Même mort, Johnny Hallyday rocke encore. Lancé vendredi en France, l'album posthume du rockeur, intitulé Mon pays c'est l'amour, s'est vendu à 300 000 exemplaires en moins de 24 heures, du jamais-vu. Jusqu'à présent, quelque 631 473 exemplaires (CD et vinyles) ont été vendus.

Ce chiffre fracasse le record du chanteur Renaud, qui avait écoulé - en une semaine - 287 000 exemplaires de son nouveau disque, lors de son retour en 2016.

Il y aura bientôt un an que «Johnny» est mort. Mais le chanteur semble toujours bien vivant dans le coeur des Français, qui continuent à lui vouer un culte sans bornes. C'est dire que ce 51e et ultime album, enregistré quelques mois avant sa mort, alors qu'il se savait atteint du cancer, était aussi attendu que l'ouverture d'un IKEA à Québec.

Dans une campagne promotionnelle digne des grandes années de l'industrie du disque, la société Warner a joué sur tous les fronts pour faire mousser l'événement.

Au-delà de l'ambitieuse offensive médiatique, des magasins de disques ont exceptionnellement ouvert leurs portes à 0 h 01 dans la nuit de jeudi à vendredi pour permettre aux fans les plus enragés de se procurer la galette dès les premiers instants de sa mise en marché.

Dans une autre mise en scène marketing, menée conjointement avec la plateforme d'écoute en continu Deezer, un énorme kiosque de «streaming», avec 200 écouteurs, était installé pendant toute la fin de semaine devant la gare Saint-Lazare, à Paris, afin que les passants et les fans puissent découvrir en groupe la dernière production du chanteur.

«Ne surtout pas manquer ça»

C'est là qu'on rencontre Françoise, 57 ans, blouson noir et cheveux platine. Fan depuis toujours, cette serveuse de restaurant a traversé tout Paris pour vivre cette expérience collective, achetant même le CD en chemin, pour suivre les paroles dans le livret. Fan depuis toujours, elle «ne voulait surtout pas manquer ça» et trouve que l'album «résume bien la vie et les différents styles» du rockeur.

Même son de cloche chez Paulette, qui se tient à quelques mètres, bien appuyée sur sa canne. Malgré son handicap, la dame de 77 ans a pris l'autobus «spécialement pour l'occasion» après avoir entendu parler de cette installation à la radio. «Dès que je pars d'ici, je vais m'acheter le disque. Il faut avoir ça en héritage pour nos petits-enfants», confie-t-elle.

On s'attendait à une faune majoritairement grisonnante, issue des années 60 et 70. Erreur. Outre les incontournables baby-boomers, nombre de jeunes s'arrêtent aussi pour écouter l'album.

Parmi eux, Elton, 20 ans, un fan de rap qui passait là par hasard. «Johnny? J'ai rien contre, dit-il. Mais là, c'est surtout l'invention que je kiffe, le principe du truc, quoi. Ça ramène du monde. Faudrait le refaire pour d'autres artistes, non?»

De quoi faire oublier - pour un temps - la triste saga entourant l'héritage de Johnny. Un mauvais feuilleton médiatico-judiciaire, dans lequel les deux aînés du chanteur, David Hallyday et Laura Smet, contestent le testament américain de leur père, qui a tout légué à sa dernière femme Laetitia et leurs deux filles mineures.

Des négociations seraient en cours pour trouver une entente à l'amiable, ce qui n'a pas empêché David Hallyday de juger «navrant» le titre de ce nouvel album, qui sera en vente au Québec le 2 novembre.

Au total, 800 000 exemplaires de Mon pays c'est l'amour (vinyles et CD) ont été mis en place dans les magasins en France. Énorme, voire miraculeux, considérant que le marché du disque, actuellement en pleine transition, s'oriente désormais vers la dématérialisation et l'écoute en continu.

Signe d'une offensive commerciale exceptionnelle: l'album est même distribué dans deux chaînes de supermarchés bien connues.

photo Jean-Christophe Laurence, la presse