Blonde approche les 200 000 exemplaires vendus, Béatrice Martin remplit en tournée des salles de 1500 places, et attirait hier soir 4000 spectateurs au Zénith de Paris. Au milieu d'un concert d'éloges à peu près unanime.

On ne sait pas si ça durera deux ans ou vingt ans de plus, mais pour l'instant, Coeur de pirate confirme en France sa percée spectaculaire de l'automne 2009. Elle poursuit avec une sorte de frénésie tranquille son parcours de star, à raison de cinq ou six spectacles par semaine en France, en Belgique et en Suisse. Même si, après le triomphe de son premier album (500 000 exemplaires en France), les ventes de Blonde sont forcément plus modestes, elle en serait aujourd'hui à 190 000 ventes, ce qui la met dans le peloton de tête des chanteurs français de la nouvelle génération.

Hier soir, c'était le Zénith de Paris. La troisième plus grande salle de la capitale française, après le Stade de France et Bercy. Admettons qu'on avait réduit la capacité de la salle et qu'il y avait quelque 4000 spectateurs pour une capacité de 6500. Cela reste un fort joli succès, car Béatrice Martin avait déjà rempli le Bataclan en décembre et le Casino de Paris en mars.

Comme l'écrit un journaliste français, le public est manifestement «mainstream». On trouve des fillettes de huit ans avec leurs parents, des couples dans la vingtaine, mais aussi des quinquagénaires. Il y a dans sa musique suffisamment de rock style années 60 - et des basses à faire sauter les pacemakers - pour plaire aux jeunes, et faire croire aux quinquas qu'ils sont dans le coup. Mais, de toute évidence, la majorité des spectateurs est là pour ce qui fait la marque de commerce de Coeur de pirate: de très jolies mélodies qui plaisent à la première note, des textes doux-amers, poétiques et désenchantés.

En début de spectacle, elle attaque avec deux ou trois morceaux rythmés, et les gens applaudissent vigoureusement. Mais dès qu'elle s'installe au piano avec la maestria qu'on lui connaît et renoue avec le style romantique de Comme des enfants ou Pour un infidèle, c'est l'ovation. Au Zénith, hier soir, la foule plébiscitait Place de la République ou Cap Diamant.

Même dans des journaux branchés, on note, comme ici dans Libération, que pour ce second album la chanteuse ait «globalement délaissé la formule intimiste voix-piano pour des compositions sous influence 60's, rock et country». Cependant, comme le conclut le critique, «ce résultat ne perturbera pas les plus mordus du chant enfantin de la Vanessa Paradis d'outre-Atlantique». Même subtil bémol du côté des Inrockuptibles: «Ce que confirme Blonde, c'est surtout le talent d'auteur de Béatrice Martin, toute en ironie.»

Ces nuances dans le compliment ne doivent pas cacher l'essentiel. Lolita superstar à 19 ans en France, Béatrice Martin a pour l'instant brillamment survécu à la gloire. Un deuxième album est toujours une étape risquée, succédant à un immense triomphe. Blonde est sorti en décembre, et semble parti pour atteindre les 250 000 exemplaires. Pour les professionnels du show-biz, c'est plutôt un exploit.

De leur côté, les médias la traitent en vedette de première catégorie. Libé et Les Inrocks, on l'a vu. Mais aussi le Figaro, qui nous révèle que le romancier Jean d'Ormesson est l'un de ses fans les plus ardents. Quant au Parisien, l'un des plus gros tirages quotidiens, il a envoyé un journaliste à Montréal pour l'interviewer, sur deux pages.

En cette fin de tournée française, entre le 4 et le 17 mai, Béatrice n'aura fait rien de moins que 10 salles (de 1200 à 2000 places) dans le nord de la France. Suscitant à chaque étape des articles élogieux dans la presse régionale. Un signe qui ne trompe pas: le mois dernier, elle a fait trois fois les gros titres en Bretagne... pour la seule raison qu'elle annulait sa participation au célèbre Festival Vieilles charrues au mois de juillet. Elle devait se produire aux côtés de The Cure et Bob Dylan, elle ne viendra pas pour cause de grossesse. Ces jours-ci, même les absences de Coeur de pirate font la nouvelle. Une affaire qui roule.