Le 31 mai, Corey Hart soulignera son 52e anniversaire, il montera sur scène au Centre Bell pour un concert dans sa ville d'origine qui, insiste-t-il, sera son dernier, et il lancera ses mémoires, que même son épouse n'a pas encore lus en entier.

Pourtant, si le chanteur sent le poids de tous ces événements majeurs peser sur ses épaules, il l'a peu laissé paraître, lundi, alors qu'il a discuté, à Montréal, de la fin de sa carrière sur scène qui aura duré plus de 30 ans. Hart a parlé avec enthousiasme des répétitions qu'il allait commencer le lendemain, de son spectacle qui inclura 36 chansons séparées en deux actes et de la façon dont il savoure cette chance qu'il aura de pouvoir enfin monter sur scène devant ses quatre enfants.

Dans son livre, il cite le conseil que lui a donné la responsable de programmation Louise Laliberté, qui l'a averti qu'un artiste ne devrait jamais dire qu'un concert sera son dernier, parce qu'on ne sait jamais. Mais Hart est certain de sa décision.

Le chanteur croit que l'avenir lui donnera raison à ce sujet et ajoute qu'il «n'écoute jamais quand les gens lui disent quoi faire».

D'ailleurs, l'un des mots qu'il utilise pour se décrire, plus d'une demi-douzaine de fois pendant l'entrevue, est «têtu».

Comme il l'explique dans l'autobiographie Corey Hart: Chasing the Sun, cet entêtement est ce qui lui a permis d'avoir du succès. Après avoir reçu son diplôme d'une école secondaire de Montréal - avec tout juste les notes de passage, souligne-t-il -, il s'est rendu à New York déterminé à réussir comme auteur-compositeur, refusant de se décourager face à l'indifférence initiale de l'industrie.

Hart semblait pourtant destiné à connaître la célébrité, ayant flirté avec l'industrie alors qu'il n'était encore qu'un enfant. Il a auditionné pour Tom Jones à 10 ans, chanté avec Paul Anka sur un enregistrement à Las Vegas à 11 ans, côtoyé Christopher Cross à 18 ans et enregistré un démo avec le groupe de Billy Joel un an plus tard. Le légendaire guitariste Eric Clapton se fait entendre sur le premier album de Hart, First Offense, lancé alors que le chanteur n'avait pas encore 20 ans.

Bien qu'il ait écrit toutes les paroles de ses chansons, la presse s'était surtout concentrée sur l'apparence du jeune chanteur, un élément que Hart a exploité avec réticence au début de sa carrière avant de devenir frustré par le rejet de sa musique par les critiques.

«J'ai évidemment eu l'impression, quand j'étais dans la vingtaine, que personne ne semblait réaliser que j'étais auteur-compositeur-interprète et que je composais toutes mes chansons, je ne les coécrivais pas. J'étais puriste en ce sens où je voulais que tous mes mots et ma musique viennent de moi», a-t-il expliqué lundi.

«Je n'avais pas l'impression que les critiques prenaient mon travail au sérieux et qu'ils prenaient vraiment la peine de creuser plus profondément dans ce que j'écrivais. Mais je ne leur en tiens aucune rigueur. Peut-être qu'en creusant un peu ils n'auraient pas du tout aimé ça. J'ai donc peut-être été chanceux, vous savez?»

La situation ne s'est pas vraiment améliorée malgré le succès qu'a connu Hart dans ses albums suivants. Son deuxième titre, Boy in the Box, a été plus populaire que son premier - obtenant une certification diamant au Canada - tandis que Fields of Fire, en 1986, a été certifié double platine et Young Man Running (1988) et Bang (1990) ont été certifié platines.

Son album éponyme de 1996 a aussi été certifié platine au pays sans toutefois jamais être lancé aux États-Unis, tout comme l'album qui a suivi, Jade.

L'un des sujets favoris de Hart demeure toutefois sa relation avec la chanteuse québécoise Julie Masse, qu'il a rencontrée en 1993 au gala des Juno. Hart et Masse étaient tous les deux mariés, mais, a-t-il raconté lundi, «l'amour et la puissance des émotions que j'ai ressenties lorsque je l'ai rencontrée, et c'est la même chose pour elle, ont fait en sorte que nous n'avions d'autre choix qu'être ensemble».

Après trois semaines de fréquentations, elle était enceinte. Ils ont aujourd'hui quatre enfants - India, 18 ans, Dante, 16 ans, River, 14 ans, et Rain, 10 ans - et Hart a leurs noms tatoués sur son bicep droit. Julie Masse a abandonné une carrière prometteuse dans la chanson et Hart s'est éloigné de la scène afin qu'ils puissent élever leurs enfants ensemble (en grande partie dans les Bahamas), une décision qu'il ne regrette absolument pas.

«Nous n'avons pas de nounous et nos emplois ne nous permettent pas d'être avec les enfants comme nous le souhaitons, a-t-il expliqué. Pour nous, c'était impossible.»

Sa carrière sur scène se terminera donc avec un dernier spectacle. L'enthousiasme envers ce dernier concert - une nouvelle série de billets vient d'être mise en vente «en raison de la forte demande», selon evenko - réconforte le chanteur. Les fans, note-t-il, n'iront pas au spectacle pour voir un gars «qui a l'air cool avec ses verres fumés» ou qui «était mignon dans son vidéoclip», mais parce que la musique qu'il a écrit «résonne en eux».

Il reconnaît que le succès de ce spectacle à Montréal pourrait créer de la demande dans d'autres villes, mais il demeure convaincu que son concert du 31 mai marquera son départ définitif de l'industrie.

«Un seul me semble spécial et semble être la bonne chose à faire. Un soir. Même si c'est 50 chansons et que je saigne avant de quitter la scène, (...) c'est ce qui le rendra spécial.»

«Je veux que mes fans aient quelque chose de spécial. Et un seul soir, c'est spécial.»