L’acteur et chanteur français renoue avec l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM), qui présente depuis mercredi la Symphonie fantastique, op. 14, suivie de Lélio ou le Retour à la vie, du compositeur romantique Hector Berlioz, dans le concert de clôture de Kent Nagano.
Lambert Wilson, qui vient de jouer Alceste dans Le misanthrope à Paris pendant quatre mois, a rejoint l’ensemble montréalais il y a à peine quatre jours.
C’est la deuxième fois que l’OSM invite l’acteur et metteur en scène, touche-à-tout, pour incarner le rôle de Berlioz dans ce « monodrame lyrique », inspiré des échecs amoureux du compositeur. La première fois, en 1996, il avait travaillé avec l’orchestre de Charles Dutoit.
« C’est un rôle que j’ai joué plusieurs fois, en français et en anglais, notamment avec le professeur du maestro Nagano, Seiji Ozawa [avec l’Orchestre symphonique de Boston], mais j’ai quand même dû réapprendre le texte », nous dit l’acteur et chanteur, qui a interprété au Théâtre du Nouveau Monde (TNM) il y a deux ans des chansons d’Yves Montand.
La Symphonie fantastique, qui est dédiée au tsar de Russie, Nicolas 1er, est un poème symphonique inspiré des amours à sens unique de Berlioz, notamment pour l’actrice irlandaise Harriet Smithson, indifférente à ses élans (même s’il l’a finalement épousée !). Dans Lélio ou le Retour à la vie, le compositeur surmonte son désespoir « grâce à la musique et à la littérature ».
« Ô musique, maîtresse fidèle et pure, ton ami, ton amant t’appelle à son secours… », lance comme un cri Lambert Wilson, qui joue avec fougue pendant que les musiciens de l’OSM interprètent un segment baptisé « Fantaisie sur La tempête de Shakespeare ».
« J’aime l’activité de récitant avec des musiciens », nous dit d’emblée l’acteur, qui interprète un texte dans lequel il est question de Goethe, de Shakespeare et d’Orphée.
« J’aime la musique, j’aime les musiciens, et c’est une façon d’être soliste moi-même, à l’intérieur d’un orchestre. Une activité d’acteur à l’intérieur d’un ensemble orchestral, c’est passionnant. » — Lambert Wilson
Dans Lélio, Lambert Wilson incarne Berlioz dans une mise en abyme où le compositeur s’adresse directement aux musiciens qui interprètent son œuvre.
« La musique est dans sa tête, explique l’acteur. Les deux derniers mouvements de la Symphonie fantastique racontent le cauchemar de cet homme qui a essayé de se suicider avec une drogue, qui n’a pas marché, et dont il se réveille. Lélio, qui est l’archétype du personnage romantique, est la suite, avec son Retour à la vie. »
L’acteur arpente la scène de la Maison symphonique avec une aisance et un charisme qui mettent en valeur l’ensemble orchestral. Un luxe, lui fait-on remarquer.
« Le vrai luxe dans Lélio, répond-il, c’est d’avoir et l’orchestre symphonique et le chœur au complet, et des chanteurs solistes, et un acteur. C’est pour ça que c’est une œuvre qui n’est pas souvent faite. Il y a un effectif luxueux. »
Souvenir merveilleux de Montréal
Lambert Wilson est un habitué de la métropole, qu’il visite régulièrement depuis 20 ans.
« J’ai plein d’amis chez vous, des chanteurs, des gens de théâtre et même de la police ! J’ai gardé un souvenir absolument merveilleux de mon passage à Montréal il y a deux ans au TNM, où j’ai connu Lorraine Pintal et Loui Mauffette. J’avais aussi chanté des chansons du cinéma français des années 30 à 60 [Démons et merveilles], et j’ai tourné ici quelques fois [Les enragés, Timeline]. »
À partir de décembre, Lambert Wilson jouera dans un spectacle hommage au compositeur allemand Kurt Weill, qui sera présenté à Paris, mais qu’il aimerait bien voir produit à Montréal.
« Je vais chanter avec un orchestre les pièces qu’il a composées dans les années 30 en Allemagne, comme des extraits de L’opéra de quat’sous ou Mahagonny, des airs en français qu’il a composés lors de son passage à Paris, quand il a fui le nazisme, et des extraits de comédies musicales qu’il a composées aux États-Unis, comme September Song ou encore Lady in the Dark. »
Lambert Wilson, qui a joué dans plus de 80 films, a toujours eu un intérêt pour la musique.
« J’ai besoin de chanter dans mon travail d’acteur et aussi de toutes ces histoires de migrations [Yves Montand, qui était italien, Kurt Weill]. C’est l’histoire de ma famille, parce que les Wilson venaient de Dublin. C’est mon arrière-grand-père qui a est venu en France. Mais j’ai toujours eu un intérêt et une compassion pour les gens qui s’exilent et qui font quand même leur œuvre, qui donnent un sens à leur vie, par la culture. »
À la Maison symphonique, à Montréal, ce soir et demain