Montréal n'a pas vu le Bowie des débuts ni Ziggy Stardust, son célèbre personnage androgyne, porte-étendard du glam-rock. Mais, en près de 30 ans, Bowie a donné chez nous 9 spectacles forts différents, fidèle en cela à l'artiste qui refusait de faire du surplace.

14 juin 1974 au Forum: tournée Diamond Dogs

On attend le rockeur de Rebel Rebel, mais Bowie est déjà ailleurs. Tiré à quatre épingles, il s'entoure de cuivres et annonce le virage blue-eyed soul de Young Americans. Un show spectaculaire, avec des gadgets visuels, une pièce de théâtre rock avec un début, une fin... mais pas de rappel.

25 février 1976 au Forum: tournée Station to Station

Bowie vient de lancer le magistral Station to Station, dans lequel il est à la fois funky, pop, prog-rock et crooner. Devenu le Thin White Duke, il annonce sa nouvelle identité d'esthète un brin intello: un spectacle noir et blanc, visuellement dépouillé, précédé de la projection du Chien andalou de Buñuel.

3 mai 1978 au Forum: tournée Heros

Après avoir trouvé refuge dans l'anonymat salutaire de Berlin avec son pote Iggy Pop et ses complices Brian Eno et Tony Visconti, Bowie donne un show axé sur ses expériences technos allemandes. Les longues suites planantes dominent, mais Bowie puise tout de même dans sa période Ziggy Stardust.

12 et 13 juillet 1983 au Forum: tournée Serious Moonlight

Le Bowie devenu superstar grâce à Let's Dance remplit le Forum deux soirs d'affilée avec un show propre, bien monté, «straight» peut-être, mais qui fait plutôt bien le tour de sa carrière. C'est également le début d'une longue panne d'inspiration pendant laquelle Bowie donnera l'impression de surfer sur sa gloire passée.

30 août 1987 au Stade olympique: tournée Glass Spider

Bowie tente sans succès de dompter le monstre de béton de l'avenue Pierre-de-Coubertin avec une inoffensive araignée géante. Ce show trempé dans la démesure est de loin le moins réussi qu'il ait donné à Montréal, mais il trônera tout de même au sommet du box-office nord-américain.

6 mars 1990 au Forum: tournée Sound+Vision

Pour ce spectacle-bilan créé à Québec deux jours plus tôt, Bowie recrute le chorégraphe montréalais Édouard Lock et les danseurs Louise Lecavalier et Donald Weikert. En plus d'électriser le public, Lecavalier semble stimuler Bowie, qui déborde d'énergie et transcende son personnage tout en maîtrise. On en oublie le son brouillon.

1er et 2 décembre 1991 à La Brique: tournée Tin Machine

Bowie convie quelques centaines de fans privilégiés dans un club digne du Londres des années 60. Ayant peut-être humé les premiers effluves du grunge, il fait table rase de son passé avec le rock pesant et la distorsion de Tin Machine dont on s'accommode mieux grâce à la présence de l'idole.

24 et 25 septembre 1997 au Métropolis: tournée Earthling

«C'est l'un des meilleurs shows rock que tu vas voir cette année», nous avait dit Bowie au téléphone. Et pour cause: avec le guitariste Reeves Gabrels et le piano jazzé de Mike Garson, Bowie met en valeur ses chansons électros récentes, mais aussi des choses qu'il n'avait pas jouées depuis longtemps comme Quicksand.

13 décembre 2003 au Centre Bell: tournée Reality

Le dernier concert montréalais de Bowie sera un grand cru, avec des versions fidèles de ses classiques dont All the Young Dudes et la trop rare Five Years. L'année suivante, il ressent un malaise pendant un concert en Allemagne et doit subir une angioplastie. Jamais plus il ne se donnera en spectacle.

Bowie incognito

Bowie a dansé dans une disco, rue Stanley, après un show au Forum, a joué des claviers dans la pénombre pour Iggy Pop à l'auditorium du Plateau en 1977 et a assisté au spectacle de Laurie Anderson au Spectrum en 1984. Mais il ne s'est pas caché pour présenter Adrian Belew au vieux Club Soda en octobre 1989.

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

David Bowie en spectacle au Stade olympique de Montréal le 30 aout 1987.