En entrevue téléphonique comme en spectacle, George Thorogood est toujours le même: franc, direct et drôle. Comment ça va, George? «Bad!», qu'il répond, comme dans Bad To The Bone son classique de 1982 fortement inspiré des Bo Diddley, Willie Dixon, Muddy Waters et autres pionniers du blues auxquels il rend hommage sur son album 2120 South Michigan Ave.

George Thorogood est prévisible, et le public qui retournera l'acclamer au Métropolis le 7 juin ne demande pas mieux. Avec lui, pas de fla-fla. Ses deux plus récents albums sont surtout composés de standards du blues? «Ça n'a pas d'importance, répond-il sans hésitation aucune. Est-ce que ce sont des chansons qui vont plaire à nos fans? Penses-tu vraiment qu'un enfant de 12 ans qui vient à notre show et entend une chanson qu'il aime se préoccupe que je l'aie écrite ou pas?»

Thorogood est encore un peu le ti-cul qui a acheté l'album 12 x 5 des Stones dont il reprend très fidèlement la pièce instrumentale 2120 South Michigan Ave. sur son album du même nom. Ce n'est que plus tard qu'il a découvert que l'adresse en question avait été celle du mythique studio Chess de Chicago, résidence des bluesmen noirs qu'il vénère.

À la fin des années 60, comme Mick Jagger quelques années auparavant, Thorogood a écrit à Chess pour recevoir leur catalogue dont il possédait déjà quelques disques. «J'étais encore un enfant, man, je n'y connaissais rien. J'avais ces super bons disques, mais je ne savais pas si je voulais être Mick Jagger ou Brian Jones. Je voulais comprendre.»

Depuis les années 80, il a visité trois ou quatre fois le bâtiment qui abritait jadis le légendaire studio. «Il y a des photos des Rolling Stones quand ils y ont enregistré leur deuxième disque, reprend Thorogood. Si jamais tu y vas, jette un coup d'oeil à la photo de Bo Diddley avec Billy F. Gibbons (ZZ Top), prise autour de 1966. Tu vas capoter!»

Sur la chanson Going Back, qui lance son dernier album, Thorogood mentionne les Stones dans la foulée des grands bluesmen de Chicago. «Je regarde par-dessus mon épaule et je vois les Rolling Stones, le Paul Butterfield Blues Band et John Hammond qui m'ont tout appris. Je suis donc allé au studio Chess pour voir d'où ça venait: de Chuck Berry et Bo Diddley, les héritiers de Howlin' Wolf et Muddy Waters qui eux-mêmes avaient écouté Robert Johnson. J'ai dit ça va, je m'arrête là», raconte Thorogood en pouffant de rire.

Porter le flambeau

Le guitariste et chanteur américain ne se sent pas nécessairement la responsabilité de porter le flambeau de cette musique, sauf pour deux artistes qui ont inventé le rock: «En spectacle, je commence toujours par une chanson à la Chuck Berry, sinon une chanson de Chuck Berry, et j'enchaîne avec une chanson de Bo Diddley. Bo Diddley n'est plus de ce monde et si je ne jouais pas une de ses chansons, il serait vraiment mort. Lady Gaga ne connaît aucune chanson de Bo Diddley n'est-ce pas? Je me souviens d'un concert en l'an 2000 où j'avais commencé par une chanson de Chuck Berry. J'ai aperçu une fille de 18 ou 19 ans qui dansait comme une folle et je me suis dit: «Chuck Berry vient d'entrer dans le nouveau siècle.»»

En plus du Métropolis, George Thorogood et ses Destroyers vont jouer au Festival des guitares du monde de Rouyn-Noranda, le 31 mai, puis à Ottawa, Sherbrooke et Québec. Leurs fans savent exactement à quoi s'en tenir et c'est fort bien ainsi, juge-t-il.

«Quand tu vois les Three Stooges, tu sais à quoi t'attendre, non? Certaines chansons des Stones ont été faites sur mesure pour que ça sonne comme les Stones: Get Off of My Cloud, Honky Tonk Women, Brown Sugar, tous ceux qui ont entendu ces chansons-là ont craqué parce qu'elles sonnaient comme ce que les Stones avaient joué toute leur vie même si elles étaient nouvelles. C'est le genre d'artiste que j'ai décidé d'être. Je ne veux pas brusquer le public ni même le surprendre. Je veux qu'il se dise: «Voici une autre nouvelle blague... et elle est plus drôle que la dernière»», conclut Thorogood en riant.

George Thorogood et ses Destroyers joueront au Festival des guitares du monde de Rouyn-Noranda, le 31 mai, puis au Métropolis de Montréal, le 7 juin.