J’ai rencontré Terry DiMonte, le morning man de CHOM, mardi matin dans son studio. Il était fripé. La veille, il avait pris part avec ses collègues à la grande soirée soulignant le 50anniversaire de la populaire station montréalaise anglophone. « J’ai dormi deux heures », m’a dit celui qui doit quitter son lit douillet toutes les nuits vers 3 h 30 depuis des décennies.

Terry DiMonte est l’un des piliers de CHOM. Il y travaille depuis 1984. À part une infidélité d’environ cinq ans avec une radio de Calgary, l’animateur a toujours eu cette station tatouée sur le cœur.

Il n’est pas le seul. Ils étaient des milliers d’inconditionnels lundi soir au MTelus à célébrer la radio dont le légendaire slogan est « The Spirit of Rock in Montreal ». Mis en vente en septembre, les billets pour cette soirée se sont envolés en moins de 10 minutes. Outre les animateurs de la station, The Tea Party, Sam Roberts et Michel Pagliaro sont venus offrir une prestation musicale.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Le morning man de CHOM, Terry DiMonte, est l’un des piliers de la populaire station montréalaise anglophone, où il travaille depuis 1984.

Mais ce qui a fait le plus plaisir à Terry DiMonte, c’est la présence de Serge Fiori et de Louis Valois, deux ex-Harmonium. « Ils se sont laissé interviewer, et ça m’a ému aux larmes », dit celui qui est originaire de Verdun et qui a toujours voué un culte à ce groupe. « Je m’allongeais dans mon lit quand j’avais 16 ans et j’écoutais leurs disques en boucle », dit-il.

DiMonte me montre sur son ordinateur une photo prise avec les deux musiciens la veille. Il tient fièrement Fiori par les épaules. « Vous savez, on a tous les deux des origines italiennes, dit-il. Hier soir, on a échangé en anglais et en français. C’était un vrai “CHOM moment”. »

On a parfois tendance à oublier que CHOM a joué un rôle capital dans l’essor de plusieurs artistes francophones dans les années 70 et 80.

Ces groupes et chanteurs ont joui du traitement qui a contribué à faire de Styx, Supertramp, Genesis, Yes et Chris de Burgh des artistes chouchous des Montréalais.

« À cette époque, les animateurs s’exprimaient dans les deux langues, raconte Mathew Wood, directeur des programmes de la station. CHOM était le reflet de Montréal. » Parmi les voix francophones, il y avait Claude Rajotte et Denis Grondin, véritables références musicales pour des dizaines de milliers de jeunes mélomanes.

Reflet de Montréal, esprit de Montréal… Ces expressions reviennent souvent dans la bouche de Terry DiMonte et de Mathew Wood. L’idée que CHOM soit vue comme une radio rassembleuse est très importante pour eux. « Hier soir, au MTelus, il y avait des gens de 18 à 78 ans, des bilingues, des biculturels, dit Mathew Wood. Je trouvais ça extraordinaire de voir cela. C’est notre public. »

Cette radio, qui n’a rien perdu de son ADN au cours des dernières années et qui, selon la définition du CTRC, est une station anglophone, compte parmi ses auditeurs 65 % de francophones. Ils écoutent CHOM parce qu’ils savent qu’ils auront droit en tout temps à la meilleure musique rock qui soit. Cette programmation judicieuse, on la doit à Pierre Landry, le directeur musical de la station.

C’est lui qui, aidé par quelques collègues, a préparé le palmarès des 50 meilleurs disques qui représentent le mieux la personnalité de CHOM. En tête de ce palmarès, on retrouve Dark Side of the Moon, de Pink Floyd ; Led Zeppelin IV ; Abbey Road, des Beatles ; A Night At the Opera, de Queen ; et Nevermind, de Nirvana.

Je demande à Mathew Wood si, au cours de ces 50 dernières années, la station a vécu des moments difficiles. J’ai évidemment en tête les périodes où le Québec a connu une forte fièvre souverainiste marquée par les référendums de 1980 et 1995.

Mais Wood a autre chose en tête. « La période Howard Stern, dit-il. Ce fut une grave erreur. On a perdu notre caractère. Les propriétaires de l’époque ne comprenaient pas qui nous étions. C’était effrayant. »

En effet, le temps d’une saison (de septembre 1997 à août 1998), CHOM a diffusé l’émission matinale que le controversé animateur américain présentait à partir de New York. Les propos francophobes de l’animateur ne sont pas passés inaperçus. « Lors de la première émission, Stern s’en est pris aux Français, qu’il a traités de “déserteurs” durant la Seconde Guerre mondiale. On s’est fait ramasser par les médias montréalais. Ce ne fut pas un bon moment pour nous. »

Pendant que je discute avec Mathew Wood, Terry DiMonte prépare la finale de son émission. Visiblement, il a hâte de retrouver son lit. « J’ai 61 ans, je ne ferai pas cela encore très longtemps, me dit-il. Au début de ma carrière, je sortais tous les soirs. J’avais 26 ans. Je ne peux plus faire cela aujourd’hui. »

Animer tous les jours de la semaine à partir de 5 h 30 une émission de radio est une chose. Mais animer une émission où la musique rock est à l’honneur en est une autre. A-t-on toujours envie d’écouter Bon Jovi à l’aube ? « C’est drôle à dire, mais tous les matins, j’arrive ici et cette musique me procure l’adrénaline nécessaire pour avancer », dit Terry DiMonte.

Là-dessus, il prend son micro, remercie les artistes qui sont venus souligner le 50anniversaire de CHOM avec lui la veille et balance Dixie, d’Harmonium, pour leur dire au revoir.

« Goodbye, folks ! »