Multi-instrumentiste, arrangeur et maestro, l’Américain Sly5thAve, alias Sylvester Onyejiaka, dirigeait mercredi l’Orchestre national de jazz de Montréal pour l’exécution très réussie d’un projet pour le moins électrisant : The Invisible Man : An Orchestral Tribute To Dr Dre.

Inspiré des grands classiques du très influent rappeur et producteur hip-hop Dr. Dre, ce projet de jazzification orchestrale résulte d’une commande de Playing For Change, une association à but non lucratif se consacrant au financement d'une école de musique à Compton, quartier défavorisé de Los Angeles d’où proviennent tant d’artistes hip-hop.

Sorti en novembre 2017 sous étiquette Tru Thoughts, l’enregistrement de ce projet comprend les relectures des pièces suivantes: Tha Shiznit, avec Snoop Dogg; California Love, avec feu Tupac Shakur; Forgot About Dre, avec Eminem; No Diggity, de Blackstreet, avec Dre et Queen Pen; Who Am I de Snoop Dogg; I’d Rather Be With You de Bootsy Collins; Still D.R.E. avec Snoop Dogg; My Name Is de Eminem, coécrite avec Dre; Guilty Conscience, d’Eminem avec Dre; Nothing But a G Thang, avec Snoop Dogg; Let Me Ride de Dre, et plus encore.

Pour la transcription, Sly5thAve a retranché le rap des pièces et en a conservé les éléments musicaux émanant du beatmaking originel. Il faut dire que ces pièces comportaient déjà des fragments de musique instrumentale généralement axés sur le G-funk et autres emprunts stylistiques, ce qui facilitait l'écriture des arrangements. 

Il a ainsi réorganisé cette matière pour un grand orchestre de jazz, hybride entre le big band traditionnel et l’orchestre de chambre – avec anches, cuivres incluant des cors, section rythmique, guitare électrique, clavier, violons, violoncelles et altos, chant (Miranda Di Perno).

Plusieurs orchestres du monde ont d’ores et déjà joué cette musique, c’était au tour de l’ONJM... qui n' a pas raté son coup, loin de là! Sur la scène du Monument National, cette configuration de l'orchestre montréalais a fort  bien rendu l’esprit des compositions originelles et de ses compléments orchestraux imaginés par Sly5thAve.

Mercredi soir, l’univers de Dr. Dre et ses interprètes mythiques fut respecté, et très apprécié du public - dont plusieurs fans de rap pour le moins expressifs!

Bien sûr, nous étions devant des interprètes et solistes québécois, jazz ou classiques, pas exactement G-funk ou hip-hop... Or, puisque la direction était assurée par un maestro afro-américain venu jouer sa musique, on n’en fera certes pas un cas d’appropriation culturelle.