Comment ils sont entrés dans un groupe. Comment ils en sont sortis.

Ça a commencé avec une audition pour un jingle. Ça s'est fini dans une atmosphère «un peu pourrie».

Salut...

«En 1974, le premier album d'Harmonium tournait beaucoup à la radio, mais je ne connaissais pas les gars. Je venais de Saint-Roch-de-l'Achigan. Je sortais complètement d'une autre gang. J'étais plutôt dans la musique progressive qui venait d'Angleterre.

«J'avais été depuis 1971 dans le groupe Nécessité, qui avait fait la première partie de Gentle Giant. Mais là, j'étais libre et j'étais l'heureux propriétaire d'un mellotron que j'étais allé acheter à Londres. De fil en aiguille, on m'a appelé pour faire des shows avec Catherine Lara, Donald Lautrec et plein de séances en studio.

«Un jour, le gérant d'Harmonium, Yves Ladouceur, me propose de venir jouer avec Harmonium sur une musique que le groupe voulait proposer pour une publicité. Ils ne prenaient pas ça très au sérieux. Mais après la séance, les gars m'ont dit qu'ils étaient intéressés à m'avoir comme claviériste. Je suis allé les voir jouer dans un parc à Hull et je suis embarqué tout de suite après.

«On a répété chez Serge Fiori à Outremont. En un après-midi, j'ai appris toutes les tounes du show, en plus des tounes qu'ils étaient en train d'écrire pour leur prochain album! J'aimais l'atmosphère, la musique. J'ai apporté mes couleurs sur l'album Les cinq saisons: les arrangements, le piano sur Histoire sans paroles. On s'est amusés pas mal. J'avais 23 ans et je ne pensais jamais m'embarquer dans une aventure de cette ampleur.»

Bye!

«Je suis resté environ quatre ans dans Harmonium. J'ai participé à l'enregistrement de L'heptade et de L'heptade en tournée. J'ai eu beaucoup de contributions au chapitre de la composition, et Serge [Fiori] me donnait de plus en plus de place sur scène.

«Mais à un moment donné, il y avait moins de magie. Serge déprimait de plus en plus et il fallait toujours le ramasser pour faire un show. L'atmosphère était rendue un peu pourrie; je n'aimais pas ça du tout. Ça devenait tellement gros, cette affaire-là, qu'on avait l'impression de perdre le contrôle de notre destinée. Il y avait beaucoup d'intérêt et de tractations autour du groupe; il y avait de plus en plus de monde qui rentrait là-dedans. Même si on nous demandait notre opinion, c'était un peu par politesse et ça ne s'en allait pas nécessairement dans la direction qu'on aurait voulu.

«Après le show de Vancouver, j'ai décidé de débarquer. J'ai dit au groupe: "Je fais la tournée en Europe avec Supertramp, mais après ça, je sors." Ça les a ébranlés, mais j'ai l'impression que Serge pressentait que toute cette histoire était pour foirer à un moment donné. C'est sûr que je partais en pleine gloire, mais je ne trouvais pas que la gloire était intéressante. Il y avait une fatigue.

«Aucun regret, cela dit. Avec Harmonium, les salles étaient pleines. On roulait en Cadillac. On nous déroulait le tapis rouge. Ce qui était le fun, c'est qu'on allait au bout de nos idées. Musicalement, on sentait qu'on n'avait pas de limites. On a travaillé très fort. Pour moi, c'est un rêve qui s'est réalisé.»

Toujours vivant!

Après Harmonium, Serge Locat a joué avec Louise Forestier, Richard Séguin, Raôul Duguay et Yvon Deschamps. Il a également composé pour des documentaires, entre autres la série Omniscience qui a été diffusée dans 120 pays. «Ç'a été bon pour les finances!», dit-il. En 2004, faute de contrats, le claviériste s'est recyclé un moment dans la construction. Il vit toujours à Saint-Roch-de-l'Achigan et a repris la musique il y a deux ans, avec les groupes Québec Muse, qui reprend de la musique québécoise des années 70, et Millésimes, qui se spécialise dans les reprises de pièces progressives et qui reprend des pièces d'Harmonium. Millésimes se produira le 18 novembre è la Maison Antoine-Lacombe de Joliette.

* Une chronique librement inspirée du magazine Mojo