Le Festival du monde arabe de Montréal démarre demain avec deux artistes américains de l'immigration orientale: Simon Shaheen, d'origine palestinienne, et Omar Faruk Teklibek, né en Turquie. Le premier est un renommé violoniste, oudiste, compositeur et pédagogue alors que le second est multi-instrumentiste et passeur de traditions moyen-orientales.

Manhattan au quart de ton, titre de la soirée d'ouverture du FMA, illustre à la fois la terre d'accueil de ces musiciens et un des fondements de la gamme orientale.

«Lorsque je suis venu aux USA, raconte Simon Shaheen, on n'y connaissait pas la grande musique arabe. La musique orientale était alors associée aux cabarets exotiques, à la danse du ventre. Moi-même, issu d'une riche tradition de musique arabe, j'ai parfait ma formation aux États-Unis et me suis appliqué à en transmettre les fondements tout en m'ouvrant à d'autres grandes musiques. Petit à petit, à travers les classes de maîtres et les concerts, mon public s'est constitué et je peux compter aujourd'hui sur un auditoire nord-américain qui comprend ce langage. Mon premier concert présenté au World Music Institute de New York comptait 30 personnes. Tout récemment, mon ensemble s'est produit à New York devant 1800 personnes. C'est le fruit du travail et de la constance.»

Simon Shaheen parle avec autorité. Voix grave, rhétorique précise, affirmations toujours fondées. Avec un tel interlocuteur, on ne choisit aucune réplique à la légère. Il sait d'où il vient, il sait par où il est passé, il sait ce qu'il fait.

Nous l'avons joint à Boston, où il gagne sa vie en tant que professeur au Berklee School of Music ainsi qu'au New England Conservatory. Il y enseigne le violon, l'oud, dirige des ensembles d'étudiants et plus encore. Ses intérêts de pédagogue couvrent les musiques classiques arabes, perses, turques, mais aussi le jazz contemporain et la pratique de l'improvisation.

En 1980, il s'est établi aux États-Unis afin d'étudier à la Manhattan School of Music et d'y terminer une maîtrise en interprétation; après quoi, il a fait des études de musicologie et d'éducation musicale à l'Université Columbia.

«Ce que je fais, la manière dont j'ai grandi et la manière dont je perçois la musique est une déclaration en soi. J'essaie de transporter cette mémoire vers mes auditeurs et étudiants. J'essaie aussi de faire s'écrouler quelques murs, de créer un environnement d'ouverture. Avec mes musiciens (pour le concert de Montréal: un bassiste et un saxophoniste soprano qui joue également du ney, une flûte traditionnelle de bambou), nous offrons une musique transculturelle aux sonorités, idées, sensibilités et traditions multiples.»

Omar Faruk Teklibek

Simon Shaheen sera précédé par Omar Faruk, avec qui il a souvent collaboré au cours des années 90. Des collaborations sont à prévoir au cours du concert dominical.

Originaire d'Adana, en Turquie, Omar Faruk Teklibek s'est installé aux États-Unis en 1976 où il a fondé une famille - son fils joue d'ailleurs la percussion au sein de son groupe. L'homme vit à Rochester, là où se trouve la deuxième communauté turque aux États-Unis après celle de la ville de New York.

«De manière générale, indique-t-il, mon ensemble joue les musiques orientales, moyen-orientales, turques, arabes ou perses. Nous aimons jouer pour le grand public, mais aussi pour les communautés arméniennes, grecques, juives et arabes, communautés dont les contributions ont enrichi la culture turque sous l'Empire ottoman.»

Omar Faruk se dit très heureux de partager ce programme du FMA avec Simon Shaheen.

«À New York, j'ai travaillé avec lui dans plusieurs contextes, j'ai enregistré avec lui. J'ai énormément de respect pour ce grand musicien de qui j'ai énormément appris. Je m'intéresse à son répertoire, nous avons beaucoup en commun - dont le style traditionnel turc qu'il adore. Pour le concert de Montréal, je souhaite qu'il se joigne à mon ensemble pour quelques pièces, après quoi il se produira avec son trio. Ce sera une vraie célébration, car nous ne nous sommes pas croisés depuis plusieurs années.»

Manhattan au quart de ton, demain, à 20h, au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts.