Renaud «le Phénix» revient! La voix n'est plus aussi claire mais le chanteur français, requinqué, débarrassé de ses démons et même réconcilié avec les «flics», livre vendredi son premier album avec des chansons originales depuis dix ans.

«J'ai du mal à contenir mon impatience», a-t-il récemment confié sur les réseaux sociaux, en dévoilant à ses fans tout aussi impatients, la liste des «13 chansons (et peut-être une de plus)» de cet album sans titre dont la pochette montre le «chanteur énervant» de 63 ans torse nu, les bras tatoués.

Il y a un an, ce retour paraissait hautement improbable. Le chanteur se tenait loin des studios, en proie à ses tourments intimes et aux excès de boisson, muet malgré une «Renaudmania» grandissante née du succès rencontré par deux albums de reprises en 2014.

Et puis les choses s'accélèrent: le slameur Grand Corps Malade le convainc au printemps 2015 de reprendre la plume pour son album collectif, Il nous restera ça.

Renaud écrit puis enregistre un texte adressé à son fils de 9 ans, Malone, baptisé Ta batterie. «Moi je ne fais plus beaucoup de bruit/Tu l'as remarqué déjà/Oublie tous les vautours/Ton papa est bien là», y murmure le chanteur dans cette chanson reprise dans son nouvel album.

Ce texte en appelle d'autres, l'inspiration que Renaud pensait asséchée revient au galop.

À la rentrée, il s'installe dans les studios ICP, à Bruxelles, en compagnie du guitariste Michaël Ohayon, chargé des arrangements. Ce dernier signe la majorité des musiques, les autres étant l'oeuvre du chanteur Renan Luce, gendre de Renaud (pour trois d'entre elles), de Jean-Pierre Buccolo et d'Alain Lanty.

Rapidement, Renaud constate toutefois que sa voix, usée par ses «années sombres», ne suit pas. Il fait alors un examen complet dans une clinique: «Tout était nickel sauf un taux de potassium si bas que, du jour au lendemain, je pouvais mourir d'un malaise cardiaque, m'a expliqué le médecin», raconte «le Phénix» dans Causette.

Tournée à l'automne

«Puis j'ai rencontré un addictologue formidable et j'ai arrêté l'alcool. D'un coup net, c'était le 21 septembre», ajoute Renaud, qui affiche depuis son envie d'en découdre, comme en témoigne la chanson Toujours debout sortie fin janvier.

«J'suis retapé, remis sur pieds/Droit sur mes guibolles, ressuscité», clame-t-il dans ce titre-manifeste en réponse aux «trous du cul» ou aux «enfoirés» qui ont voulu «l'enterrer» trop vite.

Cette chanson a mis du baume au coeur de ses fans mais son ton offensif en a inquiété certains quant à sa capacité à renouer avec le second degré et l'humour, ses marques de fabrique.

De fait, Renaud laisse plutôt percer sa nostalgie dans son album hanté par des disparus, les victimes des attentats de janvier 2015, à Charlie Hebdo, hebdomadaire où il a repris récemment sa place de chroniqueur, et dans le magasin Hyper Cacher (17 morts au total).

Avec l'efficace J'ai embrassé un flic, inspiré par la marche républicaine après les attentats, et la respectueuse Hyper Cacher, Renaud tente ainsi de se réconcilier avec ces «flics» qu'il a tant fustigés par le passé mais aussi avec la communauté juive, «qui m'a un peu maltraité pour mon engagement propalestinien», comme il l'a confié dans le magazine L'Express.

Autres disparus dont il se souvient: l'humoriste Coluche, son copain mort il y a 30 ans, et le chanteur Georges Brassens, qu'il cite deux fois, notamment dans une belle ballade consacrée au réconfort que procure l'écriture (Les mots).

S'il laisse percer ailleurs son désarroi face au temps qui passe (La vie est moche et c'est trop court, Mon anniv'), Renaud chante aussi pour ses proches, son fils Malone (Petit bonhomme) et sa petite fille Heloïse (Héloïse), comme il l'a fait depuis ses débuts pour sa femme (Ma gonzesse) ou sa fille (Morgane de toi).

La sortie de l'album sera précédée, mercredi, de la parution d'un recueil de ses chroniques écrites dans Charlie Hebdo dans les années 1990 (Éditions Hélium).

Après être apparu récemment sur plusieurs concerts du groupe corse I Muvrini, Renaud lancera sa propre tournée en octobre.