Concert hommage à Dummy de Portishead et venue de Morcheeba dans le cadre du Jazz, spectacle de Massive Attack à l’automne : le trip-hop résonne de nouveau sur nos scènes. Retour sur quelques jalons du genre.

Blue Lines, de Massive Attack

L’année 1991, dans la tête de bien des gens, est celle de Nevermind de Nirvana et du raz-de-marée grunge. Loin de Seattle et des guitares rageuses, Massive Attack, collectif multiculturel nourri entre autres au rap, au dub, à la soul et à l’acid jazz, propose sa vision du futur : Blue Lines. Ce disque tendu mais tout en retenue jette déjà les bases de ce qu’on appellera bientôt le trip-hop, avec ses atmosphères sombres, l’utilisation judicieuse du scratching, le recours aux rythmes brisés et l’attention portée aux textures. Une espèce d’ovni musical, à des années-lumière de tout ce qui était mainstream à l’époque. Blue Lines demeure un chef-d’œuvre et un album fondateur du genre.

Maxinquaye, de Tricky

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Maxinquaye, de Tricky

Maxinquaye place d’emblée Tricky dans le même espace-temps que Massive Attack. Normal : il a été de l’aventure Blue Lines. Même de Protection, album paru en 1994, auquel il fait un clin d’œil dans sa chanson Overcome. Ici aussi, les atmosphères sont hantées, les rythmes brisés, mais les angles sont moins arrondis. Tricky a quelque chose de plus brut, même si les arrangements sont d’une richesse et d’une précision inouïes. Fait intéressant, Hell Is Round the Corner s’appuie sur un échantillon de la chanson Ike’s Rap II d’Isaac Hayes… tout comme Glory Box de Portishead.

Homogenic, de Björk

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Homogenic, de Björk

Trip-hop, Björk ? Pas nettement, non. On en trouve toutefois des traces ici et là, sur ses disques. Sur Immature, tirée de son fantastique Homogenic. Sur Enjoy, propulsée par cette rythmique obsédante. L’énergie déployée par la fée islandaise n’a bien sûr rien à voir avec le spleen associé au trip-hop, mais elle puise à des sources semblables. Debut, son premier disque post-Sugarcubes, a été réalisé par Nellee Hooper, qui fut du même collectif de DJ que le noyau de Massive Attack. Tricky, issu lui aussi de ce collectif, a été l’un des collaborateurs importants de son album Post. Björk a fait sa marque avec l’électro, mais aspire et triture à sa manière tout ce qui fait le trip-hop.

Felt Mountain, de Goldfrapp

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Felt Mountain, de Goldfrapp

Plus sensuel que Portishead, plus enveloppant que Massive Attack, Goldfrapp fait en quelque sorte le pont entre le trip-hop et une pop plus branchée sur les années 60. L’attrait de Felt Mountain tient en grande partie à la voix de la chanteuse Alison Goldfrapp, d’une élégance empreinte de mystère. Et à ce côté cabaret, presque cinématographique (on pense aux morceaux nocturnes d’Angelo Badalamenti, compositeur de la bande originale de Twin Peaks). Moins ouvertement marqué par le hip-hop que d’autres artistes associés au trip-hop, le groupe londonien a visiblement intégré les expérimentations de Massive Attack, de Portishead (le traitement de la voix, par moments) et de Tricky, vieil ami de la chanteuse.