Avec des groupes comme Le Trouble, Heat, Solids et même Half Moon Run, un nouveau son émerge de Montréal. Un son rock avec un rendu mélodique - pour ne pas dire pop -, qui contraste avec l'indie rock des dernières années, axé sur des arrangements alambiqués plutôt que sur des mélodies accrocheuses.

Une nouvelle vague de groupes montréalais concocte des chansons qui hameçonnent l'oreille dès la première écoute sans tomber dans la facilité et la musique formatée.

Difficile de résister au EP Reality Strikes de la formation Le Trouble, qui se produit demain soir à la Casa del Popolo et qui sera au festival Osheaga. De la drogue pour les oreilles. Pas étonnant que le quintette soit sous contrat avec Lava Records (label de Los Angeles qui compte nulle autre que Lorde dans ses rangs); le groupe est également sur le radar de Spin et d'une panoplie de blogues internationaux.

La biographie de la formation ne manque pas d'anecdotes. Son amour pour une jolie demoiselle a amené le chanteur australien Michael Mooney à Montréal.

Un jour, il marchait dans les bureaux du studio Apollo quand il s'est mis à chanter sur un riff accrocheur qui sortait d'une pièce. «J'ai cogné à la porte et je me suis mis à chanter naïvement.»

Son interlocuteur musical, de l'autre côté du mur, était Maxime Veilleux. «Je me suis dit: c'est comme un Rod Stewart, raconte le compositeur et guitariste. Il avait des idées sur ce que je jouais, puis on a finalement décidé de former un band. [...] Il y a quelque chose de magique dans le fait qu'on s'est rencontrés et qu'on se rejoignait à ce point-là.»

C'était en 2012, tout juste avant que le groupe soit complété par Garrett Dougherty, Jesse Gnaedinger et Bao Nguyen.

Les accords de Veilleux qui ont séduit Mooney sont ceux de la chanson Fine Line, et son clip est maintenant en train de séduire la planète rock.

Se casser la tête avec du rock expérimental? Très peu pour Le Trouble, dont la musique pourrait jouer à la radio. Le groupe concocte une recette explosive de rock garage, de fuzz instrumental et de riffs bonbons, portée par le chant puissant et prenant de Michael Mooney. Au karaoké, le chanteur pourrait interpréter avec brio un tube de Rod Stewart, d'INXS ou de Meat Loaf.

«Il y a une sincérité dans la pop que les gens ne voient pas toujours, souligne Maxime Veilleux, qui fait aussi partie du groupe Cheval fou. Ça ne veut pas dire qu'il faut tout calculer non plus. On peut à la fois être très sincère dans l'intention de faire une chanson accrocheuse et prendre des risques dans le format de la pop.»

* * *

Les membres de Le Trouble sont dans la trentaine. Ceci explique peut-être pourquoi ils relèguent le facteur cool au second plan. «On veut juste passer du bon temps, aimer ce qu'on fait et rire ensemble, dit Michael Mooney avec son accent australien. On enregistre tout live sans trop d'ordinateur. On ne veut pas trop se demander pourquoi ça marche si bien musicalement entre nous, de peur de détruire ce que nous avons. J'ai tendance à trop penser, donc Max me dit toujours: ferme-la et prends une bière.»

«On s'obstine plus sur ce qu'on va manger. Sur la route, Michael ramasse toujours les snacks les plus bizarres. Des pastilles Halls et des pickles», lance Maxime Veilleux en riant.

En spectacle demain

Depuis deux ans, le groupe a pris son temps. Il a lancé quelques vidéos dans l'internet et donné quelques spectacles-vitrines. Une équipe se bâtit autour de lui. Julien Aidelbaum (Scène 1425, Loud Lary Ajust) est l'imprésario du groupe depuis l'automne dernier, alors qu'Opak Média (Patrick Watson, The Barr Brothers, Marie-Pierre Arthur) remplit son agenda de spectacles.

«C'est un groupe qui a de fortes chances de rayonner ici autant qu'à l'international avec un mélange de britpop et d'indie très intéressant, structuré autour de compositions solides et matures», dit André Guérette d'Opak Média.

À Los Angeles, Le Trouble a le soutien de Lava Records, mais doit faire ses devoirs. «Il faut faire nos preuves avant que Lava Records lance la grosse machine», dit Maxime Veilleux.

Demain soir, Le Trouble donnera un premier spectacle important à la Casa del Popolo, où a eu lieu notre entrevue. De nouvelles chansons sont au programme.

Maxime et Michael se réjouissent également de faire partie de la programmation d'Osheaga. Ils comptent saluer Lorde, leur collègue de Lava Records.

Prochaine étape: l'enregistrement du premier album officiel, bien que l'EP Reality Strikes n'ait pas fini de conquérir de nouveaux publics. «Les chansons sont pratiquement prêtes.»

Reality Strikes est par ailleurs offert gratuitement sur Soundcloud. À vous de l'écouter.

Heat: aussi à surveiller

Moins avancé dans son cheminement professionnel que Le Trouble, Heat est un autre groupe de Montréal à surveiller. Il donne dans le rock aux refrains rassembleurs dans la lignée du Velvet Underground, The Strokes, The Jesus and Mary Chain et Oasis.

Sur sa page Bandcamp, Heat ne s'en cache pas: il s'ennuie du bon vieux temps du «rock'n'roll radio».

Heat vient d'enregistrer cinq chansons en studio avec le réalisateur Adrian Popovich (We Are Wolves, The Dears, Sam Roberts). «Ils sont vraiment influencés par le son pop du UK et de New York et par l'époque des labels Rough Trade et Creation Records», explique Michael Bardier de l'agence Heavy Trip, qui s'occupe également du groupe Solids.

«J'ai repéré Heat à Pop Montréal en 2013 par l'entremise de Dan Seligman [directeur artistique du festival] qui me suggérait fortement d'aller voir ce band, raconte Michael Bardier. On est en mode séduction et en train de trouver les bons partenaires.»

Heat a donné plusieurs spectacles au cours des derniers mois, notamment en première partie de We Are Wolves, Each Other, Duchess Says et Real Estate.

Le groupe est composé de Susil Sharma (chant), Matthew Fiorentino (guitare), Jess Sherritt (guitare), Matthew Perri (basse) et Charles Neufeld (batterie).

Son premier EP sortira au printemps ou à l'automne.

Coca-Cola recrute un groupe montréalais

Dear Frederic est le projet de Charles F. Huot, ex-membre du groupe Winter Gloves. Choisie par Coca-Cola pour sa campagne de marketing mondiale, sa chanson Outlast pourrait devenir l'un des tubes pop de l'été.

Il s'agit du premier extrait d'un EP qui sera lancé le 23 avril à la Casa del Popolo et qui sortira sous un nouveau label baptisé Cult Nation.

Dear Frederic, complété par le batteur Julien Blais et le multi-instrumentiste Danny Lutz, se produira également au festival Osheaga. Le groupe plaira aux amateurs de synth-pop dansante et ensoleillée dans la lignée de Foster The People.