Avec son très attendu quatrième album, dont la sortie mondiale est prévue la semaine prochaine, le duo français Daft Punk rend hommage aux grands albums de la période disco-funk en franchissant pour la première fois la porte d'un studio en compagnie d'une pléiade de musiciens prestigieux.

Le disque, le premier depuis Human After All (2005), sera mis en vente lundi en France et d'ici à mercredi dans le reste du monde (mardi aux Etats-Unis et le lendemain au Japon par exemple).

Malgré un luxe de précautions, l'album, sur lequel ils ont commencé à travailler en 2008, a déjà été l'objet de fuites sur l'internet et a été mis à disposition gratuitement en streaming.

Son titre, Random Access Memories, fait référence à la mémoire vive des ordinateurs, mais aussi à la mémoire musicale dans laquelle Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo sont allés puiser la substance du disque.

«La nouveauté, c'était de se dire: «Pour la première fois, on va aller dans un studio d'enregistrement». C'est notre premier album studio, jusque-là on avait toujours fait notre musique à la maison», ont-ils raconté à Rock & Folk.

À rebours du son qu'ils ont contribué à modeler au moment de la French Touch, ce long album de 74 minutes et 13 morceaux a donc été enregistré avec de vrais instruments.

Si les vocoders et les synthétiseurs sont toujours omniprésents, les boucles ont largement été écartées comme les samples (un seul a été utilisé).

«On est dans une époque où la musique est faite sur des ordinateurs portables. C'était l'idée de se dire: quelque chose est en train de se perdre. Allons en studio, entrons en contact avec nos idoles, ces musiciens qui nous ont façonnés en tant que personne», ont-ils déclaré, ajoutant être «partis d'albums magiques, comme ceux de Quincy Jones pour Michael Jackson».

Respect du groove

Sur le site internet du duo, tous ces musiciens évoquent la volonté des deux Français cachés derrière leurs masques de robots de se replonger dans un âge d'or de la musique.

«J'ai eu l'impression de travailler avec mes contemporains, des gens qui ont grandi avec moi et qui ressentent les mêmes vibrations que nous à l'époque. Ils sont revenus en arrière pour aller de l'avant», dit le guitariste de Chic Nile Rodgers, qui marque de son inimitable ligne funky plusieurs chansons de l'album.

«Des deux côtés de l'Atlantique, nous étions dans le même état d'esprit: revenir à ce temps magique où la musique et l'aspect vivant de la musique était ce qui émouvait le gens. Aujourd'hui les gens ont perdu le respect du groove», ajoute le producteur américain Pharrell Williams, qui chante sur deux titres.

Au centre du disque, le duo a invité un de ses maîtres, le producteur Giorgio Moroder.

Pendant 9 minutes, le producteur de Love to love you baby et I feel love raconte sa vie et sa conception de la musique, dans un discours qui pourrait être un miroir de la philosophie de Daft Punk: «Je voulais faire un album avec le son des années 50, des années 60, des années 70 et avec le son du futur».

Autre influence, l'Américain Paul Williams, compositeur de la bande-originale Phanthom of the Paradise (l'histoire d'un compositeur masqué mise en scène par Brian de Palma), est au coeur de Touch, le deuxième morceau-fleuve du disque et un des plus réussis.

Le chanteur de Strokes Julian Casablancas, le pianiste Gonzales et Panda Bear, un des membres d'Animal Collective, complètent le casting de cet album mélancolique et joyeux, alternant titres efficaces et morceaux plus expérimentaux, séduisant sans être novateur.