La musique, c’est toute sa vie. Geneviève Jodoin, 41 ans, gagnante de la septième édition de La voix, chante depuis toujours, dit-elle en entrevue avec La Presse.

« Je n’ai jamais fait autre chose. J’ai un DEC en chant classique du cégep de Drummondville et un baccalauréat en chant jazz de l’Université de Montréal. » À peine sortie de l’université, elle a participé à titre de choriste à la tournée de Jorane, puis de Nanette Workman. Elle a ensuite enchaîné les spectacles dans les casinos, fait une tournée avec Marie-Pierre Arthur, elle a travaillé comme choriste à l’émission Belle et Bum. Elle était aussi de la distribution de la comédie musicale Le petit Roy, inspirée des chansons de Jean-Pierre Ferland.

Le public de La voix a donc voté dimanche pour une chanteuse d’expérience qui a déjà trois albums à son actif. « Lors des auditions à l’aveugle où Geneviève a chanté Hallelujah, j’ai tout de suite entendu le métier dans sa voix. Je me suis dit que j’avais quelqu’un devant moi avec du panache et de la solidité en plus d’un incroyable nuancier vocal », a confié sa coach, Lara Fabian.

Pourtant, elle a failli ne jamais se présenter aux auditions. C’est un appel de Jean-Pier Gravel, qui travaillait à titre de recherchiste au sein de l’équipe de casting, qui a convaincu Geneviève de se rendre à l’Hôtel des Gouverneurs l’été dernier pour passer la préaudition devant le jury.

« Tout le monde pense que j’ai tout lâché, alors pourquoi pas ? J’en ai parlé à mon chum et à mes enfants, car je me suis dit que tant qu’à tenter l’aventure, autant le faire en famille. Ils étaient derrière moi, et je ne pensais jamais que j’irais jusque-là. »

Car Geneviève Jodoin, son mari musicien Frédéric Boudreault et leurs trois enfants ont quitté Montréal pour s’installer à L’Isle-aux-Coudres en 2015, où ils sont propriétaire de l’auberge La Fascine. « Mon beau-père vient de là, on y passait nos étés, et à un moment donné, ça devenait difficile à Montréal, financièrement parlant. Le plan B est devenu le plan A, nous sommes partis vivre à L’Isle-aux-Coudres, explique-t-elle. On avait envie de se rapprocher de la nature, du fleuve, et je [ne l’ai] jamais regretté. » La musique est toujours présente, car Geneviève s’occupe de la programmation de la salle de spectacle de l’auberge. Patrice Michaud, Kevin Parent, Philippe Brach, Koriass, Lynda Lemay et Pascale Picard font partie de la programmation estivale.

On lui fait remarquer qu’elle est la gagnante la plus âgée de La voix. « C’est la vieille qui a gagné ! On n’arrêtait pas de rire avec Colin Moore [l’autre finaliste], qui a 40 ans ! Je suis contente de casser le cycle, pourquoi ma chance aurait expiré ? Je ne gagnais plus ma vie avec la musique, je n’ai pas volé ma place, et surtout, c’est le public qui a voté ! », lance-t-elle.

Prochaine étape ? De bonnes chansons !

PHOTO FOURNIE PAR OSA IMAGES ET TVA

Geneviève Jodoin et Lara Fabian, lors de la finale de La voix

Lara Fabian pense que Geneviève Jodoin est habituée aux aléas cruels de ce métier. « Elle doit accueillir avec gratitude le cadeau que c’est que de gagner La voix, et mesurer l’importance que c’est que d’être un chanteur populaire, car c’est une bénédiction », estime Lara Fabian.

Ce qu’il faut faire maintenant ? « Choisir les bonnes chansons, répond la coach sans hésiter, car ce sont les chansons qui font les artistes, il va être l’heure de les trouver, de les écrire, elle le fait déjà avec son conjoint, elle peut construire un répertoire qui cristallisera le choix du public, ça va être important », pense Lara Fabian. Est-ce que ça passe par une reprise ? « Une reprise ou deux, ça ne tue personne, moi-même j’ai fait la reprise de Je suis malade, qui a été capitale dans ma trajectoire, et je pense que Pendant que pourrait être la chanson de Geneviève, car elle a réussi à se la réapproprier avec les arrangements de David Laflèche. »

En effet, cette chanson de Gilles Vigneault colle à la peau de Geneviève ; elle en avait d’ailleurs déjà enregistré une version piano-voix en 2011 sur son album Amis chemins

« Elle a pris tout son sens depuis que je suis dans Charlevoix, car les bateaux, le fleuve, les grands vents, je les vois au quotidien. »

Elle a hâte de rentrer chez elle et de reprendre un rythme de vie normal, hâte aussi de recommencer à faire des spectacles. « C’est le premier jour du reste de ma carrière, j’ai gagné le cœur du public, on va voir s’il me suit dans ce que je fais. Je ne suis pas une matière première facilement malléable, je ne vais pas me dénaturer, mais je suis ouverte à collaborer avec des gens avec qui je me sentirais en confiance. »

En plus de chanter avec Corey Hart en juin, Lara Fabian a invité Geneviève à participer à ses spectacles en avril, à Montréal et à Québec. « Je suis face à une collègue maintenant. Je n’ai pas besoin d’aiguiller ou d’encadrer Geneviève, de toute façon, c’est un électron libre, c’est une femme dont la densité artistique est tellement ample, elle n’a pas besoin de mentor », conclut Lara Fabian.