Après avoir chanté au National en octobre, Jain est déjà de retour à Montréal. La chanteuse montera sur la scène du Corona demain dans le cadre d'une tournée américaine qui l'a notamment menée à South By Southwest. Entrevue avec une artiste inclassable, qui a remporté en février le Victoire de l'artiste féminine de l'année en France.

Jain (prononcez « Jane ») n'a jamais rêvé d'être chanteuse : elle voulait plutôt devenir graphiste et travailler dans le monde de l'art. Mais au fil des mutations professionnelles de son père, employé d'une société pétrolière, la jeune femme a forgé son identité musicale.

À 9 ans, elle se met aux percussions arabes à Dubaï. Trois ans plus tard, c'est à Pointe-Noire, au Congo, qu'elle découvre l'afrobeat et commence à créer ses propres titres grâce à un logiciel auquel l'initie un beatmaker congolais.

« C'est là que j'ai écrit Come. Grâce à ce titre, que j'avais mis sur MySpace, j'ai rencontré toute mon équipe actuelle », explique Jain, qui a appris seule sur YouTube à s'accompagner à la guitare.

Jain sort en 2015 Zanaka (« enfant » en malgache), un premier album qui relie musicalement l'Amérique, l'Afrique et l'Europe et qu'elle aura mis six ans à peaufiner.

« Mon manager m'a fait rencontrer Maxim Nucci [mieux connu sous le nom de scène Yodelice] et il a tout de suite voulu qu'on entre en studio. Mais j'étais assez jeune et je n'étais pas prête à abandonner le graphisme. Je suis seulement revenue le voir quand j'ai eu 22 ans, que j'avais plus de chansons et surtout, plus confiance en moi. J'adore prendre mon temps pour être plus réfléchie », confie la jeune femme.

Buzz aux États-Unis

Alors que tous les titres de son album sont en anglais, Jain n'exclut pas de s'essayer dans la langue de Molière. « Quand j'ai commencé à écrire, j'habitais à l'étranger et j'avais des amis qui ne parlaient pas français. Je voulais que tout le monde comprenne ce que je chantais. Alors, c'était naturel. Mais j'aimerais me lancer le défi de le faire un de ces jours », précise Jain.

En pleine tournée américaine, la Toulousaine d'origine était de passage sur le plateau du Late Show de Stephen Colbert en février dernier et a également participé au festival South By Southwest.

« Il y a pas mal de curiosité [aux États-Unis], mais je ne me mets pas trop de pression. J'ai envie d'en profiter. »

L'auteure-compositrice et interprète compte profiter de sa performance à Montréal demain soir au Corona pour charmer de nouveaux fans. « Je viens sans mes musiciens, mais j'espère revenir avec eux la prochaine fois », dit-elle.

L'importance de l'image

Bien qu'elle ait mis de côté sa carrière de graphiste pour se consacrer à la musique, Jain accorde une importance toute particulière à l'esthétique et à l'imagerie, sur scène comme dans ses vidéoclips.

« J'ai toujours été attirée par l'art, par l'image. Quand je suis rentrée à Paris à 18 ans, j'étais en prépa en art à l'Atelier de Sèvres. J'ai eu le temps, pendant cette année-là, de réfléchir à ce que je voulais montrer avec ma musique, trouver la bonne image qui allait avec ma musique... J'ai travaillé avec les bonnes personnes, notamment Greg et Lio, qui ont réalisé les clips de Makeba et Come », explique Jain, qui utilise dans ces vidéoclips des références à Magritte, Basquiat ou André Breton.

La chanteuse n'a pas non plus adopté la petite robe noire et le col Claudine comme tenue de scène par hasard. « C'était important d'avoir un uniforme, une sorte de rituel. On est tombé sur cette robe d'agnès b. et je trouvais intéressant que son style soit si décalé avec ma musique et qu'elle rappelle ce contraste en étant noir et blanc. Je voulais que les gens soient surpris », se souvient Jain, qui entrera en studio cet automne pour concocter un nouvel album.

« Je ne me donne aucune limite. J'écoute de tout, mais surtout le dernier album de The Weeknd. J'ai grandi en écoutant autant du Janis Joplin que du Bashung ou encore Pink Floyd. Je me dis que si un jour je veux faire un titre de hard rock, je le ferai ! », conclut-elle en riant.

Au Corona mardi soir