyme EOB.

Il y a des hasards qui ne peuvent pas en être. Ed O’Brien a intitulé son album Earth. Ce mot reflète l’ancrage avec le monde et les gens qu’il évoque dans ses chansons. Il y a plus, par contre. En déplaçant le « h » devant les autres lettres, on obtient le mot « heart » (cœur). Ça aussi, ça colle. Le guitariste le répète d’ailleurs plusieurs fois au cours de l’entretien : il voulait faire un disque « avec un grand cœur ».

Ed O’Brien n’est pas le plus flamboyant des membres de Radiohead. Il n’a pas la dégaine frénétique de Thom Yorke ou de Jonny Greenwood, ni le sympathique magnétisme du bassiste Colin Greenwood. Sur scène, c’est le plus discret. Il est partout, pourtant : il fait les chœurs, gratte sa Stratocaster et manipule des bidules électroniques. C’est un superbe coloriste, l’arme secrète du groupe.

Son premier disque oscille entre ces deux pôles : des chansons basées sur la guitare (souvent acoustique) et des ambiances électroniques, sans tracer de frontière entre les deux. « J’aime la diversité dans le son », dit-il avant de préciser avoir surtout souhaité proposer un « voyage sonore et émotif », qui « donne l’impression d’être un mixtape ».

Pareil, pas pareil

Ed O’Brien a commencé à travailler sur ses propres chansons il y a environ cinq ans. S’il a mis autant d’années à mener ce projet à terme, ce n’est pas parce qu’il ressentait de la pression à sortir des chansons qui puissent être à la hauteur de celles de Radiohead, mais parce que le groupe a publié un album (A Moon Shaped Pool) et effectué une tournée mondiale entre-temps.

« Je ne me suis jamais demandé si je sonnais comme Radiohead, affirme le musicien. Je me suis laissé guider par mon intuition et comment je me sentais. »

Je crois que l’esprit, les couleurs et l’énergie sont différents. Il y a aussi des similitudes, parce que je fais partie de Radiohead, mais je savais en faisant ce disque que ce serait différent.

Ed O’Brien

Il y a, dans les chansons du guitariste, quelque chose de délicat (la guitare, les mots) et de réconfortant (la voix, l’ambiance générale). « Vous dites que c’est réconfortant et c’est bien de l’entendre parce que je voulais faire quelque chose de chaleureux, de coloré. Je ne voulais pas faire un disque agressif ni difficile d’accès. Je voulais qu’il ait une âme. Je voulais faire un album avec un grand cœur. »

Earth n’est pas un disque aventureux ni très exploratoire. Son ton est direct et plus doux. L’intimité que cherchait le musicien s’entend tout particulièrement sur Deep Days où il évoque l’ancrage amoureux. « J’utilise beaucoup le mot “love” dans les paroles et je ne pense pas qu’on entend ce mot sur aucun des disques de Radiohead », s’amuse Ed O’Brien, qui attribue son approche à son âge (il a 51 ans) et à sa vision du monde.

Je voulais que ma musique me représente en tant qu’être humain. Je n’ai pas un tempérament agressif, j’aime les gens et je voulais quelque chose de chaleureux et positif. Le monde n’a pas besoin de plus d’agressivité. Ça n’aide en rien.

Ed O’Brien

Maintenant qu’il a sorti ces premières chansons de son système (avec notamment Flood à la réalisation), il peut passer à la prochaine étape : la tournée. Ed O’Brien sera d’ailleurs à Montréal le 2 juin, au Théâtre Corona. Qu’en est-il de Radiohead ? En congé. Jusqu’à ce que l’un ou l’autre des membres du groupe relance les autres. Chaque fois, les retrouvailles sont « informelles », dit le guitariste.

Les aventures solos sont nécessaires, selon lui. « J’ai toujours cru bon que chacun puisse aller de l’avant avec ses propres expériences. Si tu fais partie d’un groupe pendant 35 ans, tu ne peux pas demander aux autres de ne jouer qu’avec ce groupe… sinon tu risques de ne plus en avoir, pense-t-il. Pour grandir comme personne et comme musicien, tu dois jouer avec d’autres. Je pense que ces projets solos contribuent à maintenir l’équilibre. Ils font en sorte que Radiohead dure plus longtemps. »

IMAGE FOURNIE PAR UNIVERSAL MUSIC

Earth, d'EOB

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