Dans les dernières semaines, plusieurs journalistes de différents médias ont reçu des messages anonymes faits de lettres de journal découpées et collées. Le premier ne contenait que ce mot: «Minable». Le second disait: «Je n'arrêterai pas.» Il appert que ces messages, qui ont donné la frousse à certains journalistes, avaient pour but de faire la promotion du nouvel album de la chanteuse Anik Jean.

Dans les faits, Minable est le titre du premier extrait du nouvel album d'Anik Jean, Schizophrène, qui sera lancé le 26 février.

Hier, plusieurs personnes visées par la campagne de promotion ont dénoncé le «mauvais goût» de l'opération. Le journaliste Sylvain Cormier, du Devoir, a même alerté la Sûreté du Québec tant ces lettres anonymes l'ont inquiété. Il a ensuite écrit sur Facebook: «Je rappelle mon engagement (pris en cette page Facebook) envers l'artiste responsable de cette campagne de promo irresponsable et, pour plusieurs, passablement angoissante: pas de critique du disque, pas d'entrevue, pas de critique du spectacle, rien. Plus jamais rien. Fini.»

Au départ, certains journalistes ont cru qu'ils étaient personnellement menacés par un individu dangereux. En décembre dernier, Catherine Perron, du magazine Châtelaine, a été soulagée d'apprendre qu'elle n'était pas la seule victime. «Si c'est un coup de relations publiques, je trouve que c'est d'un goût un peu douteux», nous avait-elle écrit par courriel.

Hier, les médias ont reçu un communiqué de presse de la part de l'équipe d'Anik Jean qui explique que la campagne des lettres anonymes était «un moyen d'illustrer ce que peuvent ressentir les personnes victimes d'intimidation». Le communiqué indique que «l'opération des lettres anonymes a réussi, puisque les journalistes ont propagé les effets qu'avait sur eux l'intimidation dans les réseaux sociaux».

Sur ces réseaux, hier, plusieurs journalistes ont plutôt remis en question «l'éthique» de l'opération. Nicolas Lemieux, président de Sphère Musique et imprésario de la chanteuse, croit néanmoins que la campagne a atteint sa cible. «Ce n'est pas de mauvais goût, a-t-il dit à La Presse. Il faut savoir que la chanson Minable dénonce l'intimidation, donc la campagne a fonctionné.»

Anik Jean n'en est pas à son premier malentendu avec les journalistes. En 2010, elle avait soulevé la controverse en réagissant à une critique du chroniqueur de La Presse Marc Cassivi, qui avait jugé sévèrement le film Filière 13, réalisé par Patrick Huard, son mari. «Dans la vie, il y a des junkies, des tueurs en série, des gens qui violent du monde et des journalistes caves», avait dit la chanteuse à un journaliste de Canoë lors de la première du film.