Les émotions dans le tapis, le lac Saint-Jean pas trop loin, la famille musicale élargie généreuse : à 21 ans, Gab Bouchard a tout en mains pour offrir un beau premier album écorché, Triste pareil.

« Plus jeune », Gab Bouchard rêvait de devenir joueur de hockey professionnel. « J’étais un grand sportif et j’étais bon dans tout. À 10, 11 ans, je me suis rendu compte que ne j’allais jamais jouer pour le Canadien. J’ai beaucoup pleuré. »

Le jeune garçon décide alors de se consacrer à son autre passion, la musique. « Je ne sortais plus de chez moi, je m’étais fait un studio dans ma chambre et je jouais de la guitare jusqu’à ce que mes parents cognent dans le plancher et me disent “arrête il est 2 h, on travaille demain !” »

On le comprend bien, Gab Bouchard est aussi passionné qu’excessif. Pas si étonnant que son premier album soit entièrement consacré à une peine d’amour.

Écoutez un extrait de L’hiver se meurt

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« Je n’étais pas capable d’écrire sur autre chose. J’ai juste pensé à ça pendant six mois. Et même plus : mettons que la relation au complet était quasiment une peine d’amour. »

Émotion

Gab Bouchard revendique le droit d’écrire sur un sujet qui en a inspiré bien d’autres avant lui. « Des peines d’amour, il y en a eu plein, et ce n’est pas fini parce que personne ne les vit de la même façon », dit le chanteur, qui se sent bien aujourd’hui, mais qui ne voulait pas laisser les choses s’améliorer avant de faire des chansons.

« J’écrivais là-dessus, je trouvais des riff de guit cool, je me disais “je ne vais pas attendre d’avoir purgé ma peine d’amour dans deux ans pour finalement faire des tounes où je suis joyeux et que je me promène dans la rue.” Ce n’est pas mon genre. »

Écoutez un extrait de Roses

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On peut ainsi entendre sur Triste pareil des phrases comme « Le monde n’est pas assez froid pour geler la douleur » (Roses) – « Ouin, je sais, c’est intense, cette toune. » Et ce n’est pas la seule, mais si les textes sont résolument tristes, mélancoliques et désespérés, l’ambiance générale de l’album l’est beaucoup moins, entre le country-folk et une énergie vraiment rock, entre Neil Young et The Strokes.

« Ça aide à passer à travers les textes. Il y a beaucoup de mélodies accrocheuses, ce n’est pas happy, mais ce n’est pas vraiment triste et lourd, il n’y a pas de gros violons », dit le jeune chanteur, qui livre ses textes avec une intensité à fleur de peau.

Écoutez un extrait de Tu m’connais trop bien

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Gab Bouchard en est conscient, sa voix n’est pas hyper technique, mais elle porte une foule d’émotions… non contenues.

Il y a du monde qui chante vraiment, vraiment bien, mais tu ne ressens pas grand-chose. Moi, ça n’a pas été long me mettre dedans… En fait, j’étais en plein dedans ! Quand on enregistrait, il fallait rire entre les prises, parce que ce n’était pas tant drôle.

Gab Bouchard

Au bout du processus, Gab Bouchard estime que la musique l’a aidé à passer à travers sa peine. « Je voulais que ce soit fini. Je pense que je n’aurai plus jamais de peine de ma vie. » On se permet d’en douter… « Je suis peut-être prêt à en avoir d’autres. »

Bien entouré

Gab Bouchard, qui s’est rendu jusqu’aux demi-finales des Francouvertes en 2018, est le fils de Pierre Bouchard, le batteur qui a inspiré le titre de l’album de Gros Méné Tue ce drum Pierre Bouchard. Son père, raconte-t-il, a mis du temps avant de l’encourager.

« Il sait que c’est dur parce qu’il l’a fait lui aussi. Il me disait : “Gab, tu es intelligent, il y a vraiment d’autres affaires que tu peux faire à part la musique.” Moi, je disais : “Je m’en fous de manger des toasts au beurre de pinotte pendant cinq ans !” C’est vraiment quand il a vu que j’étais sérieux pis que je sortais moins avec mes chums qu’il a décidé de m’aider. »

Mais si Gab Bouchard a choisi Olivier Langevin comme réalisateur, ce n’est pas parce qu’il venait du Lac comme lui, ni à cause de Gros Méné et de Galaxie. « On allait vraiment à la même place. Je le connais moins que Fred Fortin, mais on a pris une bière et ça a vraiment cliqué. J’ai dit “ça va être Langevin le réal, et celui du deuxième album aussi !” »

Huit des dix chansons ont été enregistrées à Montréal avec le même noyau de musiciens, dont Olivier Langevin à la guitare, François Lafontaine aux claviers et Victor Tremblay-Desrosiers à la batterie. Gab Bouchard a en effet rencontré le fils de Mara Tremblay à l’occasion des 20 ans de l’album Le Chihuahua l’an dernier. « C’est mon chum maintenant, mon drummer pour toute la vie. » Quant aux deux autres chansons, elles ont été enregistrées chez et avec Fred Fortin au Lac, et cette fois Pierre Bouchard a fait office de batteur.

Écoutez un extrait de Tête vide

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Gab Bouchard est bien sûr conscient de sa chance, mais il tempère. « Je les connaissais, mais j’aurais eu beau dire “heille, je suis le fils à Pierre Bouchard”, il fallait que ce soit bon ! Sinon, on prendrait juste des bières, on ne travaillerait pas ensemble. Et là, ils sont là et ils m’aident, je ne suis pas pour cracher là-dessus. Il y a beaucoup de monde qui aimerait avoir de l’aide de même. »

Inspiration

Au-delà du lien personnel, Fred Fortin reste un modèle pour lui, et chaque fois qu’il le voit en spectacle, il en ressort avec l’envie de faire plus de musique.

« Quand j’ai vu la tournée Ultramarr, j’ai pogné deux minutes. C’est débile ! C’est inspirant parce que ç’a été long avant que Fred rejoigne le grand public, mais il en faisait pareil, de la musique, parce qu’il en avait besoin. Il ne pouvait pas faire autre chose. »

Pour l’instant, l’objectif de Gab Bouchard est de tourner son spectacle jusqu’à ce qu’il soit « écœuré », d’avoir très chaud sur scène, d’« arrêter de travailler au bar » et de toucher le plus de monde possible.

« C’est là pour ça, la musique. Ça sert à te sentir moins tout seul quand tu files pas, et à te vider la tête pour te faire mieux filer. »

IMAGE FOURNIE PAR LA MAISON DE PRODUCTION

Triste pareil, de Gab Bouchard

Folk-rock
Gab Bouchard
Triste pareil
Grosse Boîte