Les remises de prix, télévisées ou non, peuvent s'avérer des affaires fastidieuses. Ici, un présentateur qui veut faire son petit comique; là, une lauréate qui se perd en remerciant tout le monde... et sa mère. Quiconque a regardé deux galas dans sa vie ou y a assisté peut mettre des noms sur ces types, surtout en ce Québec où, par personne, il se donne plus de trophées que n'importe où ailleurs dans l'univers connu.

La loi de la moyenne jouant, toutefois, il s'en trouve toujours certains pour sauver la mise - et la soirée. Qui avec une blague ou un mot d'esprit, qui avec une façon originale d'aborder la cérémonie ou ses acteurs.

Mardi soir, la Fondation de la Société professionnelle des auteurs et compositeurs du Québec (SPACQ) remettait ses bourses annuelles, au cours d'une soirée au siège social de la Banque Nationale, l'un des 13 commanditaires de la Fondation qui offrent chacun une bourse de 10 000$.

Certaines institutions de la «grande» culture - orchestres symphoniques, musées, etc. - reçoivent des chèques 100 fois plus gros, mais, dans le milieu de l'art mineur de la chanson et de la «petite» musique, personne n'a réussi à réunir autant de donateurs privés (Bell, Power, Québecor, Cogeco, Productions Feeling, BN, etc.) et de mécènes publics comme Loto-Québec, Hydro et Radio-Canada.

Cette réussite - 1 million de dollars en bourses en neuf ans - est l'oeuvre d'une seule personne: Diane Juster dont la force de persuasion n'a d'égal que le charme qu'elle déploie en appui à ses convictions profondes. Et tous, boursiers autant que commanditaires, reconnaissent l'apport de la cofondatrice de la SPACQ à cette rencontre unique qui réunit à la même table Gilles Vigneault, Karim Ouellet et Louis Vachon, président et chef de la direction de la Banque Nationale.

«Je suis heureux de voir mon nom associé à une carrière en marche», a lancé M. Vigneault qui a raconté comment quelqu'un à Natashquan lui avait demandé combien ça payait d'avoir un prix à son nom... Avec sa bourse, Karim Ouellet va améliorer son studio maison.

Un peu avant, Émile Proulx-Cloutier avait donné le bon ton à la soirée en citant Gilles Vigneault qui nous a semblé en belle forme, par ailleurs. «M. Vigneault a déjà dit: «Dans le temps, on était 15 à faire le métier de chansonnier et 5 à en vivre. Aujourd'hui, ils sont 1500...» Oui, on est 1500, mais il y en a toujours juste 5 qui en vivent...»

Applaudissements pour le jeune auteur-compositeur-interprète qui a l'intelligence du «moment» et l'humour qui va avec. «J'aurais dû demander à Émile d'écrire mon discours», dira ensuite à la blague Alex Nevsky, colauréat avec Proulx-Cloutier de la bourse de la «Scène émergente».

Honorée comme Pionnière, Denise Filiatrault rappellera quant à elle qu'elle a émergé sur la scène des cabarets dans les années 50 et que, devenue directrice de théâtre, elle était prête à «ramasser les miettes» de la SPACQ pour aider son Rideau Vert (qui reconstruit ses bureaux de la rue Gilford).

Lui-même monument national de son plein droit, Robert Charlebois n'en a pas moins fait preuve d'humilité en racontant que, il y a quelques années au Zénith de Paris, il avait fait la première partie du spectacle des Cowboys Fringants, à qui il a remis le prix du rayonnement international.

Depuis huit ans, les Cowboys Fringants remettent de 10 à 15% de leurs cachets à la fondation qui porte leur nom, a d'abord précisé Jérôme Dupras, bassiste du groupe et président de ladite fondation (cowboysfringants.com).

Spécialiste, par ailleurs, de l'économie écologique, ce musicien aux multiples talents est aussi stagiaire postdoctoral au département de biologie de McGill et membre du Cercle scientifique de la Fondation David Suzuki avec qui les Cowboys veulent amasser 3,75 millions de dollars pour planter 375 000 arbres dans l'île de Montréal à l'occasion du 375e anniversaire de la ville.

L'arbre a des impacts positifs multiples sur l'air, l'eau et les sols où il pousse, a aussi expliqué Jérôme Dupras dans les deux minutes au micro qui lui étaient imparties. Pas un mot ou un chiffre de trop. «Chaque arbre coûte 10$. Avec cette bourse, on va planter 1000 arbres. Aidez-nous à planter le reste.»

En mai, 12 000 personnes ont assisté au Centre Bell au concert Un arbre pour tous où les Cowboys avaient réuni Les Trois Accords, Louis-José Houde et Patrick Groulx. Les profits ont permis d'acquérir 42 000 arbres qui seront plantés au cours de 2015.

Avec le chèque de la SPACQ, on est rendu à 43 000... En cette ère de «prise de parole», les Cowboys Fringants roulent à fond sur «la route du 22 avril 2017». Dans la voie des actes, y a moins de trafic...



À l'agenda


Jazz - Les Caméléons du piano, John Roney et Matt Herskowitz, reçoivent la jazzwoman Lorraine Desmarais, lundi à la Chapelle historique du Bon Pasteur, rue Sherbrooke. Comme dit Normand Brathwaite, «va y avoir d'la note là». Grande soirée de piano.

Blues - Le Théâtre de la Ville de Longueuil présente jeudi et vendredi l'un des meilleurs programmes de blues de ces derniers mois. Sur la même affiche: le trio swamp roots MonkeyJunk, le Steve Strongman Band et l'harmoniciste Guy Bélanger vont se retrouver ensemble sur la scène à un moment ou à un autre.