«L'objectif  n'est pas de sauver le monde mais de faire de la musique!»

Si l'on pige bien Ari Hoenig, assurément l'un des meilleurs batteurs de New York, un musicien ne doit pas se prendre au sérieux dans la vie, ce qui n'empêche en rien de prendre la musique au sérieux. Au bout du fil, le ton est relax, celui d'un musicien de haut niveau mais dont le propos n'a aucune prétention intellectuelle.

Il est question d'une mini-tournée québécoise et de ses participants, point à la ligne.

Ari Hoenig sera flanqué de jeunes pointures recrutées pour le très bel album autoproduit, Lines of Oppression (www.arihoenig.com ): le pianiste arménien Tigran Hamasyan, le guitariste Gilas Hekselman et le contrebassiste Chris Tordini. En juillet 2010, le batteur-leader s'était produit au Gesù sensiblement avec la même formation - alors que cette fois, Matt Penman fait place à Chris Tordini.

On se doute bien que la participation du jeune Tigran, dont le capital de sympathie est l'un des plus plus considérables sur l'entière planète jazz à l'heure actuelle, est une carte maîtresse dans le jeu d'Ari Hoenig.

«Avec lui, révèle-t-il néanmoins, nous n'avons pas vraiment joué la nouvelle matière sur scène; Tigran vit surtout en France depuis un moment, il passe peu de temps à New York, je dois souvent le remplacer par voie de conséquence. Pour l'arrangement de l'album Lines of Oppression dont il sera surtout question dans cette tournée au Québec, cependant, il fut présent sur toute la ligne. Il a créé  l'arrangement du standard How High The Moon que nous interprétons, sans compter l'une de ses compositions originales - Higher to Hayastan.»

Ce nouvel album d'Ari Hoenig n'en demeure pas moins constitué d'une majorité de ses propres compositions. «Pour moi, il est important de jouer mes composition, mais mon propre son ne suffit pas. Si j'invite des musiciens à jouer sur mes enregistrements, c'est parce que leur son est important, unique.  Prenez Gilad et Tigran, il sont parmi les plus forts de la relève mondiale. Enfin, parmi ceux que je connais! J'aime jouer avec des gars, et je n'ai pas hésité à participer à leurs propres albums. Quant à Chris, je l'ai connu en tant qu'enseignant au New School de New York.»

Originaire de Philadelphie, Ari Hoenig a fait ses études supérieures à l'université North Texas, réputée pour sa faculté de musique. Installé à New York depuis les années 90, il est devenu l'un des batteurs les plus sollicités du jazz actuel.  Il mène plusieurs projets, dont un trio avec Gilad et Orlando  Le Fleming et un autre qui le réunit aux Français Jean-Michel Pilc (piano) et François Moutin (contrebasse). Maintes fois sideman, maintes fois leader, Ari Hoenig ne voit aucune incompatibilité entre les deux rôles.

«Cela me semble facile de diriger un ensemble à partir de la batterie, estime-t-il. Dans le jazz, de toute manière, la batterie joue un rôle proéminent. De ma position, je peux aisément décider de la direction   à prendre pendant que les musiciens sont en action. Bien sûr, en plus de composer et choisir les pièces complémentaires. Toutefois, je ne peux déterminer clairement si la batterie a un impact direct sur mes pièces originales et sur le son d'ensemble. Si je n'ai pas étudié spécifiquement la composition, je  m'estime capable de faire émerger cette musique à travers mes idées et la personnalité de mes collaborateurs.

«Ce qui compte au fond, c'est que tous puissent s'écouter mutuellement et réagir les uns aux autres afin de créer ici et maintenant.  J'aime parler de «composition sur les lieux». L'improvisation et la composition sont des pratiques beaucoup plus proches qu'on pense. Essentiellement, je n'y vois  la différence que dans la vitesse  d'exécution!»

Ari Hoenig, Tigran Hamasyan, Gilad Hekselman et Chris Tordini se produisent ce vendredi à L'Astral de Montréal dans le cadre de la programmation Jazz à l'année du FIJM, puis dimanche et lundi au Largo de Québec, dans le cadre du Festival de jazz actuellement en cours dans la capitale.