Si vous êtes amenés à parcourir les Alpes autrichiennes autour de la région de Salzbourg, ne soyez pas étonnés d'entendre «Hol-la ra-e ho-e he!»: le chant tyrolien (jodl) est de nouveau à la mode et des cours sont donnés aux promeneurs.

Au coeur des pâturages verts et avec pour décor les cimes enneigées des Alpes, immortalisées par Julie Andrews dans La mélodie du bonheur (1965), un parcours de marche pour apprendre le «jodl» - une première mondiale - est proposé aux touristes depuis août dernier.

Deux cors des Alpes géants, une immense cloche de vache et d'autres accessoires sont disposés sur les étapes du parcours, toutes situées aux alentours de 2000 m d'altitude.

Les paroles n'ont souvent pas de sens («Hops ho-da re-i-ri,» «ho-da ria drai dul-i-jo,» «hul-jo-i diri diri»), mais la maîtrise des vocalises, qui varient constamment entre intonations aiguës et graves - un peu comme pour le cri poussé par Tarzan - nécessite une initiation.

Avec des vaches pour principal public, les apprentis «jodleurs» ne doivent pas craindre le ridicule en poussant certains sons.

«Je suis fascinée, vraiment excitée. C'est super que cela existe», s'enthousiasme Astrid Berchtaler, vêtue d'une «Lederhose», une culotte de peau et habit traditionnel des Tyroliens, et d'une blouse à carreaux rouges. «J'ai toujours cru que le jodl était réservé à une petite poignée de personnes», explique la nutritionniste, qui a parcouru près de 200 km pour rejoindre l'atelier d'une journée afin d'apprendre à jodler.

L'idée de proposer ce «Jodl Wanderweg» vient de Christian Eder, qui dirige un hôtel dans la région de Salzbourg et qui a appris il y a deux ans les subtilités de ce chant typique des Alpes.

«L'expression de la joie, de l'harmonie et du bonheur»

«J'ai toujours pensé qu'il était plus simple de jodler. Le chant tyrolien est en quelque sorte mythique, peut-être parce qu'il n'est pas très commun, les gens pensent donc que c'est difficile. Mais, notre devise, c'est que tout le monde peut jodler», précise-t-il.

«C'est une bonne idée, le parcours a été conçu pour les jeunes et les personnes âgées, il n'est pas compliqué, vous passez un bel après-midi, avec un temps magnifique», estime Barbara Glaser, institutrice de 31 ans à Mittersill, à une trentaine de kilomètres.

Au départ, le chant tyrolien était utilisé par les bergers dans les Alpes, pour communiquer de montagne en montagne et de vallée en vallée. On le retrouve en Autriche, mais également en Suisse, dans le sud de l'Allemagne et dans le nord de l'Italie.

Pour Hermann Härtel, artiste de musique folklorique et chercheur, qui organise des ateliers de «jodl» depuis les années 1970, il s'agit de «l'expression de la joie, de l'harmonie et du bonheur». Il a constaté ces dernières années un intérêt accru pour le chant tyrolien.

Ses «élèves» ne sont pas seulement autrichiens, il compte également des Français, des Italiens et même des Suédois. De nombreux jeunes viennent également s'inscrire, ne considérant plus le chant tyrolien comme un cliché, mais étant curieux de se replonger dans une vieille tradition.

«C'est un peu un retour aux racines. Le jodl est complètement pur: je dois être moi-même et ça n'a pas besoin d'être correct à 100%», ajoute Christian Eder.

Markus Moser, jeune de 26 ans, se montre dubitatif après sa première expérience: «Je ne dirai pas que c'est impossible. Mais c'est difficile», raconte-il avec le sourire. «C'est quelque chose de complètement différent».

Un des buts des randonnées de jodl, pour toutes les personnes y compris les chanteurs novices, est de sortir de leur réserve et de découvrir leur voix, précise Hermann Härtel. «Jodler est un art unique et tout le monde ne peut pas y arriver, c'est pourquoi, je ne le fais qu'après un ou deux verres de schnaps», conclut Barbara Glaser avec un petit sourire.