La délégation québéco-acadienne présente aux 19es FrancoFolies de Spa - Bernard Adamus, Lisa Leblanc, Jimmy Hunt, Daniel Léger et Chloé Lacasse - ressemble drôlement à une invasion folk québécoise. Tant mieux : le public conquis a ainsi compris que la musique en français est toujours vivante et vivifiante. Et tant pis pour les (nombreux) convertis à la musique anglophone!

«C'est comme dans les bars de La Nouvelle-Orléans!», s'emballait un festivalier, samedi soir, en pleine rue Royale, artère principale de Spa. En cette fin de soirée de fête nationale, la foule compacte massée devant la terrasse du Café de l'Europe bloquait toute circulation. Bernard Adamus et ses trois musiciens y récoltaient les fruits semés lors des quatre concerts offerts au cours des derniers jours. C'est là un des beaux succès obtenus par la délégation québéco-acadienne invitée à ces Francos belges. Désormais, à Spa, tout le monde connaît la rue Ontario.

«On a gagné notre Coupe Stanley!», s'est réjoui Adamus après le concert. Il a donné six concerts en France la semaine dernière, dont un devant des professionnels du milieu aux Francos de La Rochelle. Clairement, après des mois d'écriture et d'enregistrement, le retour à la scène le démangeait.

Deux nouvelles chansons de ce prochain album (intitulé No. 2 et attendu le 26 septembre) s'étaient d'ailleurs ajoutées à son répertoire. Un funk cuivré et langoureux, puis une parfaite ballade rappelant Acapulco, mais en plus folk et en moins chaloupé, intitulée Le scotch goûte le vent.

Coup de foudre pour Lisa Leblanc

L'autre grand succès des Francos fut celui de Lisa Leblanc, qui a craqué pour les Spadois, et réciproquement. Le circuit tout-terrain, l'ampli dans la gravelle des terrasses, de la série Bars en folie était fait pour sa folk et sa gouaille. «C'est un beau retour en arrière, nous a-t-elle confié. Je viens de là, les bars; j'ai chanté pour des gens qui ne me connaissaient pas.»

Fougueuse, naturelle et attentive à son auditoire, Lisa Leblanc a pris racine dans ces terrasses de cafés. L'exotisme de son accent n'a pas manqué de piquer la curiosité des Belges - elle est même allée entonner Ma vie c'est d'la marde à la télé publique francophone!

Si le chansonnier country acadien Daniel Léger a charmé le public avec son parler fleuri, l'épreuve spadoise fut plus ardue pour Chloé Lacasse et Jimmy Hunt.

La première n'a eu qu'un concert extérieur pour se faire connaître, sur une scène légèrement excentrée mais néanmoins achalandée. Quant à Hunt, non seulement le contexte bruyant et volatil des Bars en folie servait mal son folk indé méditatif, le grand maigre a aussi eu un rapport difficile avec la foule. Peu bavard, le regard fuyant derrière ses cheveux en bataille, il n'a pu reconnaître son public dans la foule wallonne. Une occasion ratée.

La résistance francophone

En manque de têtes d'affiche fédératrices et malgré d'excellents concerts - Amadou et Mariam, Cali, Konono No.1... -, les 19es FrancoFolies spadoises encaisseront cette année une baisse d'achalandage. L'inquiétude est cependant ailleurs que dans les chiffres du bilan. Elle se trouve sur l'affiche : des Anglais, Charlie Winston et Hugh «Dr. House» Laurie (il chante le blues...), invités à chanter en anglais, une langue qui s'immisce dans l'affiche à cause des artistes wallons et flamands préférant s'exprimer dans la langue de Coldplay pour se comprendre mutuellement. La tendance fait jaser chez les pros et dans les médias...

Il reste heureusement une solide relève franco chez les Belges. Le jeune Antoine Hénault en première partie de Saule. Le Yéti, nouveau projet de l'ex-leader du groupe Melon Galia, chanson rock raffinée côtoyant celle de Bashung et Dominique A. Puis la craquante Mademoiselle Nineteen, look et airs sixties, guitares bien croustillantes, cousine liégeoise des Breastfeeders.

Et le meilleur concert de ces Francos? Celui de La Grande Sophie, qui viendra le présenter au prochain Coup de coeur francophone. Elle offre un tour de chant rafraîchissant alliant rock et électro, comme sur son excellent récent disque, La place du fantôme. C'est prévu pour le 7 novembre, à l'Astral; réservez vos billets, vous ne serez pas déçus.