Le chanteur Sylvain Cossette lançait jeudi soir au Cabaret du Casino de Montréal La tournée 80s, dans laquelle il reprend une foule de chansons qui ont marqué cette décennie et qui le mènera ensuite partout au Québec. Nous l'avons rencontré dans les coulisses, puis nous avons assisté au spectacle le soir de la première.

La scène

Deux heures avant que le spectacle commence, Sylvain Cossette nous fait visiter la scène. L'inspiration est très pop, avec la batterie blanche, quelques guitares vintage et les écrans de télé. «Mais on ne voulait pas tomber dans la caricature non plus, précise le chanteur. Les musiciens sont habillés en noir et blanc, mais il n'y aura pas de spray net non plus. On voulait juste que ça punche.»

Les chansons

Collée sur la scène, la liste des chansons que Sylvain Cossette a choisi d'interpréter. Il y en a 38 en tout, mais plusieurs sont réparties dans des medleys. Comment les a-t-il choisies? «J'ai surtout été un fan de musique britannique. Je n'étais pas trop Bon Jovi, ni trop musique canadienne. J'ai toujours préféré INXS, Tears for Fears, U2... J'ai jonglé entre ce que les gens voulaient et ce que je suis, j'ai tout mis dans un boulier et j'ai fait rouler ça pendant un an.» Pour ce qui est des arrangements, Sylvain Cossette dit y être allé «all in» dans le style de l'époque, avec synthétiseurs et tout le tralala. «Ce soir, tu revis les années 80. C'est notre grande fierté de faire les tounes pareil. On aurait pu les virer de bord, mais les gens viennent pour entendre Sylvain Cossette chanter les chansons qu'ils aiment.»

La préparation

Dans sa loge, Sylvain Cossette discute des derniers ajustements du «set list» qui sera donné aux représentants des médias avec sa fille Elisabeth, la productrice du spectacle... entre autres tâches connexes. «Je suis productrice déléguée, directrice de tournée, assistante, docteure..., lance la jeune femme. La chance que j'ai avec mon père, c'est que je peux me perfectionner dans plein d'affaires.» Les deux adorent collaborer. «On a hésité à retravailler ensemble, mais on est venus à la conclusion qu'il y a plus de positif que de négatif», dit Sylvain Cossette. «On se respecte, on se donne de l'espace et on se rapproche quand c'est le temps, dit Elisabeth. On prend soin l'un de l'autre.»

Moins d'une heure avant de monter sur scène, Sylvain Cossette et ses musiciens font des exercices vocaux, dirigés par le directeur musical Matt Laurent. Ils réviseront ensuite ensemble le déroulement du spectacle. «Matt et moi, ça fait 15 ans qu'on travaille ensemble», raconte le chanteur. «On s'est rencontrés sur Notre-Dame-de-Paris. Depuis, on a dû faire quelque chose comme 1000 spectacles», dit Matt Laurent. Il apprécie particulièrement le fait que Sylvain Cossette soit un gars d'équipe. «C'est son nom sur l'affiche, mais il est un peu comme le chanteur du band. C'est vraiment l'impression qu'il donne.»

La pause

Sylvain Cossette revient avec ce nouveau spectacle trois ans après la fin de La tournée 70s, qui a duré environ cinq ans. Qu'a-t-il fait entre-temps? «Je me suis reposé. J'ai eu un an de semi-déprime. J'avais tellement changé de beat que je ne savais même plus si je devais aller à droite ou à gauche en sortant de chez moi.» Il a attendu que les gens s'ennuient de lui pour arriver avec ce nouveau projet, qu'il cogite depuis un an. Sylvain Cossette réclame le droit de chanter de tout, des reprises comme des chansons originales. «Qu'est-ce que tu fais quand tu n'es plus la saveur du mois, mais que tu as encore envie de chanter? Tu as le droit d'aller chanter sur un bateau à 70 ans sans te faire traiter de has been. Moi, chanter, c'est ce que je fais de mieux dans la vie, alors même si les gens ne sont pas contents que je reprenne les chansons des autres, je chante. C'est du divertissement, et puis je fais revivre des chansons, comme les chanteurs d'opéra.»

Fierté

Petit moment de recueillement avant de monter sur scène. «Je suis comme un cheval avant la course. J'ai hâte que la barrière s'ouvre, et après je ne veux plus y aller...», raconte Sylvain Cossette en souriant. «Il y a une fierté dans l'affaire aussi. C'est mon show que j'avais monté dans ma tête. J'avais hâte de le marcher, qu'il me rentre dans le corps, et cette semaine, c'est ce qui est arrivé parce que ça fait trois jours qu'on est ici et qu'on répète. Puis, enfin, ce soir il y a mes proches, du public. Et on est sold out les trois soirs qu'on fait au Casino.»

La tournée

Un dernier regard aux musiciens, juste avant que le rideau s'ouvre. Après La tournée 70s, qui a duré pas moins de cinq ans, Sylvain Cossette se lance dans un autre grand voyage: une cinquantaine de dates sont déjà prévues partout au Québec jusqu'en juin 2019, et ce n'est que le début. «On s'enligne pour un bon deux, trois ans.» Comment envisage-t-il l'idée de repartir sur la route? «Je ne l'envisage pas encore ! On s'en reparlera dans quelques semaines...» Ce qui est certain, c'est que l'équipe s'est davantage préparée. «Avec les 70s, on est montés dans un TGV qui roulait à 500 km à l'heure et on n'était plus capables de l'arrêter, explique Sylvain Cossette. Là, on est encore dans un TGV, mais avec des arrêts. » Elisabeth Cossette - sa fille et productrice - confirme: «C'est une des premières décisions qu'on a prises quand on a parti la machine: on s'est assurés qu'il y ait des pauses.» Son père se souvient: «Il y avait des fois où on faisait 21 shows en 26 jours... C'était ridicule. Là, on va faire en moyenne deux, trois spectacles par semaine, parce que pour un gars de 55 ans, qui n'a toujours pas mué, c'est beaucoup d'énergie vocale. J'essaie de baisser, je pourrais dire que ça marche quand même à 80 %, mais je ne suis pas capable.»

Le spectacle

Le spectacle commence et nous voilà partis pour une représentation de près de 90 minutes sans entracte. Le chanteur enchaîne les grands succès des années 80, de Sunglasses at Night de Corey Hart à Every Breath You Take de The Police, au grand plaisir d'une foule composée majoritairement de quadragénaires et de quinquagénaires qui chantent les paroles de toutes les chansons. Si l'interprète ressort quelques pièces qu'on aurait préféré oublier - I Just Died in Your Arms Tonight de Cutting Crew -, d'autres dont on ne se souvenait pas - qui donc chantait Kyrie? Mr. Mister? Qui ça? -, et que le medley de chansons d'amour est particulièrement sirupeux (Lady in Red, Careless Whisper et autres Hello), on constate que la majorité des chansons ont tenu la route depuis 30 ans - Everybody Wants to Rule the World de Tears for Fears, We Can Dance de Men Without Hats, Sledgehammer de Peter Gabriel, Money for Nothing de Dire Straits, pour ne nommer que celles-là.

La voix

Au-delà du choix des chansons, c'est la performance vocale de Sylvain Cossette qui jette par terre. L'interprète chante comme il respire, avec une facilité déconcertante, et va chercher les notes hautes sans jamais avoir l'air de forcer. Les morceaux de bravoure se succèdent, particulièrement dans la dernière partie, où il enfile les mégasuccès: Africa, Shout, Hungry Like the Wolf, Maniac, Take on Me, Rebel Yell... pour terminer avec deux pièces de U2, Where the Streets Have No Name et Sunday Bloody Sunday, pas plus faciles à livrer que les autres. Le public, lui, y va de «Oh!» et de «Ah!» bien sonores à chaque début de chanson. Et même si en ce soir de première les spectateurs ne se sont pas levés aussi facilement que Sylvain Cossette l'espérait - «Les chaises ne sont que des accessoires, ce soir», a-t-il lancé en début de spectacle -, cette nouvelle tournée risque de faire danser les foules et de plaire au public autant que la précédente.