Paul McCartney n'était sur scène que depuis une quinzaine de minutes quand, tout de suite après la troisième chanson au programme (All My Loving), le public lui a servi une ovation à rendre jaloux tous les artistes qui ont déjà chanté au Centre Bell. Les 16 993 spectateurs qui avaient attendu jusqu'à 20h50 pour voir apparaître le toujours Beatle - le Centre Bell a ouvert ses portes dès la fin de la balance de son à 19h25 - étaient non seulement d'une patience exemplaire, ils étaient aussi d'un enthousiasme rare. Sans doute quelque chose à voir avec la musique de Macca.

Celui-ci s'en est vite aperçu. L'an dernier, Montréal lui avait réservé l'accueil le plus chaleureux de sa tournée, ce qui explique son retour rapide, deux soirs plutôt qu'un. Le cute Beatle est un cheerleader-né, mais mardi soir, il avait l'air sincèrement étonné de l'intensité des cris et des applaudissements.

«J'ai l'impression qu'il va y avoir un party ici ce soir, a-t-il constaté après avoir enlevé son veston rouge. Eh bien aussi bien commencer tout de suite!» Il s'est aussitôt lancé dans Birthday qui a fait l'effet que vous devinez.

Ceux qui ont eu le bonheur d'applaudir McCartney en août 2010 étaient forcément en terrain connu. McCartney a greffé un bout de Foxy Lady de Hendrix à Let Me Roll It, il a répété son petit laïus sur les messages que lui adressent les fans sur leurs pancartes, il a situé Blackbird dans le contexte des émeutes dans le sud des États-Unis dans les années 60 puis il a donné un coup de chapeau à John (Here Today) et à George (Something).

Mais il y a eu également pour ces habitués des moments de grâce qui justifiaient à eux seuls une deuxième présence en autant d'années. En commençant par la toute première chanson, Hello Goodbye, qui a semé le bonheur dans le Centre Bell comme seul Paul McCartney sait le faire. Puis des choses plus rares des Beatles comme I'm Looking Through You, la très belle The Night Before qu'il chantait pour la première fois au Canada et la toute douce I Will avant laquelle Macca s'est réjoui que Kate Middleton ait répondu «I will» plutôt que «I do» quand elle a pris pour époux le prince William. Et il nous a fait l'honneur de la grande Maybe I'm Amazed qu'il avait «oubliée» l'an dernier.

Macca, le séducteur

McCartney le séducteur a encore fait mouche en parlant occasionnellement en français, en chantant l'obligatoire Michelle pour le public montréalais, en lançant quelques blagues et boutades sympathiques avec un humour délicieusement british et en menant ce généreux spectacle avec un naturel et une aisance exceptionnels, donnant à chacun des spectateurs l'impression de retrouvailles intimes avec une tranche précieuse de son passé.

Un spectacle de McCartney tient beaucoup au rapport qu'entretiennent tous ses spectateurs avec l'un des répertoires les plus riches de l'histoire de la musique populaire. À la joie innocente d'Ob-la-di, Ob-la-da tout autant qu'à l'émotion d'A Day in the Life ou Let It Be ou à la communion de Hey Jude.

Mais pour que ça fonctionne, il faut un artiste à la hauteur de cet énorme défi. Et ça, personne ne le fait mieux que McCartney qui, à 69 ans, est en pleine possession de ses moyens et a conservé une énergie, une fraîcheur et un enthousiasme qui tiennent du phénomène.

Il remet ça mercredi soir, même heure, même poste.