Pouponnière de pop stars, l'Australie est l'invitée de marque du 60e concours Eurovision de la chanson, rendez-vous annuel du kitsch multiculturel suivi depuis ses débuts avec ferveur dans ce pays de migrants.

Olivia Newton-John, AC/DC, Bee Gees, INXS, Kylie Minogue, Midnight Oil, Gotye: pour le meilleur et pour le pire, l'Australie verse régulièrement son écot à la variété et sa présence samedi en finale de l'Eurovision est vécue comme une juste reconnaissance.

Pour espérer succéder au travesti Conchita Wurst, vainqueur de l'édition 2014, les Australiens aligneront Guy Sebastian, ancien vainqueur du téléréalité Idol Australia.

«Je suis à fond», assure le trentenaire dont les yeux clairs, la barbe de trois jours et les muscles saillants sous de chatoyants tatouages font défaillir les adolescentes.

Malgré l'horaire matinal (la finale commence à 5h dimanche heure locale), des hordes de groupies envahiront partout en Australie cinémas, pubs, discothèques et parcs publics pour suivre sur grand écran la valse des chanteurs à Vienne, où Mozart et Beethoven se firent un nom.

Des milliers de personnes sont par exemple attendues à Federation Square, dans le centre de Melbourne.

Beth Bicknell invite tous les ans chez elle une quarantaine d'amis, qui ont pour consigne de revêtir le costume traditionnel d'un des pays participants.

«C'est juste une grosse fête. La fête de l'année!», s'anime la jeune femme qui souhaite quand même faire moins de bruit que d'habitude pour mieux profiter de la performance de Guy Sebastian.

D'autres organisent chez eux de douteux «jeux à boire» dont le principe est de se moquer: «Les règles sont très simples: à chaque fois qu'un concurrent a un costume, un accessoire inutile, un instrument à vent ou qu'il y a un feu d'artifice, vous devez boire un verre», explique Tiernan Creagh, un fan qui commente l'événement en direct sur Facebook.

«Une nation d'immigrés»

Bien que plus de 15 000 kilomètres séparent l'Europe de l'Australie, cette compétition a toujours remporté un franc succès auprès des habitants de l'île-continent.

Une popularité due en partie à la diversité de la population, près d'un Australien sur trois étant né à l'étranger, explique Catherine Strong, professeur à l'Université RMIT de Melbourne.

«L'Australie est une nation d'immigrés et tous les pays qui sont représentés à l'Eurovision ont des ressortissants qui vivent en Australie, qui en sont originaires ou qui ont simplement des liens avec l'un ou l'autre de ces pays», décrypte-t-elle pour l'AFP.

«Pour ces gens-là, c'est génial de voir un programme de télévision qui représente leur culture et les endroits pour lesquels ils éprouvent de l'émotion».

Sebastian est lui-même le produit de nombreux mélanges: il est né en Malaisie de parents aux racines srilankaise, portugaise et anglaise.

La chaîne de télévision SBS - qui diffuse toute l'année des émissions à destination des différentes communautés du pays - retransmet l'événement depuis 1983.

L'édition 2014 à Copenhague avait attiré plus de trois millions de téléspectateurs - 15% de la population -, un record d'audience auquel la chanteuse australienne, Jessica Mauboy, qui s'était produite durant l'entracte, n'était pas étrangère.

L'Australie a déjà concouru à l'Eurovision, mais jamais en son nom: en 1974, quatre ans avant Grease, Olivia Newton-John représentait la Grande-Bretagne. Elle avait été battue sans déshonneur par le groupe suédois ABBA.

Pour ne pas désavantager les nations historiques du concours, les Australiens ne pourront pas voter pour leur candidat. Si toutefois Guy Sebastian l'emportait grâce aux suffrages des téléspectateurs européens, l'Australie pourrait représenter un candidat l'an prochain.