Claudette Lafrenière n'avait jamais osé chanter. En fait, si. Jeune fille, elle aimait pousser la note, mais sa mère lui a rapidement fermé le clapet. Soixante-dix ans plus tard, elle est fière de défier son autorité.

«Ma mère chantait et elle ne voulait pas que je chante, car elle disait que je faussais. Mes soeurs pouvaient chanter, mais pas moi. Oui, ce n'est pas très gentil, mais ma mère est au ciel maintenant et je lui pardonne complètement», dit en souriant Claudette Lafrenière.

Sauf pour bercer ses enfants, la retraitée n'avait jamais osé défier l'autorité de sa mère. Et puis, sur un coup de tête, elle a tenté sa chance aux auditions Jeune de choeur, une chorale pour les 70 ans et plus. Elle y a interprété À la claire fontaine, «une des seules chansons que je connaissais, parce que je la fredonnais à mes enfants».

«Je ne sais pas trop pourquoi j'ai fait l'audition. Mais, pour moi, c'est important d'avoir des projets dans la vie. Il faut aussi se faire confiance. C'est sûr que si je n'avais pas eu confiance en moi, je n'aurais pas émis un son. Je serais restée à l'endroit où j'étais», dit celle qui est ravie d'avoir été choisie par la chef de choeur, Marylène Cousineau.

Sortir du cadre

Depuis plus de deux ans, Jeune de choeur charme le public: «Tout de suite, les gens nous ont aimés. Je pense qu'on brise un modèle où les personnes âgées sont dans un petit cadre et doivent y rester», continue la femme de 78 ans, qui voyage partout dans le monde avec son sac à dos.

Dans leur spectacle, les chanteurs surprennent aussi par leur répertoire. Pas d'Aznavour, de Félix ou de Vigneault, mais du Trois Accords, du Moffatt et du Bélanger. Claudette Lafrenière interprète l'émouvante chanson d'Ingrid St-Pierre, Ficelles, qui parle des conséquences de la maladie d'Alzheimer.

À la répétition de leur spectacle, l'équipe de La Presse a versé quelques larmes lors de cette interprétation: «Les premières fois que je l'ai faite seule à la maison, moi aussi j'ai pleuré», dit Claudette Lafrenière pour réconforter la vidéaste, le photographe et la journaliste.

Dans les prochains mois, les 17 membres de Jeune de choeur visiteront plusieurs villes de la province (ils seront à la Cinquième Salle de la Place des Arts les 14 et 15 mars).

«C'est reconnu que le chant fait du bien au corps et à l'âme», souligne Claudette Lafrenière, qui espère que le public sera au rendez-vous pour applaudir cette troupe inhabituelle, et qu'elle donnera envie à d'autres «petits vieux» de chanter haut et fort.