De retour à Montréal, où il a déjà vécu, Greg Lake s'amène au Gesù pour se raconter en chansons après avoir terminé la rédaction de son autobiographie en trois tomes. Retour sur la carrière du chanteur de King Crimson et d'Emerson, Lake and Palmer.

Greg Lake ne s'en cache pas: il aurait préféré faire une tournée mondiale avec Keith Emerson et Carl Palmer avec qui il a donné un concert célébrant le 40e anniversaire du trio le 25 juillet 2011 à Londres. Emerson et Palmer n'étant pas intéressés, c'est tout seul qu'il remonte sur scène pour un concert intime qu'il donnera au Gesù les 12 et 13 avril.

«Je viens de finir d'écrire mon autobiographie qui, sans surprise, s'intitule Lucky Man, raconte Lake au téléphone. Pendant que je l'écrivais, des chansons qui ont été très importantes dans ma vie ont refait surface. Pas seulement des chansons que j'ai écrites, mais des chansons d'autres auteurs qui m'ont influencé ou qui m'ont guidé dans ma carrière. J'ai donc eu l'idée de monter le concert Songs of a Lifetime à partir de cette collection de chansons que je partage avec mon public, celui de King Crimson et ELP. Ça va être un concert interactif parce qu'il y a plein d'histoires liées à ces chansons et que je veux aussi entendre les histoires des spectateurs. Je vous réserve des surprises.»

Lake est arrivé à Montréal jeudi pour répéter ce concert qu'il donnera également à Québec le 11 avril. Il a gardé d'excellents souvenirs de notre ville où il a chanté souvent depuis le premier concert d'ELP à la Place des Nations en août 1971. Même qu'il a habité pendant quatre mois à Westmount quand ELP répétait en prévision de sa tournée avec orchestre symphonique qui s'est arrêtée au Stade olympique en août 1977. Il y retrouve également des amis et un noyau d'admirateurs fidèles - «une famille», dit Lake - avec lesquels Emerson et lui ont échangé au Théâtre Maisonneuve il y a deux ans. Dont des amateurs de rock progressif, un genre mal-aimé depuis la révolution punk de 1976-1977.

Lake, lui, se réclame encore du prog et il a sa petite théorie là-dessus: «Sgt. Pepper a été le premier véritable disque progressif. Jusque-là, presque tous les groupes rock avaient été influencés par la musique américaine: le blues, le gospel, la soul, le country et western... Les Beatles cherchaient quelque chose de nouveau et ils se sont tournés vers la musique européenne (le folk, la musique médiévale, le classique) comme source d'inspiration comme l'ont fait par la suite King Crimson, ELP et Pink Floyd. Malheureusement la musique progressive a eu son lot d'imposteurs. Pour en jouer, il faut vraiment se tourner vers les racines de la musique européenne. C'est ce qui nous a permis de nous distinguer.»

Lucky Man a 13 ans

Greg Lake a grandi dans une famille pauvre de Bournemouth en Angleterre où Robert Fripp était un ami d'enfance. Il dit aujourd'hui qu'il ne s'est jamais senti défavorisé. «À 12 ou 13 ans, je ne désirais que deux choses: un vélo et une guitare, et j'ai eu les deux!» C'est avec cette guitare que sa mère lui a donnée qu'il a composé sa première chanson, Lucky Man, qui est devenue le succès que l'on sait pour ELP. «Quand je l'ai écrite, je ne connaissais que quatre accords. C'était, et c'est encore, une chanson folk très très simple. Mais les plus simples sont les meilleures parce que tu peux les interpréter de tellement de façons différentes.»

Malgré le succès remarquable de l'album In The Court of The Crimson King, Lake a chanté sur le deuxième album de King Crimson. Puis il a quitté le groupe parce que Robert Fripp insistait pour l'appeler King Crimson, même si deux de ses éléments importants, Ian McDonald et Michael Giles, étaient partis. Il s'est vite retrouvé avec le claviériste Keith Emerson, ex-The Nice, et il s'en est fallu de peu pour que Jimi Hendrix se joigne à eux.

«On cherchait un batteur et je connaissais Mitch Mitchell qui ne jouait plus avec Jimi, se souvient Lake. Il a suggéré qu'on recrute Jimi. J'ai dit oui, mais entre-temps, l'imprésario Robert Stigwood nous a présenté Carl Palmer. La chimie était parfaite entre nous trois et peu après, nous avons appris la terrible nouvelle: Jimi était mort. De toute façon, je crois que ça n'aurait pas fonctionné avec deux musiciens virtuoses dans le groupe. Peut-être pour quelques chansons - que j'aurais bien aimé entendre! - mais il y aurait eu un affrontement inévitable. Et puis à trois, c'est plus dynamique: chaque musicien a plus d'espace pour s'exprimer.»

Lake raconte tout ça dans son autobiographie en trois tomes qui sera également disponible en livre audio dont il fera lui-même la lecture. Le premier, consacré à sa jeunesse et à King Crimson, sera en vente au Gesù.

Greg Lake, au Gesù, les 12 et 13 avril.