Fan fini du groupe Genesis, Sébastien Lamothe a transformé sa fascination en un travail très respectable. Il a fondé la formation The Musical Box, dont il est le directeur musical et bassiste depuis 1993. Mais pour lui, cela n'a rien à voir avec la nostalgie.

Joint en Italie, escale de la tournée européenne de The Musical Box, Sébastien Lamothe explique avec énergie que sa formation n'est pas un groupe-hommage et que sa raison d'être n'a rien de nostalgique.

«Malgré le fait qu'on s'adresse, en partie et peut-être en majorité, à des gens plus vieux que moi, je n'ai jamais vu ce que nous faisons comme de la nostalgie, soutient-il. Je fais partie de tous ces gens de ma génération [il a 48 ans] qui n'ont pas vu les shows d'origine de Genesis tout en étant fascinés par la musique, les images, le mythe, l'aspect mystérieux et perdu de cette époque-là.»

N'est-ce pas justement de la nostalgie?

«Quand je vais à Disney World, c'est de la nostalgie», répond l'intéressé qui, au sein de The Musical Box, incarne Mike Rutherford, bassiste de Genesis. «Parce qu'à Disney World, j'y suis allé tout jeune. J'ai des images et surtout un lien direct avec ces souvenirs d'enfance.»

Voilà où, selon lui, se situe la différence. S'il a vécu la magie de Disney en direct, il a découvert celle de Genesis en différé. On parle ici de l'époque de la première moitié des années 70 alors que Peter Gabriel était le leader de cette formation britannique.

C'est seulement à la fin des années 80, alors qu'il passait de l'adolescence à l'âge adulte tout en écoutant de la musique pop, que Sébastien Lamothe a découvert la musique, qualifiée de rock progressif, de cette période.

Et quelle découverte ce fut!

«J'avais un ami dont le grand frère nous a dit un jour: "Je vais vous faire écouter de la vraie musique." Mon premier contact conscient avec Genesis porte sur le passage entre la partie narrative et chantée vers la partie instrumentale de la pièce The Cinema Show [sur l'album Selling England by the Pound].»

«Pour le jeune musicien que j'étais, c'était de la science-fiction. Je ne savais pas qu'on avait le droit de faire des choses comme ça!»

Après le choc musical, il y a eu celui de la mise en scène. Sébastien Lamothe est renversé par ce qu'il appelle l'esthétisme visuel du groupe.

«Jusqu'à ce jour, la pochette du disque Genesis Live est une des images les plus fascinantes que j'ai vues, dit-il. Vous avez là un rideau, quatre lumières noires [black lights] par terre et un gars avec un drôle de masque sur la tête. C'est tout ! Il n'y a rien d'autre. Cela crée un côté très mystérieux, très théâtral. À mon sens, la force des images et de la musique transcende l'étiquette des années 70 collée à celles-ci.»

Il affectionne aussi les «drôles d'histoires et personnages très humains» que raconte Peter Gabriel dans les textes. «Moi qui suis aussi un fan de Yes, j'ai toujours trouvé que ce groupe très versé dans la performance musicale présentait une lacune du côté des textes.»

Extravaganza

Avec plusieurs autres musiciens, Sébastien Lamothe a fondé The Musical Box, du nom d'une pièce de l'album Nursery Cryme, paru en 1971. Depuis, le groupe a conçu plusieurs spectacles centrés sur les albums FoxtrotSelling England by the Pound et The Lamb Lies Down on Broadway.

Au fil des ans, la formation s'est bâti une importante crédibilité tant auprès des fans que des membres originaux de Genesis. Le guitariste Steve Hackett a déjà joué un rappel avec eux. Phil Collins l'a fait aussi à Genève. Peter Gabriel a emmené ses enfants voir le spectacle afin qu'ils puissent voir ce qu'il faisait à l'époque. Les musiciens de la formation originale ont collaboré avec ceux du groupe québécois dans le souci d'une recréation pratiquement parfaite des spectacles.

«On a toujours mis de l'avant l'idée de faire de la reproduction historique et de recréer les shows originaux que nous n'avons pas vus. Et nous le faisons de façon sérieuse, documentée et appuyée par les membres de Genesis.»

Plus tôt cet automne, le groupe a lancé la tournée européenne de son spectacle Extravaganza, prévu au Québec au début de 2019. Il s'agit d'un spectacle repensé par rapport aux précédents, avec une sélection de pièces allant de l'album Trespass (1970) jusqu'aux disques A Trick of the Tail et Wind & Wuthering enregistrés sans Gabriel.

«On se paie la traite, à nous et au public, en faisant des classiques et des pièces que Genesis n'a jamais faits en spectacle», dit M. Lamothe.

Le groupe a-t-il le potentiel musical pour être encore écouté dans 100 ans?

«L'oeuvre est très spécifique aux années 70 et il n'existe plus de plateforme pour diffuser l'oeuvre de Genesis, répond M. Lamothe. C'est presque rendu du folklore. Nous sommes un vecteur important pour la diffusion de cette information, mais on est en fin de parcours. À mon sens, l'oeuvre de Genesis va passer aux oubliettes très prochainement.»

Qu'on soit nostalgique ou non de cette musique, le moment est donc propice pour aller voir The Musical Box sur scène.

Le groupe sera en spectacle au Québec en janvier et février, dont les 9 février et 18 mai à Montréal.

Photo Serge Morisson, fournie par The Musical Box

The Musical Box en spectacle